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Sanctions américaines : le temps de la riposte est venu
©SAUL LOEB / AFP

Ami ou ennemi ?

L'éventail des sanctions décrétées par Washington aux quatre coins du monde est vaste, et entraîne, directement ou non, de nombreux effets délétères pour l'économie européenne. Une conclusion s'impose : on ne peut plus compter sur notre allié historique. Si de premiers signes de riposte européenne se font jour, celle-ci n'est pour l'instant pas assez concertée ni assez massive.

Quand le héraut du mondialisme le plus débridé tourne casaque. Depuis son accession à la Maison Blanche, Donald Trump, fidèle à son mantra « America First », entraine les Etats-Unis à multiplier les sanctions économiques et diplomatiques à travers le monde. Iran, Russie et même Union européenne (UE) : ennemis de toujours ou anciens alliés, aucun pays ne semble à l'abri de la fièvre punitive qui s'est emparée de Washington. Le Vieux continent pas davantage que les autres, ses entreprises se retrouvant, par la grâce de l'extraterritorialité du droit américain, directement menacées par des sanctions qui ne les visent pourtant pas au premier chef.

Face aux sanctions américaines, une riposte européenne dispersée

Ainsi des sanctions « secondaires » réactivées à l'encontre de l'Iran, à la suite de la sortie des Etats-Unis de l'accord sur le nucléaire, signé à Vienne en 2015. Depuis le 4 novembre, les secteurs iraniens du pétrole, du gaz et de la finance sont, de fait, blacklistés. A partir de cette date, toute entreprise française ou européenne qui poursuivrait ses transactions avec les secteurs visés par Washington risquerait d'intégrer la liste des « Specially Designated Nationals » (SDN), un sigle créé par l'Ofac (Office of Foreign Assets Control) américain pour désigner les entités contournant l'embargo.

Une menace prise très au sérieux par les entreprises tricolores, dont les exportations vers Téhéran ont atteint 1,5 milliard d'euros au cours des deux dernières années. Des mastodontes comme Total, PSA ou Renault se sont ainsi immédiatement désengagés de leurs projets en Iran. Le secteur bancaire étant ciblé, aucune industrie n'est épargnée, les contrevenants risquant de perdre leur accès au marché américain et de se voir infliger de lourdes sanctions financières. La mésaventure de BNP Paribas, contrainte en 2014 de régler une ardoise de 9 milliards de dollars au Trésor américain, reste dans tous les esprits.

Longtemps tétanisées par l'aventurisme du nouvel hôte de la Maison Blanche, les chancelleries européennes organisent la riposte, mais en ordre dispersé. La France, le Royaume-Uni et l'Allemagne souhaitent ainsi la création d'une « bourse européenne anti-sanctions américaines », hébergée en Autriche. Défendu par la cheffe de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, ce « Special Purpose Vehicle » (SPV) pourrait faire office d'intermédiaire afin que les entreprises du continent puissent commercer avec l'Iran sans s'exposer aux sanctions de l'Oncle Sam. Mais pour l'heure, Vienne a exprimé une fin de non-recevoir.

Et quid des taxes décrétées par Washington sur l'acier et l'aluminium ? Quid des sanctions américaines visant des entreprises russes, dont le géant de l’aluminium Rusal, qui fournissent une part non négligeable des matières premières dont nos grandes entreprises et PME ont un besoin vital ? On parle ici de centaines de milliers d'emplois en Europe, autant d'emplois directement menacés si ces sociétés ne peuvent commercer avec les entités russes visées. Pour le seul secteur de l’aluminium, les sanctions américaines pourraient négativement affecter 250 000 emplois directs en Europe, dont 1 500 en France, et 100 000 emplois indirects.

Les Etats-Unis envisagent également de nouvelles taxes sur les importations d'automobiles européennes. Fin août, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a menacé Washington de représailles douanières équivalentes. Bruxelles a aussi proposé une forme de trêve, en suggérant qu'UE et Etats-Unis renoncent de concert aux droits de douane sur les importations de voitures. Une offre promptement déclinée par Donald Trump, dont on connait l'aversion pour les grosses berlines allemandes remontant les avenues de son New York natal.

De la nécessité d'un souverainisme européen

Divisée, apeurée, indécise, l'Europe tente vaille que vaille de répondre aux provocations du milliardaire américain. De manière trop brouillonne et impréparée pour le moment. Il faut nous rendre à l'évidence : si les Etats-Unis n'ont jamais fait mystère d'une forme de « préférence nationale » économique, l'UE manque encore d'une politique souverainiste digne de ce nom. Une politique pourtant appelée de ses vœux par le président français, Emmanuel Macron ayant déclaré devant les députés allemands, le 18 novembre, que « l'Europe doit être plus forte, plus souveraine ». Une « nouvelle responsabilité franco-allemande (qui) consiste à doter l'Europe des outils de sa souveraineté », a encore martelé le chef de l'Etat. Seuls de tels outils permettront d'élaborer une riposte européenne enfin massive et concertée.

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