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Mais que se passe-t-il dans l'Atlantique nord ? La dernière fois où les courants marins ont été aussi faibles, la Terre a connu un mini âge glaciaire
©Reuters

C'était il y a 1500 ans

La revue Nature a publié une nouvelle étude sur l'évolution des courants dans l'océan Atlantique nord, au large du Canada. Un autre article publié montre le réchauffement des températures en surface.

Didier Swingedouw

Didier Swingedouw

Didier Swingedouw est chercheur au CNRS et il travaille au Laboratoire Environnements et Paléoenvironnements Océaniques et Continentaux (EPOC), à Bordeaux. Il a obtenu son doctorat en 2006 à l’université Pierre-et-Marie-Curie. Sa thèse portait sur le devenir de la circulation océanique grande échelle. Les thèmes de recherche de Didier Swingedouw concernent la dynamique de l’océan et du climat à différentes échelles de temps (période récente, période à venir mais aussi périodes plus anciennes comme le dernier millénaire).

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Atlantico : Les risques d'affaiblissement des courants océaniques, dont le Gulf Stream sont étudiés depuis déjà un moment. Que nous explique cette nouvelle étude réalisée par l'Université de Hong-Kong publiée dans la revue Nature ?

Didier Swingedouw : C'est une tentative de reconstruction des courants océaniques. Cette étude est basée sur un proxy de climat. En l'occurrence un proxy des courants océaniques. L'idée est de mesurer la quantité de certains dépôts pour en déduire l'intensité des courants profonds. C'est ce qu'on fait les auteurs. Le résultat de leur analyse tend à montrer que la concentration des particules s'amenuise, ce qui implique une diminution du transport des courants profonds. Un bémol toutefois, le temps d'étude est court puisque l'on parle là d'une ou plusieurs dizaines d'années.

De manière plus générale, les courants seraient devenus plus faibles même s'il est difficile de quantifier cette perte d'intensité. Cette étude mérite toutefois confirmation car elle est d'abord esseulée et que les données sont assez indirectes.

Dans le même numéro de la revue Nature, il y avait un autre article  qui confirmait un peu cette étude avec une autre méthodologie. L'étude remontait sur une centaine d'années et étudiait l'évolution des températures en surface des océans. Selon cette dernière en Atlantique Nord, on observait assez peu de réchauffement sur cette région au contraire d'autres parties de l'océan. On observait même une baisse mais qui n'est pas franchement significative.  Eux ont utilisé cette signature en température comme une signature de l'intensité des courants.

A quel point le climat et notre environnement dépendent-ils de la circulation de courants océaniques ? Quelles seraient les conséquences d'une réduction voire d'un arrêt de ces transferts d'eau ?

L'article de Nature parle de "little ice age", soit d'un petit âge de glace. C'est un événement qui a eu lieu au 15e, 16e, 7e siècle pendant lequel l'Europe a été un peu plus froide (d'un degré Celsius). Si nous ne savons pas encore ce qui a justifié ce phénomène, l'hypothèse qui tient le haut du pavée est bien cette idée d'une circulation qui aurait un peu ralentie.

Pour vous répondre plus directement il faut d'abord prendre en compte l'amplitude du phénomène. On parle aujourd'hui de 15% de la diminution du courant océanique en Atlantique Nord. Même si l'effet n'est pas fort, cela a peut-être un peu ralenti le réchauffement climatique dans nos régions. A priori, sauf une diminution drastique de la circulation (improbable) le réchauffement climatique devrait quand même dominer sur les régions européennes. La diminution des courants s'apprécie aussi en fonction des saisons, cela joue surtout en hiver. On pourrait avoir finalement des hivers qui resteraient plutôt rigoureux. En été on pourrait s'attendre à l'effet inverse mais cela favoriserait plutôt les vagues de chaud.  Ces hypothèses sont toutefois issues de résultats récents qui resteraient à confirmer.

Sur le réchauffement climatique, la région la plus sensible aux variations de la circulation océanique se trouvent au niveau du Sahel car la quantité de pluie qui va tomber dans ces régions est fortement dépendante des variations océaniques. Dans les projections climatiques, on voit clairement que si la circulation océanique est réduite drastiquement, cela diminuera de la même manière les précipitations dans cette région.

Une telle diminution aura un impact sur les cultures vivrières de ces régions et l'impact humanitaire sera énorme et pourra accentuer la pression migratoire vers l'Europe.

Peut-on dater l'origine et identifier la cause de cet affaiblissement des courants ?

Non. Nous avons des hypothèses qui sont de l'ordre de la spéculation. Pour faire de l'attribution, nous avons besoin d'un modèle de climat et aucune étude d'attribution n'ont été faites jusqu'à présent. Il n'y a pas vraiment de publication associée. On constate tout de même une diminution de la circulation océanique en Atlantique mais qui reste relativement lente (même si cela dépend des modèles). Selon les modèles on voit une diminution de 7% sur le 20e siècle. Dans l'étude de Caesar, ils estiment la même diminution à plutôt 15%. Une explication qui permettrait d'expliquer ce différentiel serait la fonte de la calotte groenlandaise que l'on voit fondre de plus en plus vite.  L'eau douce apportée dans l'Atlantique Nord pourrait faire ainsi diminuer la densité de surface, ce qui aurait pour effet de réduire le plongement des eaux de surface et in fine la vitesse des courants. Mais c'est extrêmement compliqué à quantifier.

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