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MIchel Onfray : "Je n’ai jamais vu de croyants, même fervents, convaincus de l’éternité au point d’aborder la mort avec envie, désir et gourmandise"
©CYRIL VILLEMAIN / AFP

Atlantico Litterati - Suite

Michel Onfray, qui vient de faire son dernier livre, "La stricte observance, avec Rancé à la Trappe", a répondu aux questions d'Annick Geille sur cette déclaration à la foi "incandescente" des vrais chrétiens.

Michel Onfray

Michel Onfray

Michel Onfray est philosophe. Particulièrement intéressé aux questions liées à la politique, la morale, l'athéisme et l'histoire de la philosophie, il est l'auteur de nombreux ouvrages.

Parmi les plus récents, on trouvera notamment La passion de la méchanceté : Sur un prétendu divin marquis (Autrement / 2014), Les Freudiens hérétiques (Grasset / 2013), Rendre la raison populaire (Autrement / 2012) ou encore L'ordre libertaire (Flammarion / 2012).

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Atlantico : Vous questionnez la mort en athée tenté par la douceur de croire ?

Michel Onfray : Chaque deuil se ressemble et ne ressemble à rien d’autre… Rien n’est plus semblable que mort de l’un à celle d’un autre, mais, en même temps, rien n’est plus dissemblable. Car la mort d’une personne connue, aimée, chérie, emporte une partie de nous alors que celle d’un tiers inconnu n’emporte qu’une partie de ceux qui l’ont connu. Que Rancé ait vu le corps coupé en deux de Madame de Montbazon et, dit-on, sa tête séparée du corps parce que le cercueil était trop petit est une image avec laquelle il dût vivre. Pour ma part j’en ai deux ou trois autres, pas les mêmes bien sûr, mais avec lesquelles il me faut vivre aussi.  

Lire aussi, dans notre rendez-vous Atlantico Litterati : Le nouvel Onfray

"Le mieux est peut-être de ne pas être, donc de ne pas naître", dites-vous ?

Oui, c’est en effet le mieux, mais on n’a pas le choix pour soi – personne ne l’a jamais d’ailleurs, c’est une banalité. Mais il nous reste à ne pas commettre l’irréparable en faisant advenir à l’être, c’est à dire au néant, une personne qui na rien demandé… Ne pas être n’est pas ne plus être, ce qui serait se supprimer. C’est penser que ne pas sortir du néant vaut mieux que d’y aller après avoir vécu.

Avoir la foi rend la mort d'autrui tolérable ?

Dans l’idée que je m’en fais, oui :  si l’on pense que les morts ne sont pas morts, parce qu’il y a une vie après la mort, que l’on s’y retrouve, et que l’éternité nous y attend, alors on devrait se réjouir de passer de vie à trépas. Mais je n’ai jamais vu de croyants fervents et convaincus à ce point qu’ils abordent la mort avec envie, désir et gourmandise…

Écrire "La stricte observance" vous a-t-il aidé, malgré tout ?

Ce que j’ai aimé dans cette expérience, c’est la compagnie lointaine d’hommes qui vivent leur foi de façon incandescente sans avoir envie de l’imposer à autrui et ce dans le silence et le rituel, le dépouillement et l’austérité, en y ayant mis toute leur vie. C’est le contraire de la foi bourgeoise de ceux qui ont des certitudes dominicales qui sont rarement suivies d’effets concrets dans la vie réelle le restant de la semaine... Dans un monastère, personne ne peut tricher. Dans la vie, tout le monde triche ou presque…


(Interview par Annick Geille)

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