Pourquoi l’accord sur le Brexit n’est en fait pas l’accord sur le Brexit<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Europe
Pourquoi l’accord sur le Brexit n’est en fait pas l’accord sur le Brexit
©Brendan Smialowski / AFP

Brexit

Un accord entre les négociateurs européens et britanniques aurait été trouvé sur la question de la frontière irlandaise, et serait actuellement sur le bureau de Theresa May avant une possible présentation ce 14 novembre.

Rémi Bourgeot

Rémi Bourgeot

Rémi Bourgeot est économiste et chercheur associé à l’IRIS. Il se consacre aux défis du développement technologique, de la stratégie commerciale et de l’équilibre monétaire de l’Europe en particulier.

Il a poursuivi une carrière d’économiste de marché dans le secteur financier et d’expert économique sur l’Europe et les marchés émergents pour divers think tanks. Il a travaillé sur un éventail de secteurs industriels, notamment l’électronique, l’énergie, l’aérospatiale et la santé ainsi que sur la stratégie technologique des grandes puissances dans ces domaines.

Il est ingénieur de l’Institut supérieur de l’aéronautique et de l’espace (ISAE-Supaéro), diplômé d’un master de l’Ecole d’économie de Toulouse, et docteur de l’Ecole des Hautes études en sciences sociales (EHESS).

Voir la bio »

Atlantico : Comment évaluer l'avancée des discussions sur le Brexit ? 

Rémi Bourgeot : La dramaturgie des dernières semaines s’est concentrée sur la question de l’accord de sortie. En réalité, la plupart de ces questions étaient censées avoir été réglées en grande partie en décembre 2017, notamment sur la question de la facture de sortie, mais demeuraient un certain nombre de détails en particulier sur la question de la frontière irlandaise. La partie européenne souhaite des garanties permettant l’absence de frontière en l’Irlande du nord et la République d’Irlande quelque soit le type d’accord qui sera négocié entre l’UE et le Royaume-Uni. Pourtant, au vu de la façon dont fonctionnent les accords commerciaux en Europe et de par le monde et des moyens technologiques actuels, dans tous les cas, le rétablissement d’une frontière n’est guère nécessaire en Irlande, en plus d’être effectivement redoutable sur le plan politique et économique au niveau local.

Le fait de s’accorder sur le principe d’un accord de sortie, s’il est soutenu à Londres, permet d’éviter une sortie désordonnée en mars prochain, qui aurait des conséquences désastreuses pour le Royaume-Uni du fait de l’incertitude et de l’impréparation des entreprises et des administrations à ce scénario inattendu, mais aussi pour les partenaires européens du Royaume-Uni. Il faut garder à l’esprit que Londres est le premier centre financier de l’UE et de la zone euro, sans pour autant faire partie de la seconde ni plus bientôt de la première.

Une fois que cette perspective sera définitivement écartée, les deux parties dans ces négociations se sont déjà entendues sur une période de transition au cours de laquelle les règles actuelles vont continuer à s’appliquer et dont il est, de plus, entendu qu’elle peut être étendue.

Quelles seront les prochaines étapes à franchir ? En quoi l'accord de ce jour n'est-il finalement qu'une étape ?

Le cœur des négociations devra se recentrer sur la relation commerciale future, en suivant une vision large plutôt qu’un encastrement improbable de conditions sine qua non. Cela a déjà été largement évoqué, mais il est surprenant que des détails en réalité assez simples aient autant dominé les négociations pour l’instant. Il est apparu qu’un certain nombre de participants de ces négociations, des deux côtés, n’avaient pas une expérience approfondie des négociations commerciales ni conscience du caractère quelque peu artisanal, ou en tous cas contingent, des systèmes commerciaux qui sont négociés en général, notamment à la périphérie européenne. La vision mathématique de ces négociations, au lieu de les rendre plus précises, les a plutôt enfermées dans un jeu théâtral qui fait l’impasse sur le cœur économique et social du sujet.

Une fois écartée le spectre d’une sortie sans accord, le débat doit se recentrer sur la relation commerciale, en ayant à l’esprit les tendances économiques européennes dans lesquelles elles doivent s’inscrire. Il s’agit notamment d’éviter que le Royaume-Uni n’accroisse son offre de services financiers offshore et la compétition fiscale avec ses partenaires européennes. Pour sortir de cette logique, il convient d’envisager un système qui repose sur un certain équilibre commercial, à l’heure où l’UE et la zone euro en particulier ont le plus grand mal à aborder en leur sein la question d’un rééquilibrage vers le haut des modèles de production, au moyen d’un début de coordination macroéconomique notamment.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !