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Le progressisme tente de se donner une nouvelle définition mais peine à le faire
©PATRICK HERTZOG / AFP

Dans quel état j'erre ?

La République en Marche, la Fondation Jean Jaurès et la Fondapol organisent ce samedi une conférence intitulée : "Progressisme, mais encore ?". Au cours de cette conférence, des thèmes comme la dignité, l'émancipation , l'engagement, la transmission, ou la responsabilité seront abordés. Ils auraient tout aussi bien pu être traités lors de colloques libéraux ou conservateurs.

Eric Deschavanne

Eric Deschavanne

Eric Deschavanne est professeur de philosophie.

A 48 ans, il est actuellement membre du Conseil d’analyse de la société et chargé de cours à l’université Paris IV et a récemment publié Le deuxième
humanisme – Introduction à la pensée de Luc Ferry
(Germina, 2010). Il est également l’auteur, avec Pierre-Henri Tavoillot, de Philosophie des âges de la vie (Grasset, 2007).

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Atlantico : La République en Marche, la Fondation Jean Jaurès et la Fondapol organisent ce samedi 20 octobre une conférence sur le thème : "Progressisme, mais encore ?" Au cours de cette conférence, des thèmes comme la dignité, l'émancipation , l'engagement, la transmission, ou la responsabilité, en plus de plusieurs sujets concernant la méthode seront abordés, tout comme ils auraient pu être traités lors de colloques libéraux ou conservateurs. Comment expliquer cette difficulté à proposer un contenu exclusif, aussi bien sur la forme que sur le fond ? 

Eric Deschavanne : Assez simplement ! D'abord parce le progressisme en politique tend à se confondre avec le volontarisme, avec l'optimisme de la volonté : le progressiste, c'est celui qui croit le progrès possible, de sorte que tout candidat, même s'il ne se revendique pas progressiste, est nécessairement pour le progrès. Ensuite, parce que celui qui proclame qu'il est pour le progrès a bien souvent les mêmes objectifs politiques que ceux qu'il baptise "conservateurs", lesquels n'ont que le tort à leurs yeux d'exprimer réserves et scepticisme à propos de l'efficacité des réformes proposées. 

Dès lors que vous avez à peu près les mêmes critères d'amélioration du sort de vos concitoyens, mieux éduquer les enfants, mieux protéger la santé, accroître la prospérité par la croissance économique, l'augmentation des salaires, la diminution du chômage et la baisse des impôts, etc., il est difficile de se présenter aux élections en disant qu'on est contre le progrès ! Il existe bien entendu des vrais adversaires du progrès, les partisans de la décroissance par exemple, dont la position se fonde sur des considérations morales et idéologiques, mais ils sont voués à une certaine marginalité politique.

Que peut révéler cette focalisation sur les questions de méthode ? Le progressisme n'est il plus qu'une forme ? 

Le "progressisme" comme étiquette politique n'a guère plus de sens aujourd'hui que celle de "réactionnaire", car tout le monde en réalité partage la même conception de la "société juste" : une société démocratique assurant au moyen d'un marché libre et d'un Etat social le maximum de liberté, d'égalité et de bien-être. Les divergences de principes et de modèles n'existent qu'à la marge, contrairement à ce qu'on a connu dans des situations historiques antérieures, après la Révolution française, quand partisans de l'Ancien Régime et révolutionnaires s'opposaient, ou dans les années 30 du 20e siècle, lors du conflit idéologique opposant fascistes, communistes et libéraux. J'ajoute que l'arrière-fond philosophique, l'opposition entre partisans d'une nature humaine intangible et partisans de la perfectibilité humaine, tend lui aussi à s'estomper. Dans la société de l'innovation permanente, il est possible d'être conservateur et nostalgique, mais il devient difficile de croire à la permanence de la condition humaine.

Comment peut s'inscrire ce progressisme dans le spectre politique actuel ? 

Paradoxalement, il me semble que le progressisme auto-proclamé exprime aujourd'hui une inquiétude face à la montée des populismes. Le macronisme en est l'illustration. L'appelation "progressiste" a permis à Emmanuel Macron de s'émanciper du clivage droite-gauche et d'éviter d'assumer l'étiquette  "libéral", ce qui est toujours difficile en France; il s'agit donc a priori d'un positionnement tactique. Sur le fond, toutefois, son progressisme désigne une volonté de relancer un réformisme libéral destiné à redonner du lustre à la France et à l'Europe, face au scepticisme qui monte, et qu'exprime le populisme, à l'égard du libéralisme économique et de la construction européenne.

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