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Qui sont ces électeurs capables de naviguer entre la droite et la gauche en fonction des scrutins ?
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Change we can !

L’élection présidentielle de 2007 avait été marquée par une poussée du centre, à plus de 18% au premier tour. Une poussée éphémère : cinq ans après, l'électorat est revenu sur un clivage traditionnel droite-gauche. Une situation rendue quasiment obligatoire par les institutions de la Ve république, mais qui s'explique aussi par le profil sociologique des électeurs.

Alexis Massart

Alexis Massart

Alexis Massart  est directeur d'Espol, école européenne de sciences politiques et sociales de l'Université catholique de Lille.

 

 

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Atlantico : Contrairement à l’élection présidentielle de 2007, qui a vu l’émergence d’un courant centriste caractérisé par le score élevé de François Bayrou (plus de 18%), l’élection de 2012 semble revenir sur un clivage classique gauche – droite. L’électorat français est-il ancré dans celui-ci de manière immuable ?

Alexis Massart : Le système politique de la Ve république est conçu ainsi dans la mesure où le duel du second tour de la présidentielle est organisé sur un clivage droite - gauche, malgré quelques percés politiques. Ainsi, celle de François Bayrou en 2007 n’a pas empêché un deuxième tour ancré dans ce clivage.

Que se soit la volonté de Lecanuet en 1965 ou celle de Servan-Schreiber en 1974, nous sommes toujours retombés sur un second tour qui s’est joué entre la droite et la gauche. A l’exception de 2002 où Lionel Jospin fut disqualifié suite à une dispersion des voix de gauche, l’électorat est donc inévitablement amené à prendre position sur un débat droite-gauche. Il prend donc cette habitude d’élections en élections, ce qui favorise une bipolarisation droite-gauche de la vie politique française.

Il existe cependant un phénomène de déplacement des électeurs entre la droite et la gauche. La catégorie la plus représentative de ce phénomène étant celle des jeunes. Il s’agit de l’électorat le plus volatile. Par exemple, ils ont fortement soutenu Jacques Chirac en 1995 alors qu’ils sont traditionnellement plus à gauche.

Quels sont les principaux facteurs qui influencent l’ancrage politique d’un électeur dans ce clivage droite-gauche ? La famille, la profession exercée... ?

Entre la fonction publique et l’attachement à l’Etat qui favorisent davantage un vote de gauche et les professions libérales plutôt basées sur une dynamique entrepreneuriale, la profession reste un marqueur assez important. L’âge est aussi un facteur important.

Globalement, il y a toujours aussi une tendance à reproduire le schéma familial en terme de vote mais pas de manière absolue car d’autres marqueurs viennent modifier les lignes.

A l’inverse, certains marqueurs étaient historiquement significatifs mais leur influence s’est atténuée avec le temps. Par exemple, les femmes votaient généralement plutôt à droite, ce qui est moins le cas aujourd’hui. Il en est de même avec la religion.

Y a t-il en France, comme c’est le cas aux Etats-Unis, un électorat politiquement indépendant susceptible de passer de la droite à la gauche et inversement en fonction des scrutins ?

Il y a effectivement des électeurs susceptibles de basculer d’un côté ou de l’autre. Ce que nous constatons est surtout une plus grande volatilité de l’électorat par rapport à ce dont nous avions l’habitude de voir en France.

Historiquement, cela a évolué avec l’arrivé de la gauche au pouvoir. Avant, il y avait une approche de grande différenciation entre la droite et la gauche. Mais l’arrivé de la gauche au pouvoir dans les années 1980, et c’est encore plus vrai avec les gouvernements Rocard, a démontré que les différences idéologiques et gouvernementales n’étaient pas aussi prononcés qu’on l’imaginait.

Il y a donc un électorat, plutôt de nature centriste, susceptible de basculer d’un côté ou de l’autre suivant la personnalité du candidat. On les trouve davantage dans les couches intellectualisées de la population.

Pour cette catégorie, faut-il alors parler en France d’un électorat indépendant ou indécis ?

Il est difficile de se prononcer là dessus, mais ils sont tout de même plus indécis qu’indépendant. En 2007 par exemple, 17% de l’électorat a déclaré s’être décidé le jour de l’élection dans l’isoloir et ce mouvement a même tendance à s’amplifier.

Paradoxalement, plus le sentiment de non différenciation entre la droite et la gauche est grand, plus le temps nécessaire à la décision est important puisque les électeurs vont alors davantage se décider sur la personnalité des candidats ou sur quelques points clés de l’élection. Cette catégorie d’électeurs représente approximativement un cinquième de l’électorat, ce qui est susceptible de faire basculer une élection.

Propos recueillis par Olivier Harmant

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