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Derrière l'amende monstre contre Google un retour au fait du prince dont les perdants seront les consommateurs européens
©ALAIN JOCARD / AFP

Le contre

La Commission européenne vient d'infliger une amende de 4,3 milliards d'euros à Google. Si la Commission mettait autant d'énergie à permettre aux acteurs européens de lutter à armes égales contre les géants américains ou chinois du digital, qu'à condamner les GAFAM, nous serions, comme au foot, les champions du monde.

Guillaume Labbez

Guillaume Labbez

Après un début de carrière en cabinet ministériel sous les gouvernements Raffarin et de Villepin, Guillaume Labbez devient Conseil en communication et en affaires publiques et Maître de conférences en Négociation à l'école d'Affaires publiques de Sciences Po. Engagé dans le débat d'idées, il est administrateur de la Fondation Concorde, secrétaire général de DroiteLib' et membre du bureau politique des Républicains.
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En infligeant une amende de 4,3 milliards d'euros à Google (!), la Commission vient d'apporter une nouvelle illustration d'une phrase de Ronald Reagan qui résumait en quelques mots la vision des technocrates de l'économie : « Si ça bouge, taxez-le. Si ça continue à bouger, régulez-le. Si ça s'arrête de bouger, subventionnez-le. » 

Si la Commission européenne, mettait autant d'énergie à permettre aux acteurs européens de lutter à armes égales contre les géants américains ou chinois du digital, qu'à condamner les GAFAM, nulle doute que nous serions, comme au foot, les champions du monde.

Ce qu'il faut savoir à propos de la condamnation d'Android :

Android fournit un des environnements les plus ouverts du marché (open source), contrairement à Apple (système fermé), mais  son propriétaire, Google, est condamné car ils ont su conquérir beaucoup de parts de marché (seulement 20% pour Apple). Si les consommateurs préfèrent Android, c'est parce que choisir Android c’est pouvoir choisir son hardware (le matériel) et beaucoup plus d’applications que sur n’importe quel smartphone (les utilisateurs peuvent choisir parmi 24 000 appareils de plus de 1 300 marques différentes).

Bien entendu, le développement de cet environnement n’est pas gratuit, et Google ne dégage pas sur ce software autant de marges que peut le faire Apple (150 € pour le téléphone sous Android le moins cher).

Cette décision est aussi mauvaise pour Google que pour les consommateurs, car elle menace l’équilibre de tout l’écosystème Android. C’est ce modèle qui a permis à Google de ne pas faire payer les constructeurs de téléphones ni de dépendre d'un modèle de distribution fermé et strictement contrôlé. La décision de la Commission bouleverse cet équilibre fragile et favorise les systèmes propriétaires fermés par rapport aux systèmes ouverts alors que 1,6 million d'Européens gagnent leur vie en tant que développeurs d'applications. 

Donc cette décision va à l’encontre de l’intérêt des consommateurs que la Commission est supposée protéger. Google ne faisait pas payer la licence aux constructeurs qui devaient en échange installer certaines applications Google. Puis le consommateur étaient libres de les supprimer pour en installer d’autres.

Une mesure protectionniste qui ne s'assume pas :

Il s’agit en fait d’un protectionnisme non-assumé, à l’encontre des GAFAM, animé par une volonté de la Commission de sanctionner ces leaders américains, alors que les pays de l’UE échouent à créer une environnement économique viable pour le développement de géants (fiscalité et règlementation). Demain pourtant, les GAFAM resteront leaders sur leurs marchés, et nos entreprises leaders européens continueront à manquer d'oxygène, de ressources financières et d'un marché intérieur assez puissant, pour rivaliser avec eux. 

Une mesure anti économique :

Cette décision va contribuer à continuer de décourager l’innovation en Europe et à créer un climat économique encore plus délétère. Il n’y a aujourd’hui aucun poids lourd numérique européen, les GAFAM sont américains, parce que l’Europe est hostile aux "grandes puissances financières". Pourtant, aujourd’hui c’est Google et les GAFAM, qui sont les plus capables d’innover rapidement dans la e-santé, la conduite autonome, l'I.A…

Il est faux de dire que la Commission protège ici son marché d'un monopole, alors qu'il n’y a en économique que des monopoles légaux. Oui, Google a une part significative du marché, mais n’est pas en situation de monopole. Même quand il y a un ultra-leader dans un secteur, il y aura toujours la possibilité pour un nouvel entrant de faire une nouvelle offre. L'histoire économique montre qu'à chaque fois, les grandes entreprises ont tendance à perdre en agilité et finissent par perdre pied dans la course à l’innovation. 

15 ans en arrière, l’UE désignait Microsoft comme ennemi, depuis son « monopole » est tombé, grâce au marché libre... et pas grâce à la Commission européenne.

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