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Prélèvement à la source : le cafouillage continue mettant en péril le système
©JOEL SAGET / AFP

Edito

Le feuilleton du prélèvement à la source vient de connaître un nouveau rebondissement. Moins d’une semaine après l’annonce d’un report de la réforme envisagée pour les employés de maison, le gouvernement s’apprête à modifier une fois de plus son projet.

Michel Garibal

Michel Garibal

Michel Garibal , journaliste, a fait une grande partie de sa carrière à la radio, sur France Inter, et dans la presse écrite, aux Échos et au Figaro Magazine.

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Il est vrai que la dernière mouture avait provoqué une vive tension au sein de l’exécutif lui-même, au point que Richard Ferrand, le président du groupe parlementaire Enmarche s’en était ouvert auprès d’Emmanuel Macron pour dénoncer les dangers qu’il comportait. En effet, le texte prévoyait de reporter le paiement de l’impôt d’un an, en créant ainsi une année blanche pour les redevables -gens de maison, aides à domicile, etc – qui seraient soumis l’année suivante à la double peine d’acquitter deux fois l’impôt, tandis qu’on demandait aux assujettis de déduire eux-mêmes l’impôt sur leur salaire net.  Bref, on créait un système d’une redoutable complexité, qui représentait une porte ouverte à la fraude, en facilitant le travail noir devant la difficulté de mise en application d’un tel régime.

D’où la volte- face du gouvernement qui propose désormais que les salariés payés par chèques emplois universels (Cesu) soient prélevés dans deux ans sur les revenus de 2020, en rayant d’un trait de plume l’année 2019, en plus de celle de 2018. Ces salariés gagneraient ainsi deux années de prélèvement au lieu d’une seule. Pour les finances publiques, le coût ne serais pas exorbitant, puisqu’il concernerait seulement 250 000 contribuables sur un million, la majorité n’étant pas redevables de l’impôt. Du même coup, le pouvoir espère éteindre l’incendie qui couvait au sein du Parlement. Il n’empêche : une fois de plus, il sera dénoncé pour l’impréparation dont il fait preuve en matière de réforme, car les dégâts commencent à apparaitre clairement sur un sujet aussi sensible pour les Français que la fiscalité. On voit mal comment une dispense de taxation pendant deux ans d’une partie, même minoritaire, de la population, pourrait au demeurant être invalidée par le conseil constitutionnel qui ne manquera pas d’y voir un manquement à la règle de l’égalité entre les contribuables. L’argument du gouvernement invoquant le fait que les revenus concernés sont souvent des compléments à une rémunération principale ne vaut guère. Mais, surtout, il va renforcer le camp de ceux qui sont hostiles à la mise en route d’un processus qui va engendrer une multitude d’incidents. Déjà toute une série de petites entreprises, d’artisans et de commerçants sont bien décidés à faire la grève du prélèvement parce qu’ils n’ont pas les moyens de l’appliquer eux-mêmes. La sagesse consisterait dans un premier temps à généraliser le prélèvement mensuel qui concerne déjà une grande partie des contribuables tout en assurant une simplification de l’impôt sur le revenu, de façon à réduire les dizaines de régimes différenciés qui existent, la résorption des niches fiscales, la simplification des système matrimoniaux, qui sont autant d’obstacles en raison des complications qu’ils apportent dans le fonctionnement du système. Tout cela demanderait certes du temps, mais éviterait de s’engager dans une impasse lourde de conséquences sur le plan politique. Car on imagine déjà les demandes d’exonérations temporaires qui vont émaner de la part d’une série de corporations ou d’entreprises. Ce serait un moindre mal pour le gouvernement de reculer encore d’un an le démarrage de la réforme plutôt que de vouloir multiplier une différenciation entre les catégories de contribuables, source de frustrations et de levées de boucliers préjudiciables à la paix publique. Dans cette affaire, rien ne serait plus préjudiciable que l’obstination à perpétrer une politique, qui engendre une série de reculades au risque de se terminer par une capitulation en rase campagne.

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