Universités, ZAD, grèves...cette violence dont l’Etat ne se préoccupe pas assez<!-- --> | Atlantico.fr
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Les cheminots grévistes mobilisés contre la réforme de la SNCF arrivent à l'université de Tolbiac en solidarité avec les étudiants grévistes, le 13 avril dernier.
Les cheminots grévistes mobilisés contre la réforme de la SNCF arrivent à l'université de Tolbiac en solidarité avec les étudiants grévistes, le 13 avril dernier.
©GERARD JULIEN / AFP

Inquiétant

L'actualité révèle une multiplication de mouvements violents en France, plus ou moins identifiés. De nouveaux blocages "reconductibles " ont lieu depuis hier à Sciences Po Paris et Rennes... Comment expliquer que les autorités semblent aussi débordées ?

Eddy  Fougier

Eddy Fougier

Eddy Fougier est politologue, consultant et conférencier. Il est le fondateur de L'Observatoire du Positif.  Il est chargé d’enseignement à Sciences Po Aix-en-Provence, à Audencia Business School (Nantes) et à l’Institut supérieur de formation au journalisme (ISFJ, Paris).

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Radicaux, ultras, zadistes, gauches extrêmes…ces mouvances occupent l’actualité mais de quoi parle-t-on?
Eddy Fougier : C'est un sujet qui n'est pas vraiment répertorié, parce que l'Etat est entièrement focalisé sur les risques de terrorisme. Donc la seule définition est celle "d'organisation terroriste" qui ne correspond pas à cette mouvance. Tant que ces groupes ne commettent pas d’attentats ou d'actes très graves, ils n’intéressent pas la police ni la justice. C'est un problème  car on ne mesure pas vraiment les dangers qu'ils représentent,  alors que nous sommes en haut d'un cycle contestataire  qui a commencé en 2016 avec les manifestations contre la loi Travail et qui se poursuit comme on le voit un peu partout en France. Il ne faudrait pas sous-estimer leur détermination  ni leurs moyens…
Comment expliquer la multiplication actuelle des blocages d'université, des occupations illégales, des actions de type Black Bloc, etc ?
Dans la mesure où leur mode d'action est celui de l'infiltration, la période actuelle leur donne beaucoup d'occasions de se déployer. Ces groupes exploitent le moindre interstice, la moindre faille, et sont systématiquement présents dans les moments de désordre. A Bure, tous ne sont pas de vrais opposants au projet d'enfouissement de déchets nucléaires, mais ils ont profité de la contestation locale pour en faire une ZAD, avec une efficacité  qui sidère les vieux militants des années 70. Tout comme à Notre-Dame-des-Landes, leur expulsion sera difficile car ils ont installé des cabanes, des barricades, avec des points d’entrées contrôlées. L'efficacité de ces groupes est due aussi à leur méthodes  parfois  radicales, inspirées des activistes anglo-saxons . Notamment les Animalistes, qui sont à la limite du terrorisme et menacent directement les acteurs de ces filières. Le recours au cocktail molotov contre la police s'est banalisé. A Notre-Dame-des-Landes, des gendarmes :ont reçu des éclats de bombe artisanale, deux ont été brûlés par des cocktails Molotov et deux par de l'acide. A Grenoble et à Limoges, plusieurs gendarmeries ont été incendiées en 2017, actuellement ce sont les installateurs de compteurs Linky qui font l'objet de vandalismes.
Quels sont les points communs de ces organisations? 
Il existe une grande diversité de mouvements, depuis la Fédération anarchiste, déclarée officiellement comme parti, jusqu'aux groupuscules les plus reculés. On peut toutefois dégager trois points communs: l'âge, le niveau d'éducation (des jeunes diplômés ou étudiants dits "intellos précaires"), et les modes d'action, dont celui "d'action directe non violente ". Avec une notion de la non-violence qui pose question car leur rapport à l’illégalité et à la violence est marqué par  la désinhibition. Tous ont en commun de privilégier l'efficacité sur toute autre forme de considération, et sans justification. Souvent, ce ne sont plus leurs idées qui les définissent mais leurs actions, qui sont devenues l'élément structurant.
Pensez-vous que ces mouvements bénéficient d'une forme de complaisance?
Je pense très clairement qu'ils bénéficient de la bienveillance de certains universitaires et de leurs professeurs s'agissant des mouvements lycéens et étudiants,  d’intellectuels de gauche et de certains médias pris au piège de la séduction et du storytelling. Ces groupes s'inventent une légitimité en prétendant défendre des causes nobles (le "laboratoire d'idées " et la "culture bio" de NDDL) et justifient leurs méthodes radicales par la violence du monde actuel. Le discours de victimisation est récurrent dans ces organisations  et génère une forme de complaisance, voire de complicité dans certains cas. Par ailleurs, si le cliché du jeune rebelle idéaliste séduit toujours, les jeunes de 20 ans ne sont plus attirés par la politique, l'action humanitaire ni même les ONG, devenues trop institutionnelles pour eux. L'activisme est beaucoup plus attractif, y compris dans la catégorie des classes moyennes et aisées.

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