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Réforme des institutions : le gouvernement se dit soudain qu'il est urgent d'attendre
©AFP

Adagio

Edouard Philippe a présenté mercredi 4 avril, devant les médias, les grandes lignes de la prochaine réforme des institutions.

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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A quoi ressembleront les institutions du "Nouveau Monde" ? Le moins que l'on puisse dire est que la réforme des Institutions promise par Emmanuel Macron laisse perplexe tant le schéma présenté par Edouard Philippe (et non par le Chef de l'Etat dont c'est pourtant la prérogative), questionne en dépit d'un discours carré et d' intentions affichées...En écoutant le premier Ministre annoncer le contenu du projet de réforme (en trois volets puisqu'il comporte une Réforme Constitutionnelle, une loi organique et une loi simple), impossible de ne pas constater qu'il y a un monde entre les envolées des discours de campagne électorale et une annonce faite de manière presque fortuite. Le "timing" de cette annonce semble avoir été bricolé à la hâte, calé entre une série de rendez-vous à Matignon. S'agissait-il pour l'exécutif de tenter de faire diversion à la grève de la SNCF et au mouvement naissant dans les facs? Ou plutôt de montrer à l'opinion que les mouvements sociaux n'entament pas la volonté réformatrice du gouvernement ? Ou encore de rendre moins audibles les protestations contre ce qui apparait comme le fruit d'un compromis voire un moindre mal, à savoir la "dose" de proportionnelle de 15 % pour l'élection des députés.

Or, l'élection d'une partie des députés à la proportionnelle, c'était l'un des grands points de l'accord entre Emmanuel Macron et François Bayrou pour la présidentielle. Le Président du Modem a plaidé jusqu'au dernier moment en faveur d'une dose plus large, comme cela avait été envisagé. En vain. Car les adversaires de la proportionnelle se sont fait entendre et ils pèsent lourd .Même si le mode de scrutin n'est pas gravé dans la constitution et relève d'une simple loi, les gaullistes considèrent que le scrutin majoritaire est le fondement de la Ve République et avancent l' argument selon lequel la fin de la bipolarisation, c'est la fin de la stabilité.

Alors, une dose , une dosette, comme dit Marine Le Pen, est-elle acceptable malgré tout ? Même si le président du groupe LR , Christian Jacob, affirme que la réforme est "un package", ce sera un point de négociation en coulisses pour d'autres sujets car ses collègues du Sénat se montrent moins déterminés en la matière. La pilule sera difficile à avaler pour tous ceux qui rêvaient d'une "véritable" dose de proportionnelle, François Bayrou bien sûr, mais aussi l'UDI et le président de l'Assemblée, François de Rugy, et au Sénat, toute la mouvance centriste. Mais les experts ont pris leur calculettes, ont fait tourner les ordinateurs ; et ils sont arrivés au constat que 20 à 25% de députés élus à la proportionnelle risquaient de déstabiliser la majorité issue du scrutin majoritaire à deux tours... La querelle fera les délices des constitutionalistes et enflammera les réunions politiques, elle risque de faire passer au deuxième plan la véritable question : quel sera le visage d'un Parlement ,surtout d'une Assemblée Nationale qui comptera un tiers de membres de moins, passant de 577 à 400 députés? Ceux-ci, une fois élus , ne pourront plus faire carrière à vie puisque le nombre de mandats consécutifs sera réduit à trois.

Comment travailleront-ils? Disposeront-ils de moyens accrus pour contrôler l'action du gouvernement ? Quelles seront leurs relations avec leurs électeurs dans des circonscriptions dont la taille aura pratiquement doublé? Et surtout le Parlement pourra-t-il peser face à un exécutif qui concentre de plus en plus le pouvoir, voire les pouvoirs ? Quand il est question de moyens, il ne s'agit pas seulement de réformes internes à l'Assemblée... En période électorale tout le monde réclame un Parlement fort, avec une Assemblée qui ne soit pas une simple chambre d'enregistrement. Mais lorsqu'il s'agit de passer aux actes, c'est une autre affaire... En attendant le projet ne comporte plus ce chiffon rouge qu'était la limitation du nombre d'amendements au prorata de la taille des groupes politiques. Hier le Premier Ministre a "fait le job". La réforme est comme on dit, dans les tuyaux et va suivre le cheminement institutionnel avec un premier filtrage au Conseil d'Etat. Le calendrier est fixé, il est souple: l'ensemble de la réforme devrait être adopté l'année prochaine. Si tout va bien. Autrement dit, il est urgent sinon d'attendre, de patienter .

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