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Le Medef se cherche un nouveau patron : l’occasion, enfin, d’un débat de fond ?
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Succession en cours

La succession de Pierre Gattaz est ouverte. Le nom du nouveau président du Medef sera connu le 3 juillet prochain, au terme d'un processus électoral complexe.

Jeff  Dentreprise

Jeff Dentreprise

Jeff Dentreprise est un fin connaisseur des arcanes du Medef souhaitant garder son anonymat sous peine de ne plus l’être

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La succession de Pierre Gattaz est ouverte. Le nom du nouveau président du Medef sera connu le 3 juillet prochain, au terme d'un processus électoral complexe. Plusieurs candidats ont déjà annoncé leur intention de se présenter, sans qu'aucun ne fasse encore figure de grand favori. Au-delà de leurs personnalités, ce sont leurs propositions et programmes respectifs que les 560 « grands électeurs » patronaux vont devoir trancher. Il était temps : cela fait treize ans que le mouvement des patrons n'a pas connu de débat sur son avenir. Une éternité.
Atmosphère délétère
En 2013, la dernière campagne pour la présidence du Medef s'est cristallisée autour de la possibilité pour Laurence Parisot de briguer un troisième mandat successif. Faisant fi des statuts de l'organisation patronale, l'ancienne directrice de l'IFOP lance sa candidature en janvier. Pour être certaine de conserver son fauteuil, Laurence Parisot demande la saisine du comité statutaire du syndicat patronal, afin d'étudier une réforme de ses statuts. A défaut de pouvoir concourir à sa propre succession, elle souhaite que son second mandat, de trois ans au lieu de cinq comme le premier, soit prolongé de deux années supplémentaires. En vain.
Le 28 mars 2013, dans une atmosphère délétère, le Medef rejette sa proposition de changement des statuts. A une voix près. Pour Pierre Gattaz, la voie est désormais libre. Ses deux principaux adversaires, Geoffroy Roux de Bézieux et Patrick Bernasconi, le rallient en juin – en échange de leur retrait, ils obtiendront un poste de vice-président. Seul Hervé Lambel s'oppose encore au patron de Radiall. Il sera battu à plate couture, à 476 voix contre 8.
Si la victoire de Pierre Gattaz s'apparente à un triomphe, elle laisse un goût amer à ceux qui espéraient que la campagne soit l'occasion d'une remise à plat de l'organisation du Medef. De fait, la polémique sur la possible reconduction de Laurence Parisot a confisqué tout débat de fond. Arbitrée fin mars, la question de sa succession intervient alors que la campagne est déjà bien avancée. Impossible alors, pour Pierre Gattaz, de dérouler ses propositions.
Très offensif, le patron du Groupe des fédérations industrielles (GFI) se contente de lancer des punchlines donnant corps à son « Medef de combat ». Il multiplie les effets d’annonce : suppression des 35 heures, baisse de la fiscalité des entreprises et de la dépense publique, allongement de la durée des cotisations retraites, relèvement de l'âge légal de départ, etc. En somme, il n'y a pas eu de débat de fond au Medef depuis 2005, date de la première élection de Laurence Parisot. La campagne de 2018 n'en est que plus nécessaire.
Jean-Dominique Senard humilié ?
Elle a pourtant mal commencé. Comme en 2013, la campagne a été l'occasion d'un psychodrame sur les statuts du Medef. Ultra-favori, le patron de Michelin, Jean-Dominique Senard, s'est vu sèchement barrer la route. En cause, son âge : Jean-Dominique Senard fêtera son 65e anniversaire le 7 mars, mais les statuts du Medef interdisent que les candidats à la présidence soient âgés de plus de 65 ans le jour du vote.
Le conseil exécutif de l'organisation, réuni le 11 décembre 2017, a « décidé de ne procéder à aucune modification ou interprétation de ses statuts », mettant fin aux ambitions du patron du numéro 2 mondial des pneumatiques. Une décision prise à 30 voix contre 15, soit une « large majorité », selon une source patronale. Fairplay, Jean-Dominique Senard a déclaré être « opposé une modification (…) des statuts. (…) Ce serait inopportun et donnerait le sentiment d'une manipulation ».
Il n'empêche, l'humiliation est patente. Figure du CAC 40, grand patron industriel, apprécié de ses pairs pour sa droiture et ses valeurs, Jean-Dominique Senard avait reçu une standing ovation lors de la dernière université d'été du Medef. Sans scrupule, les apparatchiks du mouvement ont écarté le candidat, si ce n'est le plus légitime, du moins qui avait le plus d'envergure.  
Parmi eux, trois candidats à la succession de Pierre Gattaz et donc adversaires potentiels : Alexandre Saubot, Frédéric Motte et Geoffroy Roux de Bézieux, tous trois vice-présidents du Medef. Ce dernier a voté contre Jean-Dominique Senard. Il se murmure même qu'il aurait passé commande, auprès d'avocats, d'analyses juridiques destinées à démontrer que le patron de Michelin ne pouvait en appeler à une lecture « souple » des statuts afin de contourner la limite d'âge. Un savonnage de planche en règle : le fair play n'est, semble-t-il, pas la qualité la mieux partagée au Medef...
Alternance ? 
Qui remportera la présidence ? Il est encore trop tôt pour le dire. Mais une chose est sûre : l'élection de Laurence Parisot en 2005 a sonné comme la fin de la toute-puissance de l'UIMM sur le patronat français. Avec Pierre Gattaz, les rôles se sont à nouveau inversés ; l'UIMM a repris le pouvoir. Ils sont cependant très nombreux au sein du Medef à penser qu'une alternance des secteurs à la tête du Medef est nécessaire. De quoi fragiliser la candidature d'Alexandre Saubot, candidat de la fédération de la métallurgie ?
Le directeur général de l’ETI Haulotte traine un autre boulet. Sous le précédent quinquennat, Alexandre Saubot a incarné l'aile modérée de l'opposition à François Hollande, quand celui-ci a amorcé une politique défavorable aux entreprises. Tenant d’une ligne soft vis-à-vis de l’ancien Chef de l’Etat, Alexandre Saubot a notamment porté le compromis sur l’assurance-chômage et son volet sur la taxation des contrats courts. Un « deal » qu’il aurait accepté sans en parler au préalable aux instances patronales…Saubot va devoir convaincre des patrons à la mémoire longue qu'il peut monter au créneau.

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