Opacité, surcoûts, complaisance… la gestion opaque de l'eau en France<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Société
Opacité, surcoûts, complaisance… la gestion opaque de l'eau en France
©Pixabay

Bonnes feuilles

Le marché de l'eau en France demeure opaque. Pour la plupart des habitants des plus grandes villes, la facture est souvent invisible, car noyée dans les charges collectives. Sait-on pourtant que le véritable prix du mètre cube d'eau en France est de 1,50 euro, quand le prix moyen payé par les abonnés en France est de 3,98 euro par m3 ? Une enquête édifiante sur une situation intolérable à l'heure où, avec le changement climatique et l'apparition de nouvelles pollutions chimiques, la gestion de l'eau devient cruciale. Extrait de "Plongée en eau trouble" de Thierry Gadault, publié aux Editions Michalon (1/2)

Thierry Gadault

Thierry Gadault


Thierry Gadault, journaliste économique indépendant, a travaillé pour La Tribune, l'Expansion et le Nouvel Économiste. Il est co auteur d’"Henri Proglio, une réussite bien française. Enquête sur le président d'EDF et ses réseaux, les plus puissants de la République" aux Editions du moment, (2013), et publie fin octobre une enquête sur EDF chez First édition, "La bombe à retardement". Il est également rédacteur en chef du site Hexagones.fr

Voir la bio »

Pour faire simple, la gestion de l’eau est scindée en deux parties. D’un côté, ce que l’on appelle le petit cycle, qui concerne les activités de production, de distribution d’eau potable et d’assainissement des eaux usées, dont la responsabilité demeure entre les mains des 36 000 communes; de l’autre, le grand cycle qui porte sur la gestion des eaux de surface et souterraines, dont la responsabilité est confiée à des agences de l’eau: il en existe six en métropole (Adour-Garonne, Artois-Picardie, Rhin-Meuse, Loire-Bretagne, Rhône-Méditerranée-Corse, et Seine-Normandie) et une pour chaque territoire ultramarin. Le financement des agences est assuré par une taxe prélevée sur la facture des abonnés à l’eau et à l’assainissement collectif.

La loi de 1964 va aussi instituer un semblant de démocratie et de transparence dans la gestion de l’eau. En parallèle aux grandes administrations qui se partagent cette question (Environnement, Industrie, Agriculture), la loi crée en effet un Comité national de l’eau, instance consultative sur tous les projets concernant l’eau, et censé être un lieu de débats démocratiques prenant en compte les intérêts de toutes les parties prenantes: élus, industriels, agriculteurs, et citoyens représentées par des associations environnementales. De même, les agences de l’eau sont, elles aussi, supposées tenir compte de tous les intérêts.

Dans la réalité, le pouvoir a été confisqué, trop souvent, par des élus, agissant en parfaite symbiose avec les géants privés de l’eau et plus généralement avec les lobbys de l’agriculture ou de l’industrie. La situation la plus caricaturale est certainement celle d’André Santini, le maire d’Issy-les-Moulineaux depuis 1980. Depuis 1983, il est aussi président du Sedif, qui gère l’eau dans 150 municipalités de l’Ilede-France. Créé en 1923, ce syndicat intercommunal est le meilleur client de Veolia (ex-Générale des eaux), qui détient le contrat de délégation de service public depuis… 1923! André Santini fut également, pendant deux bonnes décennies, membre du conseil d’administration et président de l’agence de l’eau Seine-Normandie. À noter qu’il fut, entre 2007 et 2009, secrétaire d’État à la fonction publique, au moment même où le gouvernement Sarkozy-Fillon démantelait le conseil public aux collectivités locales au grand bénéfice du privé… Malgré les scandales qui ont éclaboussé la gestion du Sedif dans les années 2000, André Santini, toujours bon pied bon œil à 77 ans, continue d’œuvrer en bonne intelligence avec Veolia.

Résultat de cet empilement de strates politico-administratives faussement transparentes, le citoyen est le dindon de la farce. Pour s’en convaincre, il suffit de lire le dernier dossier réalisé par UFC Que Choisir sur « la préservation de la ressource aquatique », rendu public en octobre 2017. Selon l’association de défense des consommateurs, l’agriculture intensive est responsable de 70 % des pollutions en pesticides et à 75 % de celles en nitrates. Le surcoût lié à ces pollutions est estimé, toujours pas l’association, entre 640 millions et 1,140 milliard d’euros par an. Qui paie la facture? Le citoyen!

Extrait de "Plongée en eau trouble" de Thierry Gadault, publié aux Editions Michalon

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !