Pourquoi la police de sécurité du quotidien ne pourra jamais suffire à gérer les problèmes des "quartiers de la reconquête républicaine"<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
Pourquoi la police de sécurité du quotidien ne pourra jamais suffire à gérer les problèmes des "quartiers de la reconquête républicaine"
©JACQUES DEMARTHON / AFP

Que du cosmétique ?

Gérard Collomb, le ministre de l'Intérieur, a présenté ce jeudi la "PSQ", la police de sécurité du quotidien, une promesse de campagne du candidat Macron. Mais des doutes subsistent quant à l'efficacité de cette mesure dans le contexte actuel.

Gérald Pandelon

Avocat à la Cour d'appel de Paris et à la Cour Pénale Internationale de la Haye, Gérald Pandelon est docteur en droit pénal et docteur en sciences politiques, discipline qu'il a enseignée pendant 15 ans. Gérald Pandelon est Président de l'Association française des professionnels de la justice et du droit (AJPD). Diplômé de Sciences-Po, il est également chargé d'enseignement. Il est l'auteur de L'aveu en matière pénale ; publié aux éditions Valensin (2015), La face cachée de la justice (Editions Valensin, 2016), Que sais-je sur le métier d'avocat en France (PUF, 2017) et La France des caïds (Max Milo, 2020). 

Voir la bio »
Guillaume Jeanson

Guillaume Jeanson

Maître Guillaume Jeanson est avocat au Barreau de Paris. 

Voir la bio »

Atlantico : Suite aux annonces faites par le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, concernant la Police de sécurité du quotidien, que peut-on attendre de l'efficacité d'une telle mesure ?

Gérald Pandelon : Aucune efficacité. En effet, c'est comme si vous souhaitiez soigner une personne atteinte d'un cancer quasi-généralisé avec du Doliprane. Comme souvent, l'idée est généreuse et les intentions louables, puisqu'il s'agit d'instaurer davantage de partenariat, y associer les maires, recruter 70000 membres supplémentaires des forces de l'ordre, etc. La difficulté essentielle c'est que malheureusement, car je ne doute pas un instant de la bonne volonté de notre ministre de l'intérieur, cela ne fonctionne pas. Car dans les zones dites sensibles, la prévention, c'est-à-dire, en définitive la discussion en lieu et place de la force, est perçu comme un signe de faiblesse. C'est cette dimension qu'aucun gouvernant ne comprendra jamais car, tout simplement, les acteurs politiques ne sont pas réellement sur le terrain, car ils sont, quoi qu'ils en disent, coupés des réalités. Et, me direz-vous, c'est quoi la réalité ? C'est tout simplement l'adéquation entre la pensée et les faits ; autrement dit, la vérité vécue, une vérité vue, observée depuis 30 ans, par les habitants, par les forces de l'ordre, par certains magistrats, par les maires - sincères - des grandes villes, ceux qui ne répètent pas, à l'instar d'actes de langage à destination de prétendus abrutis, que ce qui constitue une violence au quotidien ne serait qu'une simple "réaction au système", que le vandalisme serait, selon les hérauts de cette idéologie mortifère, une sorte de "manifestation sociologique", que le réel a tort, en définitive, lorsqu'il contredit l'idéologie. Je vois dans la proposition de notre ministre moins une avancée qu'une défaite, une défaite cuisante, celle de la vérité.

Et cette vérité quelle est-elle ? C'est que la délinquance a augmenté, ce qui explique d'ailleurs notre surpopulation carcérale car, à l'évidence, l'augmentation du nombre des détenus correspond tout simplement à une recrudescence des crimes et délits. Il n'aura d'ailleurs échappé à personne que cela signifie également qu'il existe de plus en plus de condamnations. Le "tout-carcéral" n'est pas, contrairement à ce qu'expliquent nos belles âmes écervelées, la preuve d'un retour du "tout-répressif", mais le constat d'une violence qui se déploie, de jour en jour, de façon de plus en plus forte. Curieuse société que la nôtre où désormais ce sont les voyous qui attaquent les commissariats et autres personnes dépositaires de l'autorité publique... Quelle crise de l'autorité... Le philosophe Nietzsche aurait sans doute évoqué, dans sa généalogie de la morale, une inversion des valeurs...  Car, sans une forte prise de conscience que, malheureusement, et qu'on l'accepte ou le déplore, la nouvelle délinquance ne connaît et ne comprend que la force, qu'il n'est donc plus possible d'opposer de la prévention et de la discussion à ceux qui, à partir de l'âge de 14 ans, sont déjà armés de pistolets 9 mm lorsque ce ne sont pas des Kalachnikovs, nous nous condamnons définitivement à l'impuissance. Une impuissance qui, en définitive, n'est que la marque de la naïveté ou du refus, conscient, de regarder la vérité en face...    

Guillaume Jeanson : Ces mesures semblent aller dans un sens conforme aux enseignements de la criminologie, notamment des expériences dites de « quality of life policing » aux USA, mais leur efficacité dépendra évidemment du contexte général dans lequel elles s’inscriront concrètement.

Le syndicat de police Synergie faisait déjà entendre, il y a 17 ans de cela, par la voix de son secrétaire général, dans le Figaro du 13 avril 2001 qu’« on peut mettre tous les policiers qu’on veut sur le terrain, aussi longtemps que les outils juridiques mis à leur disposition feront le jeu des voyous, leur action sera entravée ».

Cette police de sécurité du quotidien ne pourra elle aussi être efficace qu’à condition de bénéficier pleinement de cette réforme annoncée de la procédure pénale qui devrait tendre vers davantage de simplification. Cette police doit en effet être dotée de réels moyens de rétablir l’ordre. Les pistes de généralisation d’un possible recours à des amendes forfaitaires délictuelles sont autant d’éléments intéressants à cet égard, en ce qu’ils favorisent une possibilité de réponses rapides et concrètes face à la commission d’infractions de faible gravité.

Un autre point important est celui de la formation. Il faudra absolument veiller à garantir une formation de qualité pour les personnels de police dédiés à ces missions. En effet, parmi les causes de l’échec de la police de proximité de la fin des années 90, Georges Fenech, dans un livre intitulé « l’insécurité » et publié en 2002, a pu notamment pointer le fiasco du recrutement précipité des 15.195 adjoints de sécurité (sur les 20.000 prévus), issus des emplois-jeunes, qui avaient été insuffisamment formés et préparés à se trouver confrontés aux jeunes des quartiers sensibles et qui avaient de ce fait renvoyé l’image d’« une police au rabais » incapable de mener à bien sa mission.

Un rapport d’évaluation de la police de proximité adressé le 20 avril 2001 au ministère de l’intérieur a pu, lui aussi, mettre en évidence la difficulté de la sous-qualification des policiers chargés de ces missions : « la présence de fonctionnaires peu expérimentés dans les quartiers difficiles et la sur-représentation des ADS entraînent plus de difficultés tout en mettant en péril la sécurité de ces policiers vulnérables. »

Redéployer les policiers sur le terrain, les recentrer sur leur mission première, abandonner les excès d’une politique du chiffre délétère et moderniser les outils, c’est donc certainement louable, mais une adaptation aux spécificités de chacune des zones d’intervention sera également indispensable pour être efficace. Bien sûr la police doit retisser des liens avec la population. Pour autant, et comme a pu l’exprimer récemment Patrice Ribeiro, « Tant que les fonctionnaires ne peuvent pas patrouiller à pied sans se faire insulter, la police ne pourra pas faire de contact et c’est la loi du 'caïdat' qui s’imposera ». Or, comme ce dernier a eu le loisir de nous l’indiquer récemment dans le cadre d’un entretien réalisé avec lui, « Comment des policiers peuvent-ils être crédible et incarner l’autorité quand, à leur simple vue, les caïds du quartier, forts de leur sentiment d’impunité, les insultent et les agressent physiquement tout en revenant pérorer et bomber le torse le lendemain. Ce sont eux l’incarnation de l’autorité dans les cités ? »

Il est donc à craindre que La PSQ ne puisse vraisemblablement fonctionner que dans les quartiers déjà à peu près pacifiés. En effet, comme le précise encore Patrice Ribeiro, « Impossible d’engager le dialogue sous les insultes, les menaces et les coups et l’irrépressible peur des représailles pour celles et ceux qui parleraient avec la Police. » Les stratégies d’intervention ne devront donc pas être appréhendées de manière uniforme mais au contraire certainement varier suivant le degré de pacification réel ou supposé des zones d’intervention.

En déclarant "A terme, tous les territoires verront les choses changer. Dans un premier temps, dès septembre 2018 et d’ici à janvier 2019, 30 quartiers de reconquête républicaine bénéficieront, en zone police, de moyens supplémentaires." le ministre de l'intérieur n'admet-il pas dès aujourd’hui que la police de sécurité du quotidien ne s'étendra pas au-delà de ces 30 quartiers ? Les mots "Voir les choses changer" sont-ils révélateurs d'une simple volonté cosmétique, ou est-il imaginable de voir s'étendre cette pratique à une plus grande part du territoire après janvier 2019 ?​

Guillaume Jeanson : De nombreux quartiers extrêmement disparates ont été mentionnés hier par le ministre de l’Intérieur. Si les façons de relever le défi de la sécurité ne manqueront pas d’être multiples, loin d’une simple volonté cosmétique, une logique doit être poursuivie, la recherche d’un cercle vertueux : celui de la doctrine de « la vitre brisée ».

La théorie dite de « la Vitre Brisée » a été élaborée par deux chercheurs américains, James Q. Wilson et George L. Kelling, et exposée notamment dans un article intitulé « Vitres brisées : la police et la sécurité de proximité », paru en mars 1982 dans la revue The Atlantic. Cette théorie décrit le lien qui existe entre le désordre dans les espaces publics, les « incivilités », et la criminalité. Elle a été mise en application notamment par la police new-yorkaise, d’abord dans le métro puis dans l’ensemble de la ville, à partir du début des années 1990, et a puissamment contribué à la baisse spectaculaire de la criminalité qu’a connue la ville depuis 20 ans (moins 80%).

Cette théorie peut être résumée en quelques mots : les petits désordres dans les lieux publics engendrent de plus grands désordres, désordres qui eux-mêmes finissent généralement par engendrer de la vraie criminalité.

Commencer par cibler des zones précises où développer des stratégies de reconquêtes n’a rien d’invraisemblable si l’on s’en réfère aux préceptes de cette doctrine qui a fait ses preuves.

Mais il est très important d’ajouter que pour que la police puisse jouer pleinement son rôle, elle doit être soutenue très fermement par les pouvoirs publics. Y compris lorsqu’elle fait l’objet de violentes campagnes de dénigrement.

Heather Mc Dolnald a pu en effet démontrer dans un article intitulé « The critics of proactive policing are wrong » publié l’année dernière dans le City Journal qu’en discréditant la police et en amenant les policiers à s’abstenir de certaines actions de maintien de l’ordre pour ne pas être taxés de racisme, ces attaques ont pour conséquence à la fois une augmentation des violences envers les forces de l’ordre et une augmentation de la criminalité dont les premières victimes se révèlent en outre être les même minorités ethniques que celles pour la défense desquelles les campagnes de dénigrement étaient montées.

En France, on a pu assister à une logique comparable après l’affaire Théo. Interrogé le mois dernier par le CRSI sur les raisons pour lesquelles il portait sa ville volontaire pour l’expérimentation de la PSQ, Bruno Beschizza, le maire d’Aulnay-sous-Bois, a en effet indiqué qu’après cette affaire « la perte de confiance d'une partie des habitants a compliqué et réduit la présence des forces de l'ordre dans ces quartiers. C'était malheureusement le signal qu'attendaient les voyous pour amplifier leurs trafics car dorénavant, tout est prétexte à affrontement avec la police. »

Gérald Pandelon : Je crois sincèrement que nos gouvernants successifs ne parviennent pas, malgré encore une fois leur bonne volonté affichée, à mesurer la gravité de la situation. Je propose donc à ceux qui considèrent que je pourrais exagérer qu'ils m’accompagnent dans une de ces zones dites "sensibles". Ils comprendraient ce que signifient réellement, au-delà des discours germanopratins, des "zones de non-droit", ces quartiers où, en définitive, personne n'a intérêt, contrairement à ce que nous indique notre ministre, à ce que les "choses bougent"... D'ailleurs, dans quel sens devraient-elles "bouger" exactement ? Regardons les choses froidement. Posons une simple question à titre d'hypothèse : nos politiques ont-ils véritablement et réellement  intérêt, au-delà des mots, à ce que les "choses" changent vraiment ? La question soulevée est légitime. Elle est peut-être fictive.

Mais imaginons un seul instant que le maire d'une grande ville du sud-est de la France, atteint d'une soudaine prise de conscience de l'importance du trafic de stupéfiants dans sa cité, prenne la décision, en partenariat ("mot leitmotiv" des actes de langage mais dénué de sens), avec les forces de l'ordre, d'évacuer quelques quartiers réputés difficiles de sa ville, situés principalement dans le Nord, afin d'en juguler le développement ; puis, qu'à la suite de cette évacuation, la ville dont il a la charge connaisse une brusque recrudescence des vols avec armes et des atteintes aux personnes. Mais surtout, que ces infractions se produisent désormais au centre-ville de ladite ville et non plus dans les quartiers, puisqu'ils auraient été démantelés (la nature ayant horreur du vide), et bien, à votre sens, que se produirait-il ? Et bien tout simplement ce maire perdrait définitivement et à coup sûr les prochaines élections municipales ! Par conséquent, et même si cet exemple cynique est probablement fictif et par conséquent n'engage que l’auteur de ces quelques lignes, le "tout-préventif" n'est que la réponse adaptée de ceux qui, dans l'oubli de la vérité, recherche essentiellement une pacification de l'ordre social et politique au détriment de mesures qu'il faudrait nécessairement prendre mais qui seraient, à l'évidence, stratégiquement inutiles et néfastes dans le cadre de la préservation de leurs intérêts. Pour nos acteurs politiques, en définitive, la pire des situations, c'est au fond lorsque cette violence se déploie à l'état brut, lorsque la République brûle, lorsque le sang coule trop, de Charlie Hebdo au Bataclan, qu'elle témoigne ainsi par son obscénité et sa transparence absolue de la fragilité du politique, de son impuissance, sinon de son incompétence et de son aveuglement.     

Après le précédent connu lors de la période 1997-2002 avec Lionel Jospin, en quoi les deux approches peuvent-elles converger ou diverger ? Les résultats "nuancés" de cette période ont-ils permis au ministre de l'Intérieur de faire évoluer son approche de la question ?

Gérald Pandelon : Je ne perçois pas de différences notables avec ce concept forgé par M.M. Daniel Vaillant et Patrice Bergougnoux, selon lesquels les rapports entre les policiers et les jeunes étaient surtout distendus lors de l'intervention des CRS ou de la BAC ; c'est ainsi que dans le sillage du colloque socialiste de Villepinte du mois d'octobre 1997, quatre orientations avaient été définies : une polyvalence des policiers de sécurité publique désormais affectés à la police de proximité, une prévention d'abord, une répression ensuite, si nécessaire ; une police partenariale (tiens donc, déjà en 1997...), à travers des contrats locaux de sécurité ; enfin, la proximité, qui seule serait à même de resituer le citoyen au centre des préoccupations de sécurité publique. D'ailleurs, la loi du 21 janvier 1995, dite d'orientation et de programmation relative à la sécurité (LOPSI), instaurait déjà l'idée d'une "coproduction de la sécurité", selon le mot de Yannick Blanc (IHESI). Au fond, la « police de sécurité du quotidien » (PSQ) n'est aujourd'hui que la reprise de cette (désormais) vieille idée, celle d'une police de proximité qu'avait souhaitée supprimer M. Nicolas Sarkozy dès 2003, afin que les policiers privilégient plutôt leurs missions spécifiques de renforcement de la sécurité des citoyens à celles, plus valorisantes peut-être, de simples organisateurs de tournois sportifs. Autrement dit, il s'agirait donc, si j'ai bien compris, de « réinventer » le concept pour prendre en compte les évolutions intervenues au cours des dernières années, dans le but de, encore une fois, « retisser le lien police-population ». Pourtant, sauf à admettre l'hypothèse que nos édiles ne parviennent pas, en dépit de leurs efforts louables, à admettre que cette philosophie politique, malgré sa dimension humaine et son intention bienveillante, se heurte au mur des réalités, qu'elle est "hors-sujet", il est légitime de se poser la question de savoir pourquoi, en dépit de son échec cuisant, elle demeure persistante. En effet, non seulement cette orientation risque de voir la population délinquante non seulement à continuer à prospérer mais également à railler le manque de réalisme de nos autorités, mais aussi de voir le politique définitivement se décrédibiliser. Car, loin de souhaiter que s'instaurât une politique "tout-répressive", il conviendrait de réfléchir, en lieu et place d'une politique "tout-préventive", l'idée, jamais expérimentée, d'une autre politique, fondée à la fois sur l'action et sur l'éthique, qui se définirait enfin par un "tout-réaliste"...     

Guillaume Jeanson : Il est vrai que la police de proximité de Lionel Jospin a fait figure d’épouvantail politique car elle a été très largement instrumentalisée par l’opposition qui en a fait le symbole de l’angélisme de la politique menée par la gauche en matière de sécurité. Interrogé par nos soins il y a quelques semaines, Patrice Ribeiro ne mâchait pas, lui non plus, ses mots sur cette police qui selon lui portait les germes de son échec « par une approche naïve de la délinquance dont les sources se trouveraient dans l’exclusion sociale et la stigmatisation des populations par la police qui devait entamer un travail de séduction au détriment de l’Autorité qu’elle incarne ».

Ce biais qui peut être rapproché de celui prêtant des rapports par trop directs de causalité entre pauvreté et délinquance avait pourtant conduit, tout le monde s’en souvient, Lionel Jospin à reconnaître, en mars 2002, qu’il avait un peu péché par « naïveté » en pensant qu’« en faisant reculer le chômage on ferait reculer l’insécurité ». Pour mémoire, rappelons qu’entre 1998 et 2000 la France avait connu trois années de croissance économique forte, par rapport aux années précédentes et aux années suivantes, entre 3 et 4% par an. Le chômage était passé de 11,8% en 1997 à 8,9% en 2001. Dans le même temps, le taux de criminalité étant quant à lui repassé d’environ 60 pour mille à 70 pour mille. C’est cette évolution inverse de la criminalité et de la situation économique du pays qui avait placé l’ancien premier ministre dans une situation délicate pour apprécier publiquement son bilan.

La police de proximité reposait sur un travail de séduction. Une séduction des « jeunes » qui, toujours selon Patrice Ribeiro, se traduisait par « un renoncement à l’interpellation, aux investigations, au démantèlement de réseaux des cités pour ne pas les enflammer... » La conséquence était pour les policiers un écœurement d’autant plus grand « qu’ils avaient été arrachés arbitrairement à leur service d’origine (BAC, investigation…) pour être mutés de force dans cette police de proximité impotente car dépouillée de facto de ses capacités d’intervention et d’enquête.»

Au travers de ce constat sévère se dessinent, on le voit, les grandes lignes des écueils principaux que la police de sécurité du quotidien se devra d’éviter pour pouvoir fonctionner efficacement et pour ne pas, elle-aussi, constituer simplement « de la poudre aux yeux pour satisfaire une vision angélique et dogmatique de la délinquance et des « quartiers ». 

Si le ministre de l’intérieur n’hésite pas à affirmer qu’il faut des relations plus fréquentes entre la police et la population, il prend tout de même le soin de préciser que cette police devra être respectée et qu’elle le sera en étant dotée de moyens nouveaux. Le ministre semble donc parfaitement conscient du fait que la police ne devra pas, quant à elle, fermer les yeux afin d’acheter – à court terme et de façon factice - une pseudo « paix sociale », mais qu’elle devra au contraire agir, en gagnant la confiance des riverains et en s’appuyant sur leurs renseignements. N’en déplaise donc à ceux qui pouvaient être attachés à ce premier concept de police de proximité qui avait fait couler tant d’encre acide, la voie choisie semble aujourd’hui différente. Dans le cadre de l’interview du Monde que vous mentionnez, Gérard Collomb se montre d’ailleurs ferme et pragmatique, en déclarant que « la répression est indispensable. Les délinquants doivent savoir qu’avec la PSQ ils seront davantage arrêtés, poursuivis et sanctionnés. » L’intention est donc plutôt bonne. Espérons maintenant que l’action suivra réellement l’incantation.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !