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Retour de mon premier Davos : à quoi sert-il?
©MIGUEL MEDINA / AFP

Les entrepreneurs parlent aux Français

Revenir de Davos, c’est comme revenir d’un Disneyland pour adultes du monde des affaires et de la politique.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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On peut avoir serré la main du Grand Donald, rencontrer plein de Mickey fortunés, des Minnies en talons haut sur neige fraîche et boire gratuitement et à profusion des milk-shakes….sans lait ! Cet événement totalement surréaliste est organisé et millimétré avec une discipline et un brillot sans égal, surtout quand l’on considère qu’il se déroule dans une commune que même la Creuse considérerait comme petite. Mais au final, malgré les strass et le stress, les hauts et les couleurs, les têtes d’affiches et les têtes pensantes, que produit vraiment cet événement ? Du vent fait d’air pur ou du pur vent fait d’air ?

Le Docteur Schwab est un génie. En 45 ans, avec application, il a réussi à transformer un petit événement dédié au management des organisations, fréquenté par 3 skieurs et 2 SDF en ce le lieu incontournable et inaccessible pour celui qui ne sait pas compter au delà de 6 chiffres. Un endroit où seuls les puissants peuvent atterrir avec leurs jets privés, contribuant ainsi de façon évidente au bonheur climatique et au développement durable. Un endroit où le ticket d’entrée permet de faire office de filtre de sélection, ne laissant passer que le sable le plus fin et le mieux payant, afin que chacun puisse ne pas avoir à se poser la question embarrassante consistant à savoir si l’on peut adresser la parole à celui qui vous accoste.

Si il est là, c’est qu’il est de votre niveau, vous pouvez donc le regarder comme votre égal et daigner, sans effort, lui répondre. C’est réconfortant de ne pas parler à du plus petit que soi.

Dehors, quelques altermondialistes, alcoolisés, arpentent les trottoirs avec des drapeaux appelant à la révolution, face à de riches médusés qui pensent que, décidément, les organisateurs ont tout prévu. Pensez vous, ils ont même prévu des zadistes version Suisse, qui ressemblent à s’y méprendre à des vrais. Ils les prennent alors en photo ou vidéo, pour les ramener à la maison. Un souvenir amusé pour leurs enfants, qui dans 20 ans, ayant hérité du droit d’entrée de papa ou maman, pourront eux aussi retrouver les personnages aperçus en vidéo pendant leur enfance. Pas des Mickeys comme vous et moi, des révolutionnaires ! Tellement #ashtag « trop cool » !

Au delà de ce côté ghetto de luxe, on retiendra une forte présence féminine manifestement et majoritairement Ukrainienne, en tous cas plutôt blonde, les brunes semblent compter pour des prunes à Davos, dont, sans arrière pensée machiste, qui ferait de moi un paria de plus de la bande à #denoncetonporc, semblent être là pour des raisons qui ont peu à faire avec l’état de la planète ou le commerce mondial. C’est un commerce plus…local. Leur plus grande prouesse reste, pour moi, de pouvoir marcher sur la neige en talons aiguille, quand j’avais déjà tant de mal à rester fier et debout, sur mes semelles en caoutchouc.

On retiendra aussi la masse d’argent dépensé par toutes les marques de la terre, des sociétés d’expertise comptable, qui pour une fois, dépensent sans compter, les fournisseurs de logiciels, les pays, les banques russes ou non, de type « paradise » ou pas, et une partie des journalistes qui dénoncent la mauvaise gestion de l’argent mondial, et les écarts de richesse, dans leurs colonnes, le reste de l’année. Le monde restera toujours un paradoxe !

Côté plus prosaïque et pour faire vite. Est ce que Davos est utile au monde. La réponse oscille entre « non » et « je ne sais pas ». La promesse de Davos est de se pencher sur « l’état de la planète », et je pense, que passé 19H, après avoir arpenté les bars gratuits que les marques mettent à disposition de clients qui ont pourtant les moyens de les payer, l’état d’alcoolémie des participants me paraît assez peu propice à refaire dignement cette planète. Mais je suis peut être trop français, et donc mauvaise langue. Le fait que les grands se rencontrent et parlent de sujets néanmoins importants, a certainement des effets. Non mesurables directement, néanmoins. Qui se souvient d’une décision prise à Davos, qui ferait la fierté de la planète ?

Côté business, c’est fantastique. Et en fait, la véritable utilité de Davos est là. Et elle n’est pas discutable. Faire des affaires, vite, efficacement et à haut niveau, entre les privés ou le public et le privé, on a rien fait de mieux je pense. C’est même fou. La puissance et la fortune cumulée présentes à Davos, défient l’entendement. J’en suis encore retourné et pourtant je ne suis pas resté toute la semaine. Chaque année, progressivement, pour éviter une ivresse trop brutale. L’organisation est remarquable, précise, ciselée. Suisse.. L’air est pur la station est belle et les nuits sont courtes.

En clair, la présence des politiques et des plus grands entrepreneurs, crée l’attraction pour les hommes d’affaires et leur permet de se voir, pour conclure des contacts utiles et pertinents, l’état du monde dépend de l’état de ces mondes, ces mondes qui sortent en meilleur état que lorsqu’ils y rentrent, riches de promesse de contrats qui alimentent le commerce mondial. La politique et l’état de la planète ne sont donc qu’un faire valoir, un prétexte, à une foire commerciale géante. Où est le mal ? Il suffit d’avoir le cynisme de ne pas se plaindre de la fausse promesse, pour s’en tenir à la juteuse réalité.

Paradoxalement, cette réalité me poussera à y retourner plus longtemps la prochaine fois. Car pour des « petits » comme nous, ce rassemblement que les Inconnus auraient à l’époque nommé comme « les gallinettes cendrées », permet d’accéder à un niveau de décideurs que même une armée de télémarketers de génie ne vous permettrait d’atteindre pendant l’année. Quand on a des idées, et du talent, mais que votre niveau d’accès au graal des décideurs n’est pas suffisant, aller à Davos, c’est franchir la frontière entre le rêve et la réalité. Donner la puissance des plus forts, à la richesse de ces idées. Donc pas d’état d’âme, l’année prochaine, j’y reste 5 jours !

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