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Sarkozy/Hollande : le poids des mots, le choc des programmes
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Duel

A un peu plus de deux semaines du premier tour de la présidentielle, les deux candidats ont dévoilé leurs programmes respectifs à grand renfort d'effets médiatiques. Un excès de communication destiné à masquer l'imprécision de leurs propositions ?

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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A près de deux semaines du premier tour, les deux candidats favoris des sondages auront enfin levé une partie du voile sur leurs intentions effectives en cas d’arrivée au pouvoir.

Ce délai en dit long sur la maladie dont souffre la démocratie française: l’émotion et les effets de manche ont remplacé le débat auquel nous avons droit sur le contenu réel des politiques à mettre en oeuvre. Alors que la France est cernée par une crise économique dont ces protagonistes font tout pour dissimuler la gravité, la campagne s’est essentiellement menée en ombres chinoises, en allusion constante à des problèmes qui n’en sont pas, et en mise sous silence des véritables sujets.

Bref, nous voyons maintenant à peu près comment Nicolas Sarkozy et François Hollande entendent gérer l’épaisseur du trait, c’est-à-dire le retour à l’équilibre budgétaire.

Dans le cas de François Hollande, il y aura globalement, pour compenser les créations d’emploi public annoncées, une augmentation de la fiscalité, dont on a du mal à cerner les contours exacts. Car, au-delà de la tranche à 75%, qui a une portée symbolique, on sent poindre au PS une inquiétude assez peu relevée par les analystes.

Par exemple, l’une des premières décisions de la feuille de route est le fameux «gel conservatoire d’une partie des dépenses» qui devrait durer au moins jusqu’au 24 juin, date de la publication d’un audit de la Cour des Comptes sur l’état des finances.

Autrement dit, au-delà des intentions affichées pour les trois premiers mois, destinées à préparer les législatives dans de bonnes conditions pour l’opinion publique: augmentation de l’allocation de rentrée scolaire, blocage des prix des carburants, mesures sur le livret A, retrait d’Afghanistan,... toutes annonces qui contribueront à favoriser l’arrivée d’une majorité PS à l’Assemblée (est-ce une façon de marginaliser au maximum le Front de Gauche?), tout semble porter à croire que François Hollande s’attend à un paquet de mer dont il anticipe la gestion par des tours de vis à tous les étages.

Dans le cas de Nicolas Sarkozy, la fiscalité n’est pas forcément en reste, même si sa hausse devrait se limiter à un point sur cinq ans. L’impôt sur les exilés fiscaux, ou l’impôt minimal sur les grands groupes qu’il annonce en sont de premiers indices. L’objectif de retour à l’équilibre dès 2016 (un an avant François Hollande), joint à l’allégement des charges salariales ou la hausse nette des bas salaires devront bien être financés.

Nicolas Sarkozy pêche lui aussi, sur tous ces points, par excès de flou, et l’on sent bien la prudence face aux risques de gros temps qui guettent la France pour 2012.

Hollande décalé

Les candidats s’affrontent plutôt par leurs différences de style et d’approche.

François Hollande a un côté - comment dire? Décalé. Il annonce, pour sa première année, toutes les règles et toutes les lois qu’il va voter, parfois sans s’attarder sur les objectifs: circulaire du Premier ministre sur les emplois de cabinet dès les premiers jours, circulaire sur la lutte contre les «délits de faciès», loi de finances rectificative, loi d’assainissement des activités bancaires, lois de programmation dans tous les sens.

C’est assez bizarre cette façon de mettre en avant les moyens qu’on utilisera sans s’engager sur les résultats. Gouverner, est-ce faire des lois et des circulaires? En comparaison, les propositions de Nicolas Sarkozy apparaissent étonnamment claires et concrètes.

Par exemple sa proposition n°17: savoir lire et écrire en entrant au collège, a le mérite de remplacer en quelques mots toutes les annonces alambiquées de François Hollande sur la loi d’orientation et de programmation pour l’éducation nationale, qui parle de recrutements, de formation des enseignants, mais ne s’engage sur aucun résultat concret pour les élèves.

 Et, d’une certaine façon, la grande différence entre les deux candidats tient tout entière dans cette opposition entre deux visions de l’homo politicus. François Hollande semble obsédé par l’idée de prouver sa bonne volonté. Nicolas Sarkozy semble obsédé par les résultats.

Maintenant, si nous n’étions pas aliénés par l’excès de communication qui nous aveugle, nous relèverions le vrai scandale: dans la France de 2012, l’illettrisme à l’école a tellement progressé qu’un candidat sortant en fait un point de son programme.

Et plus personne ne semble s’offusquer de cette décadence qui touche aux fondements mêmes de notre société. Il y a quelque chose de pourri dans notre république.

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