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Non, le décryptage de notre ADN ne permet pas de prédire toutes les maladies graves
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Quoi de neuf docteur ?

Contrairement à ce qu'espéraient de nombreux scientifiques, le séquençage du génome, une technique qui consiste à décortiquer notre ADN, ne permet pas de prédire le risque de nombreuses maladies, selon une étude américaine menée sur des jumeaux.

Si l'ADN se révèle très utile dans la compréhension des maladies et la mise au point de nouveaux médicaments, le séquençage du génome ne permet pas de prédire l'avenir médical d'un individu. C'est ce que révèle une récente étude américaine, relayée par le New York Times.

Les résultats de cette étude, présentée lors d'une conférence annuelle sur le cancer à Chicago, ont ainsi mis mis un terme à l'espoir d'anticiper les maladies graves, comme le cancer. « Nous ne pensons pas que les tests génomiques pourront remplacer les stratégies actuelles de prévention », a déclaré le Dr Bert Vogelstein, professeur de cancérologie à la faculté de médecine de l'Université Johns Hopkins à Baltimore (Maryland), un des principaux auteurs.

Conclusions de l'étude : « un bon dépistage, un diagnostic précoce, et des stratégies de prévention comme le fait de ne pas fumer et de retirer des tumeurs cancéreuses au début de leur développement sont les clés pour réduire la mortalité », résume le Dr Bert Vogelstein, avant d'ajouter : « Nous ne disons pas que le séquençage soit dénué d'intérêt, mais cette technique ne permettra pas de prédire les maladies qu'une personne développera ou dont elle mourra. »

L'inné face à l'acquis

Publiés dans l'édition en ligne de la revue médicale américaine Science Transnational Medicine, ces travaux ont porté sur l’étude des données provenant de plus de 53 600 jumeaux monozygotes (c'est à dire identiques) en Suède, en Finlande, au Danemark et en Norvège. Les chercheurs ont aussi utilisé le registre des jumeaux américains de la deuxième guerre mondiale de l'Académie des sciences. Les dossiers fournissent notamment des informations sur 24 maladies (cancers, maladies auto-immunes, cardiovasculaires et neurologiques) dont ont pu souffrir ces jumeaux, leur fréquence et si un, deux ou aucun de ces jumeaux en ont souffert.

Dans la mesure où des jumeaux identiques ont le même génome, les chercheurs ont pu déterminer jusqu'à quel point les gènes peuvent prédire un risque accru de souffrir d'une maladie particulière. Ils ont donc comparé les jumeaux en se posant la question suivante :  si le premier développe une maladie, est-ce que le second a le même risque de contracter cette maladie ?

Résultat : les jumeaux n'ont pas forcément été victimes des mêmes pathologies. Les chercheurs ont même conclu que la plupart de ces personnes avaient chacune le même risque génétique d'être affectées par ces 24 maladies que le reste de la population.

Si les vrais jumeaux ont le même ADN, ils ne sont pas toujours exposés aux mêmes facteurs environnementaux (vivre dans un endroit pollué) et sociaux (fumer, trop manger etc.). Autant d'éléments qui peuvent favoriser l'arrivée de nombreuses maladies, comme le cancer. Face à ces pathologies aux origines complexes, les médecins ont beaucoup de mal à distinguer la part de la génétique dans le développement de la maladie, rappelle Le Figaro.

Les chercheurs ont aussi étudié l'ADN de personnes en bonne santé, pour voir s'il était possible d'y "lire" leur risque de contracter une grave maladie. Une fois encore, les résultats sont plutôt décevants : plus de 93 % des femmes étudiées ont présenté un risque faible d'avoir un cancer du sein. Et plus de 97 % de personnes étudiées (hommes et femmes confondus) ont présenté un risque faible d'avoir un cancer du poumon. Or ces tests « ne veulent pas dire que ces personnes ne courent aucun risque de développer ces cancers », précise le Dr Bert Vogelstein. Pis : ils courent en réalité exactement le même risque d'avoir un cancer du poumon que Monsieur Tout-Le-Monde.

Autrement dit, «cela nous ramène au débat séculaire de l'inné face à l'acquis », résume sur son blog le Dr Arard de Hemricourt. «Nous coexistons dans un environnement toxiqueface auquel notre organisme a établi certaines lignes de défense. Si ces lignes de défense sont altérées, notre organisme commence à souffrir et les maladies viennent à apparaître.» L'étude qui vient d'être publiée ne permet donc pas de dire « si une personne ayant un poids normal développera au cours de sa vie un diabète de type II ou si un cancer du colon surviendra chez telle ou telle personne ».

Roulette russe

L'étude relève toutefois un point positif. Environ 90 % des gens dont l'ADN a été décortiqué apprendront qu'elles ont un risque élevé de contracter une grave maladie. Or, le séquençage des gènes permettrait, en théorie, pour 75 % d'entre eux d'identifier quels sont ceux qui vont développer la maladie d'Alzheimer, une affection thyroïdienne auto-immune, un diabète de type I, et pour les hommes les attaques cardiaques. Et donc de prévenir le plus en amont possible le développement de ces maladies.

Maigre consolation, puisqu'en dehors des attaques cardiaques, il n'existe pas aujourd'hui de moyen efficace pour prévenir ces maladies ou ralentir leur progression. Une volonté d'informer louable, certes, mais qui ne fera guère de différence au final...

Pour le Dr. David Altshuler, professeur de génétiqueà l'Université de médecine d'Harvard, (et qui n'a pas pris part à cette étude), « même si vous savez tout sur la génétique, prévoir la prévision [d'une maladie] restera de l'ordre de la probabilité et non du déterminisme ».Pour lui, avoir ou non un cancer relève de la roulette russe.

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