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Inflation cachée : comment le panier 
de la ménagère explose à coup 
de hausses des prix masquées
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Payer plus pour manger autant

20% d'augmentation sur le café, 10% sur les céréales du petit déjeuner, 8% sur le chocolat... L'association de consommateurs CLCV a calculé que l'inflation dans l'alimentation a dépassé 5% en 2011. Un chiffre bien loin des estimations de l'Insee.

Charles Pernin

Charles Pernin

Charles Pernin est chargé de mission alimentation et santé pour l'association Consommation logement cadre de vie (CLCV).

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Atlantico : L’enquête de l’association Consommation, logement et cadre de vie (CLCV) montre une augmentation des prix de de l’alimentation 5,1 % entre janvier 2011 et janvier 2012. Le « panier de la ménagère » de l’association Familles rurales a lui augmenté de 4,4% sur la même période. Pourtant, l’inflation a officiellement été de 2 ,5% en 2001 selon l’Insee. Comment expliquer cette différence ?

Charles Pernin : Les méthodes de calcul ne sont pas similaires. Ce chiffre de l’Insee est l’indice des prix à la consommation : il comprend les voitures, l’électroménager, l’alimentation, l’alcool, etc. Si on prend seulement leur indice alimentaire, l’inflation était de 3,6%. C’est moins que notre chiffre, car le panier de l’Insee contient aussi des marques de distributeurs et des « premier prix », alors que notre panier ne comprend que des marques nationales.

Par ailleurs, l’indice de l’Insee comprend aussi les fruits et légumes frais, dont les prix ont diminué de 1,4%. Le nôtre n’en contient pas. Concrètement, nous avons ciblé des grandes catégories (produits laitiers, céréales, jambon, etc.) et choisi deux produits pour chacune.

Cet indice des prix alimentaire est peu médiatisé. Peut-on parler d’inflation cachée ?

En farfouillant sur le site de l’Insee, on finit par trouver des données, mais c’est vrai qu’elles passent inaperçues. L’indice des prix à la consommation n’est pas un bon indicateur, car il contient un très large éventail de produits, dont de l’équipement qu’on achète rarement, comme un téléviseur. D’où le décalage avec le quotidien des consommateurs.

C’est d’autant plus dommageable que l’inflation des produits alimentaires touche tout le monde dans son quotidien. Pour les ménages modestes, l’alimentation occupe une part plus importante des dépenses que pour les ménages aisés, l’augmentation est beaucoup plus sensible pour eux.

Avez-vous observé des tactiques d’industriels pour camoufler les hausses des prix, par réduisant en réduisant les formats ?

Curieusement, on a plutôt vu des augmentations de taille. Varier le format est toujours un moyen de brouiller les pistes. En saisissant un produit, les gens vont se dire « houla, c’est très cher » avant de voir qu’il est écrit « format max » ou « plus 20% » et se dire que c’est donc logique. Sauf que cette augmentation de volume s’accompagne aussi d’une augmentation du prix, mais pas au même rythme. Pour les céréales de petits déjeunes par exemple, on a observé une augmentation de format, et en rapportant le prix au format précédent, on a observé une augmentation.

Quelle est la cause principale de cette hausse des prix ?

La hausse des cours des matières premières est l’argument invoqué par les professionnels. La CLCV est sceptique, puisque le poids de la matière première dans le prix d’un produit fini est très marginal, surtout pour les produits très transformés. La matière première pèse très peu, une part plus importante du prix est liée au coût marketing, à la transformation industrielle, aux taxes, etc.

Les associations de consommateurs demandent plus de transparence sur la formation des prix et notamment une information claire sur la marge nette des différents professionnels. Cette marge correspond au profit que réalise chaque professionnel sur le produit. On n’a pas ces données, ce qui ne nous permet pas de comparer les profits réalisés par les uns et les autres.

Il faut aussi se poser la question de la concurrence, aussi bien dans l’industrie que dans la grande distribution. Il y a eu ces derniers temps plusieurs procédures engagées par l’autorité de la concurrence pour des pratiques anti-concurrentielles, dans l’industrie de la farine, des endives, des yaourts…

Dans la grande distribution, on veut donc un état des lieux des zones de chalandise, car on trouve beaucoup de situations très peu concurrentielles. Il y a eu notamment la question de Paris, où Casino truste 61,7 % des parts de marché de la distribution alimentaire. Il faudrait savoir quelle est la situation dans chaque zone de chalandise et le cas échéant obliger des acteurs à céder des parts de marché là où ils sont en position dominante.

Propos recueillis par Morgan Bourven

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