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Petites questions sur la transition écologique en agriculture selon Nicolas Hulot
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Tribune

Succédant au «développement durable», la transition écologique est le nouveau concept mis en avant pour répondre aux grands enjeux environnementaux. Mais on peut questionner sa pertinence en matière d'agriculture.

Gérard Kafadaroff

Gérard Kafadaroff

Gérard Kafadaroff, Ingénieur agronome, fondateur de l’AFBV (Association française de biotechnologies végétales), dernier ouvrage «OGM : la peur française de linnovation» Editions Baudelaire 2013.

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En désignant Nicolas Hulot « Ministre de la transition écologique et solidaire » avec rang de Ministre d’Etat et numéro 3 du gouvernement, Emmanuel Macron s’assure le soutien d’une large frange de la population déjà séduite par l’écologiste le plus populaire de France.

Tout comme la majorité des citoyens, il accorde toute son importance à la protection de l’environnement mais le consensus s’effrite vite quand il faut passer des intentions aux solutions. Dès lors les postures idéologiques se heurtent aux approches rationnelles et l’écologie politique tourne le dos à l’écologie scientifique.

L’agriculture est alors accusée, par ses détracteurs éloignés de la réalité agricole, de nuire à l’environnement ou à la santé de la population. 

Au travers de deux exemples récents, Nicolas Hulot démontre que sa conception de la transition écologique est fortement inspirée par le discours des ONG écolos.

Glyphosate : un faux-procès

Le 29 août 2017, le Ministre d’Etat annonce que la France s’opposera au renouvellement de l’autorisation de l’herbicide glyphosate (matière active du Roundup®) invoquant des « incertitudes sur la dangerosité de la molécule ».

Est-ce la position du Gouvernement ? Ou celles des ministres plus concernés de la Santé et de l’Agriculture  ?

Nicolas Hulot exploite à l’évidence le récent avis contesté du CIRC* classant le glyphosate « cancérogène probable » contre l’avis de toutes les agences de sécurité sanitaire française (ANSES), européennes (EFSA, Echa) ou internationales y compris l’OMS dont le CIRC est une agence ! La viande rouge classée par le CIRC au même niveau que le glyphosate,  sera-t-elle aussi frappée d’interdit par le Ministre d’Etat ?

Rappelons que le glyphosate est  largement utilisé dans le monde depuis plus de 40 ans sans rencontrer de problème sanitaire.

Depuis plusieurs décennies son profil toxicologique a été jugé favorable. Qu’il s’agisse de sa toxicité aigüe (inférieure à celle du sel de cuisine ou de l’aspirine) ou chronique (constamment reconnu comme non cancérigène, non mutagène, non génotoxique).

Début septembre, coupant court aux allégations mensongères, l’EFSA,  a confirmé que le glyphosate  n'est pas un perturbateur endocrinien.

Faisant fi des avis consensuels des agences sanitaires,  rôdé aux méthodes des groupes écolos, étranger à toute démarche scientifique, Nicolas Hulot ne retient que le seul avis du CIRC allant dans le sens de son opinion personnelle malgré les vives critiques émises sur la crédibilité de cette étude.

Le Ministre d’Etat ignore ou feint d’ignorer l’importance et les multiples usages agricoles du glyphosate sans lequel la seule alternative est le travail mécanique plus onéreux, gourmand en carburant et émetteur de CO2.

L’agriculture française s’ouvre avec retard  aux techniques de conservation des sols, s’appuyant sur l’abandon du labour ou du travail du sol nécessitant alors l’emploi de faibles doses de glyphosate pour détruire avant semis les couverts spontanés ou implantés dans l’interculture. Techniques agro-écologiques par excellence, elles diminuent les coûts pour l’agriculteur, améliorent la fertilité des sols en les enrichissant en matière organique, freinent l’érosion, séquestrent le carbone dans le sol  contribuant ainsi à réduire l’effet de serre.

Début septembre, le coût d’un éventuel retrait du glyphosate a été estimé  par la société Ipsos à 2 milliards d’euros uniquement pour les céréales et la vigne. 

L’interdiction du glyphosate dans les espaces publics instaurée par Ségolène Royal  sans analyse de son impact économique coûterait à la SNCF 500 millions d’euros par an.

Nicolas Hulot est-il si conditionné par le discours militant écolo au point d'oublier que son hostilité au glyphosate va à l’encontre de la transition écologique qu’il veut promouvoir ?

OGM : le déni de réalité

Le 4 juillet 2017, la Commission européenne en s’appuyant sur l’évaluation scientifique de l’EFSA a renouvelé pour 10 ans l’autorisation de culture du maïs transgénique Mon 810, seule PGM (plante génétiquement modifiée) autorisée dans l’Union européenne.

La France, s’affranchissant à nouveau des avis scientifiques et des décisions européennes, maintient son interdiction.

Ce maïs résistant à des insectes permet la suppression des traitements insecticides, il est plus sain pour les animaux qui le consomment (moins de mycotoxines), il épargne les insectes auxiliaires utiles (abeilles, coccinelles, syrphes, chrysopes) et constitue une solution plus simple pour l’agriculteur. N’est-ce pas une réelle avancée en terme d’agriculture durable ou agro-écologique ?

Nicolas Hulot, trop proche de la mouvance écolo, peut-il revenir sur cette décision irrationnelle même si les faits lui donnent tort ?

Les PGM tolérantes au Roundup® sont celles qui sont les plus utilisées dans le monde (150 millions d’hectares soit plus de 5 fois les surfaces agricoles françaises). 

La France n’a pas jugé utile de les expérimenter ni d’aller dans les grands pays agricoles  adeptes de ces plantes pour s’informer ! Ne pas savoir a été la règle.

L’apparition de mauvaises herbes résistantes au Roundup® demeure l’argument avancé pour rejeter ces PGM alors que ce phénomène de chimiorésistance, bien connu par les agriculteurs, est local et imputable à une mauvaise pratique agricole (utilisation répétée du même produit).

Ces PGM, correctement utilisées, permettent de réduire la consommation d’herbicides et en permettant de désherber des cultures déjà installées, elles facilitent la mise en oeuvre des techniques de conservation des sols dont les bénéfices économiques, agronomiques et environnementaux ont largement été démontrés dans de nombreux pays.

En 20 ans (1996 à 2015), selon PG Economics, société spécialisée en biotechnologies végétales,  les PGM ont permis de réduire  la consommation mondiale de pesticides de 620 000 tonnes de matières actives soit près de 10 fois la consommation annuelle française .

En 2015, les émissions mondiales de CO2 auraient été réduites de 26 millions de tonnes représentant les émissions annuelles de 12 millions de voitures.

D’autres PGM à vocation agricole et industrielle contribuant à la protection  de l’environnement ou à la réduction des pollutions sont en cours de développement mais hors de France !

Le sort réservé à la pomme de terre féculière transgénique Amflora® , autorisée dans l’Union européenne en 2010 après 13 années de tergiversations,  puis abandonnée en 2012 par BASF suite à l’hostilité rencontrée en dépit de son impact positif sur l’environnement,  est une nouvelle preuve que la France et l’Europe restent prisonnières de leur idéologie sécuritaire et d’un principe de précaution paralysant.

Gérer sérieusement la transition écologique c’est s’appuyer sur des faits objectifs, sur la démarche scientifique, l’expertise pluridisciplinaire et la confiance dans l’innovation              technologique. La politique de l’interdiction pour satisfaire des groupes militants, le calcul politicien, les comportements idéologiques et démagogiques conduisent à de fausses solutions préjudiciables à tous.

Glyphosate et OGM en sont l’illustration criarde.

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