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L'insupportable omerta qui continue à peser sur les maltraitances envers handicapés et personnes âgées
©Reuters

Jugée pour avoir dénoncé des maltraitances

Entre négligences, violences psychologiques, physiques, vol, harcèlement ou viols, les populations dépendantes sont particulièrement touchées aujourd'hui. Sans pouvoir se défendre, ces victimes souffrent de failles structurelles inquiétantes de nos sociétés.

Jean-Marc Maillet-Contoz

Jean-Marc Maillet-Contoz

Jean-Marc Maillet-Contoz est le créateur du magazine bimestriel spécialisé dans le monde du handicap : HANDIRECT, qui s'accompagne de deux site internet dont un sur l’emploi. Membre du Conseil d’administration de LADAPT et du Mouvement pour une société inclusive.

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Atlantico : Quels sont les catégories particulièrement touchées par ces violences "aux plus faibles" et de quelles violences parle-t-on généralement ?

Jean-Marc Maillet-Contoz : Les principales violences sont généralement psychologiques. Le tuteur ou l'aidant d'une personne dépendante peut ainsi avoir des remarques désobligeantes, mais cela peut aller jusqu'à des formes plus perverses de violences psychologiques. C'est ce qu'il y a de plus courant, parce que les gens pensent souvent avoir une légitimité ou une facilité à parler mal à quelqu'un. Ensuite il y a des vols surtout chez les personnes dépendantes. Il y a aussi des manques de respect de l'intimité ou du mode de vie ou encore de l'état d'hygiène avec des patients qui ne sont pas lavés, il y a la négligence aussi. Il y a les violences sexuelles bien-sûre, mais aussi du harcèlement ou du dénigrement. Il y a ensuite des violences physiques avec de nombreux cas d'attouchements sexuels, de coups, de tortures sadiques, de viols avec un abus de la situation d'indvalidité. 

Sont concernées par ce genre de sévices les dépendants, que ce soient les handicapées avec un handicap de compréhension d'expression ou de défense que cela soient les enfants, les personnes âgées ou les personnes handicapées.

Qu'est-ce qui fait que c'est précisément souvent le personnel proche, famille, accompagnateur ou soignant qui est le plus souvent accusé de violence ?

Le point central est le rapport quotidien voire intime des victimes à leurs agresseurs. Cette connaissance entraîne un sentiment de supériorité assumé envers la victime, et même un sentiment de puissance. La violence infligée, si elle n'entraîne pas de réponse entraîne généralement plus de violence dans ce cercle vicieux. Si la personne dépendante ne sait pas ou ne peut pas réagir, il y a un sentiment de surpuissance qui se développe chez l'individu se rendant compte qu'il a sa victime à sa merci. C'est la perversion humaine ici qui rentre en jeu. Certains s'habituent à infliger des petites vexations jugées pas graves, d'autres poussent toujours un peu plus loin le bouchon. C'est ainsi que par exemple des personnes qui sont chargées de l'hygiène intime de personnes dépendantes se permettent de passer de l'hygiène à l'attouchement. Et parfois de l'attouchement à l'abus sexuel et ainsi de suite. Et c'est d'autant plus facile quand cette personne dépendante n'est pas en capacité de s'exprimer, et donc ne peux pas porter plaine et encore moins resister. 

Chiffres émanants du 3977, numéro pour les victimes de violence handicapées ou âgées.

Du point de vue des insititutions, nombreuses sont les critiques envers leurs défaillances, dans le privé comme dans le public. Comment l'expliquez-vous et comment faut-il faire pour réagir ?

Le problème de ce genre d'institution est qu'il s'agit de lieux clos avec un personnel réduit et régulier. On a une équipe de jour et une autre de nuit et su on excepte les animateurs et personnels occasionels qui ne posent pas problème généralement, ces endroits sont pour le personnel des lieux de forte intimité avec leurs patients ou clients. Il est très facile d'être seul avec une personne dans ce cadre.  Il est donc logique que l'intimité des personnes soient plus facilement attaquables, et ce évidemment par ceux qui sont déjà un peu malsains et qui laissent libres cours à leurs pulsions. Il y a ceux qui vont dans ce genre d'environnement pour nourrir leur perversions, qui sont attirés par ce genre d'endroits. Il n'y a pas que des professionnels et on a souvent besoin de personnels dans ce genre de bâtiment. 

Il y a après le fait que le personnel souvent s'entraide et se soutient. Dès qu'il y a un malaise avec le résident, il est fréquent de voir un responsable noyer le poisson. Et d'affirmer :" oui, j'ai agis professionnel, il est instable". On retourne alors l'accusation sur l'autre en déclarant que c'est l'expression d'un fantasme, d'un manque. On a souvent et facilement tendance à faire porter sur la victime la faute. Cela, ça se passe à tous les niveaux, des petites mains jusqu'aux plus hautes sphères de la direction d'une institution. Toutes les couches du personnel sont concernées. 

Pensez-vous que les responsables éthiques et les politiques ont pris la mesure de ces agressions répétitives ?

On est encore au début de la sensibilisation. Tous le monde connaît le problème, mais les choses ne se débloquent pas encore. D'abord parce que l'institution ne veut pas faire de vague pour ne pas ternir sa réputation. Le directeur joue sa carrière, le personnel son avancement. On ne veut pas être accusé d'avoir laissé faire donc on laisse encore faire en détournant les yeux. On ne veut pas être accusé de non-assistance de personne en danger. A toutes les échelles, tous le monde craint pour lui. Et les victimes elles-mêmes cherchent à garder leurs places, ne veulent pas être virées ou encore plus maltraitées après un scandale. Et l'Etat ne veut pas prendre en compte ce problème parce qu'il est tellement important que c'est un scandale que de simplement le reconnaître. Il met en place des organismes pour s'en occuper mais les choses ne bougent pas vraiment. Tous le monde à beaucoup à perdre dans cette histoire, c'est ce qui explique l'omerta généralisée. Même les parents peuvent avoir peur de voir leur enfant ne plus avoir d'endroit pour l'accueillir et donc taire les sévices que subit leur enfant. il y a aussi un sentiment de déni et d'impuissance surtout dans le cas des handicaps très importants. Et c'est pareil pour les enfants qui viennent placer leurs parents. Tout le monde a peur. Et malheureusement pour les dizaines de milliers de victimes quotidiennes, c'est un système total qui les étouffe. Et par une certaine de lâcheté collegiale qui considère au final que ce n'est pas si grave. On admet donc de fait pour certaines catégories de la population des crimes et délits que l'on ne tolererait jamais pour les autres. 

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