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Xavier Bertrand ou Laurent Wauquiez : comment la bataille de la refondation de la droite s'engage
©Reuters

Duel

Les élections législatives ne sont même pas encore passées que déjà l'on voit se profiler une nouvelle bataille opposant deux lignes bien différentes au sein de la droite. D'un côté celle de Xavier Bertrand, de l'autre, celle de Laurent Wauquiez.

Tristan Quinault Maupoil

Tristan Quinault Maupoil

Tristan Quinault Maupoil est journaliste politique au Figaro.

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Atlantico : Une nouvelle bataille se dessine à droite à un horizon proche, entre une ligne incarnée par Xavier Bertrand qui, dans une interview donnée à La Voix du Nord  se réfère au séguinisme, à une droite sociale, et une autre ligne incarnée cette fois par Laurent Wauquiez partisan d'une droite plus "dure". Comment s'organise cette dualité actuelle au sein du parti LR ? Quels en sont les acteurs, et quelles sont les alliances probables à attendre autour de ce clivage ? 

Tristan Quinault Maupoil : On va avoir un aperçu de cette bataille dès le lendemain des législatives puisque l'on commence à voir que parmi les députés LR qui seront élus il pourrait y avoir deux groupes. D'un côté les "constructifs" selon Raffarin, une droite modérée prête à aider EM, prête à voter certains textes, c'est la position de Xavier Bertrand. Et de l'autre une droite qui veut s'inscrire fermement dans l'opposition, celle de Laurent Wauquiez.

Bertrand a dit non à Emmanuel Macron juste après la présidentielle mais il n'a pas dit non à l'idée d'aider sur des grandes réformes symboliques comme le marché du travail. Il ne s'interdit pas de voter des textes qui vont dans son sens. 

Il y a ces deux droites qui ne partagent pas la même conception. Les anciens juppéistes sont du côté de Xavier Bertrand. D'ailleurs il ne sera peut-être pas le seul représentant de cette ligne. A la rentrée il y aura le congrès qui élira le nouveau chef des républicains, on a évidemment pas encore la liste des candidats puisque tous attendent la fin des législatives. On se doute que Wauquiez et Bertrand seront candidats. D'autres sont cités, comme Pécresse, Bruno Le Maire, Retailleau… Il y aura plusieurs figures mais on connaît déjà la fracture de cette droite.

Il est un peu tôt pour parler d'alliances mais ça dépendra de la tournure que prend le scrutin, des conditions de participation des uns et des autres, du résultat des législatives… Tous ceux qui sont d'accord pour une droite libérale sauront se retrouver, tout comme ceux partisans d'une droite conservatrice. Bruno Retailleau par exemple, on le sent davantage proche de Wauquiez que de Bertrand. Sens Commun, le collectif proche de la manif pour tous a fait beaucoup parler de lui au sein des Républicains et c'est intéressant de voir les personnalités qui se positionnent à son égard. 

Quels sont les rapports de force en présence pour ces deux lignes ? Les électeurs ont-ils une orientation plus marquée vers une de ces deux lignes politiques ? Laquelle ? Qu'en est-il des cadres du parti ?

Comme très souvent à droite il y a un clivage entre les militants et les sympathisants. Les militants sont généralement ceux qui sont le plus à droite et qui plébiscitent Laurent Wauquiez. Au contraire, les sympathisants, ce sont des gens qui sont davantage bienveillants vis-à-vis de Xavier Bertrand. 

La question c'est de savoir où en sont les militants.  Aujourd'hui à droite il y a quand même une recomposition avec Emmanuel Macron. Le paysage d'hier n'est plus el même aujourd'hui. Ce sera avec le congrès que l'on pourra juger, peser les positions des uns et des autres et de faire un état des lieux de la droite.

Tout l'intérêt pour la droite d'avoir ce rendez-vous est là. L'exercice peut être difficile et pourrait rouvrir des plaies mais ça permet aussi des uns et aux autres de se jauger. 

Pour les cadres, il faudra voir qui est élu dans les rangs de la droite. Il y a des candidats qui sont proches de tel ou tel leader de la droite. Vont-ils être battus, quelle ligne sera la plus représentée, cela dépendra des circonscriptions et des duels gagnés. Aujourd'hui il y a 577 candidats, à la fin il en restera un certain nombre mais on ne sait pas si ce sera des libéraux ou des conservateurs. Chaque ténor a fait en sorte que ses proches soient investis. Ici et là on a des représentants de Xavier Bertrand, d'Alain Juppé, des anciens sarkozystes des fillonistes etc… Tous les leaders voudront avoir un maximum de proches à l'Assemblée Nationale

Sur le fond, quels sont les points qui séparent essentiellement ces deux lignes ? Sont-elles, elles aussi "irréconciliables" ou la droite est-elle en capacité de composer avec ces deux courants, comme elle a pu le faire par le passé ? En quoi une entente entre ces deux courants est-elle nécessaire ?

La droite a réussi à se réunir en 2002 grâce à l'électrochoc de JLM au second tour et car Jacques Chirac a gagné avec une majorité assez écrasante à l'élection présidentielle mais aussi aux législatives où il y a eu une vague bleue assez importante. Dans ce cas de figure il est facile de se réunir. Quand on gagne on fait un peu moins attention aux divergences. En 2007 la droite a continué de gagner, donc ça a tenu et en 2012, la déception autour de Nicolas Sarkozy aidant, là ça a commencé à s'effriter, notamment avec le départ de Jean-Louis Borloo. Cela a continué avec la primaire, qui a été un succès en nombre de votants mais ça a exacerbé les lignes et les clivages. On l'a vu avec Alain Juppé et François Fillon. On se souvient de l'entre deux tours de la primaire où par exemple on avait beaucoup parlé de l'IVG et du mariage pour tous. 

La droite conservatrice et libérale qui arrivaient à tenir ensemble quand la victoire était au rendez-vous n'arriver plus à se souder dans la défaite. 

Il y a les questions de société qui divisent les deux lignes, c'est un point extrêmement important,  ce sont toujours des questions qui passionnent les sympathisants de droite comme l'IVG ou le mariage pour tous. On pourrait même vérifier ce constat avec le travail du dimanche. Quand Nicolas Sarkozy avait commencé à en parler à l'Assemblée Nationale, il y avait des députés de droite qui n'étaient pas d'accord.

Sur l'économie il n'y a pas tant de différence que ça. Le programme de Fillon sur l'économie était jugé assez dur, le programme d'Alain Juppé l'était un peu moins mais on était quand même dans la même démarche. 

Sur l'identité la droite conservatrice fait de cette question-là une priorité. La droite libérale n'élude pas le sujet mais ce n'est pas sa priorité numéro une. C'est pour cela qu'Alain Juppé était parfois caricaturé en laxiste.  On est sur un sujet qui là encore passionne les sympathisants de droite qui s'activent à l'intérieur. 

Sur la reconquête du vote populaire, les deux lignes Bertrand ou Wauquiez ont pour objectif d'aller reconquérir ce vote car les deux ont fait le constat à l'issue de l'élection présidentielle que la droite est vraiment au ras des pâquerettes chez les ouvriers.

Pour gagner il faut absolument reconquérir cet électorat qui est parti d'une part chez Marine Le Pen et de l'autre chez Jean-Luc Mélenchon. Finalement on a deux stratégies qui se dessinent. Xavier Bertrand a envie d'aller reconquérir les ouvriers qui sont parti chez Jean-Luc Mélenchon. Dans ses meetings sur des thématiques sociales, il dit même "…Et pourtant je ne suis pas Jean-Luc Mélenchon, je suis un homme de droite". Laurent Wauquiez lui veut reconquérir les voix qui sont parties chez Marine Le Pen . Pour se faire, il va parler d'islam, d'identité… Ils sont donc le même but, la reconquête du vote populaire mais ils n'y vont pas par le même chemin.

Une entente est donc nécessaire entre ces deux courants pour gagner. Aujourd'hui nous ne sommes plus dans un bipartisme mais dans un tripartisme voir même quatre partis si on regarde le résultat du premier tour de l'élection présidentielle. Pour réussir à faire parti des deux qualifiés il faut savoir rassembler largement. Si la droite arrive divisée, elle ne pourra pas faire face. Ce sera la prime à celui qui rassemblera le plus car sans rassemblement, pas de victoire possible.

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