Quand Jean-Luc Mélenchon cherche à devenir le chef incontesté de la classe ouvrière<!-- --> | Atlantico.fr
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"Il est comparé à Georges Marchais par les médias pour le ridiculiser ; mais la référence le ravit".
"Il est comparé à Georges Marchais par les médias pour le ridiculiser ; mais la référence le ravit".
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Z comme Zemmour

Il a tenu, chaque matin, le journal de bord de cette année surprenante, inquiétante, mirobolante. Dans "Le bûcher des vaniteux", Eric Zemmour réunit chacune de ses chroniques sur RTL. Dérangeant mais pertinent (Extraits).

Éric Zemmour

Éric Zemmour

Eric Zemmour est journaliste et essayiste. Il a déjà publié une quinzaine de livres dont "Le Suicide français" (Albin Michel), "Destin français" (Albin Michel), "Le coup d'Etat des juges" (Grasset) ou bien encore "Le livre noir de la droite" (Grasset). Eric Zemmour vient de publier en septembre 2021 "La France n'a pas dit son dernier mot" aux éditions Rubempré.  
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Il a tous les talents. Il est l’un de nos derniers grands orateurs. Une redoutable bête télévisuelle. Un rhétoricien subtil formé par les trotskistes. Il est comparé à Georges Marchais par les médias pour le ridiculiser ; mais la référence le ravit : il n’aime rien tant que rabrouer les journalistes avec une truculence outrée ou choquer les bien-pensants en glorifiant la répression de la Chine contre les obscurantistes moines tibétains. Mais il prend plutôt ses modèles en Allemagne (Oskar Lafontaine, fondateur d’un parti à la gauche de la social-démocratie) ou en Amérique du Sud – même Chávez ne lui fait pas peur.

Jean-Luc Mélenchon a tout pour être le chef incontesté de la classe ouvrière, sauf qu’il n’y a plus de classe ouvrière et que les ouvriers ne votent pas pour lui ; ne l’écoutent pas ; préfèrent Marine Le Pen. L’injure suprême. Mélenchon a trop de culture historique pour ignorer qu’il y a toujours eu un électorat ouvrier séduit par les leaders bonapartistes, de Napoléon III au général de Gaulle, en passant par les ligues fascisantes de l’entre-deux-guerres. Mais il est trop lucide pour ne pas comprendre que, pour la première fois, c’est le mouvement bonapartiste qui récolte la plus grosse part électorale. Ce n’est pourtant pas faute de donner la pitance idéologique que les ouvriers et employés – embarqués désormais dans la même galère prolétarisée – sont censés réclamer : du social, encore du social, toujours du social. Mélenchon tonne contre l’austérité, la rigueur, les inégalités, le libéralisme, les banques, les suceurs de sang, promet aux riches des hausses d’impôts massives, ressuscitant le fameux « Je prends tout » de feu Georges Marchais.

Rien n’y fait. Le peuple de gauche ne lève pas un cil. Sa campagne protectionniste – pas plus que la démondialisation chère à Arnaud Montebourg pendant les primaires socialistes – ne le ramène pas vers la gauche. Pourtant Marine Le Pen ne dit pas autre chose. Elle est même plus radicale que le révolutionnaire autoproclamé, puisqu’elle propose, elle, de sortir de l’euro et de revenir au franc. En désespoir de cause, Mélenchon se précipite dans les usines comme un militant syndical et exalte gaillardement la solidarité de classe en termes lyriques, bien qu’un brin désuets. Sans effets. C’est que, contrairement à ce que croit Mélenchon, les ouvriers n’ont pas seulement rompu avec la gauche à cause du virage libéral de 1983. Ils refusent aussi le jusqu’au-boutisme progressiste d’une gauche sociétale : « tolérance » sexuelle et multiculturalisme. Comme si le peuple appréhendait plus globalement les conséquences de la mondialisation libérale – insécurité économique et sociale, mais aussi insécurité culturelle et identitaire – que les politiques de gauche confits dans leur credo soixante-huitard.

Pour de bonnes et de mauvaises raisons – ne pas davantage ethniciser la société française au nom de la citoyenneté républicaine, mais aussi crainte des lobbies antiracistes de la « diversité » qui font régner la terreur idéologique –, Mélenchon refuse d’entendre ce « conservatisme » populaire. Le peuple, à son tour, refuse de l’entendre. Et voilà pourquoi votre fille est muette.

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Extraits de Le bûcher des vaniteux, ©Editions Albin Michel  / RTL Spécial Marketing (7 mars 2012)

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