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Macron et Poutine soufflent le tiède sur les dossiers chauds mais aucun incendie n'est éteint
©CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP

Galerie des batailles

Pour autant, les deux chefs d'Etat ont clairement fait montre d'une volonté d'améliorer la situation, en acceptant de ne pas être d'accord sur bien des dossiers brûlants.

Florent Parmentier

Florent Parmentier

Florent Parmentier est enseignant à Sciences Po et chercheur associé au Centre de géopolitique de HEC. Il a récemment publié La Moldavie à la croisée des mondes (avec Josette Durrieu) ainsi que Les chemins de l’Etat de droit, la voie étroite des pays entre Europe et Russie. Il est le créateur avec Cyrille Bret du blog Eurasia Prospective

Pour le suivre sur Twitter : @FlorentParmenti

 

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Atlantico : La réception de Vladimir Poutine a été marquée par l'attention portée au cadre et au contexte : Versailles, demeure royale et joyau architectural français, et l'exposition sur Pierre Le Grand, tsar francophile par excellence. Quel rôle l'apparat a-t-il joué dans cette rencontre entre les deux nations ?

Florent Parmentier : Vladimir Poutine, à ce stade de ses présidences, se pose de plus en plus directement la question de la place qu’il laissera dans l’histoire. C’est ainsi qu’il faut interpréter par exemple sa déception de ne pas avoir pu se rendre à Paris dans des conditions satisfaisantes à l’inauguration du Centre culturel et spirituel orthodoxe russe du Quai Branly, qui revêtait une grande importance pour le patriarcat de Moscou. De son discours suivant l’annexion de la Crimée en mars 2014 à sa volonté d’organiser un concert de musique dans l’amphithéâtre de la ville libérée de Palmyre, on sent chez Vladimir Poutine un goût de l’histoire, et un questionnement sur celle-ci. 

C’est partant de constat qu’Emmanuel Macron a raison d’inviter Vladimir Poutine à Versailles : d’une part, il répond à ce besoin d’histoire en profitant de la célébration des 300 ans de l’amitié franco-russe, avec pour souvenir l’image du jeune souverain français porté par Pierre le Grand, qui a marqué les esprits de l’époque ; d’autre part, le Président Macron a opportunément rappelé que c’est par son caractère profondément européen que Pierre le Grand s’est inscrit dans l’histoire. A l’époque, la France de Louis XV cherchait un contrepoids à la lutte d’influence que les Habsbourg lui imposaient ; le souverain russe, pour sa part, n’a pas hésité à se dresser contre les conservatismes religieux de son époque, à emprunter ailleurs les modèles et les idées qui marchent. Alors que d’autres héros russes comme Alexandre Nevski incarnent plus une Russie tournée sur elle-même, la Russie de Pierre le Grand s’ouvre à la Baltique, permettant à la Russie de faire pleinement partie du concert des nations européennes. 

Peut-on considérer que les dossiers importants, ceux qui pouvaient poser problème, ont été vraiment abordés lors de ce sommet ?

La conférence de presse nous laisse montrer qu’un certain nombre de sujets ont pu être abordés à cette occasion, de la Syrie à l’Ukraine en passant par la situation en Tchétchénie. La ligne rouge d’une intervention à l’arme chimique a par exemple été soulevée avec une certaine fermeté. 

Pour autant, ce qui est intéressant dans cette première rencontre est le fait que les deux Présidents recherchent des solutions pragmatiques aux problèmes sécuritaires qui se présentent devant les deux pays. Le fait de se mettre d’accord sur ce sur quoi l’on n’est pas d’accord constitue une première façon de donner un cap à une coopération qui s’avère nécessaire sur de nombreux points. Un dialogue franc et sincère est de ce point de vue plus efficace que des postures de principe, qui peuvent s’avérer stériles lorsqu’elles ne sont pas suivies de courage politique. On peut donc s’attendre à ce que cette première visite de Vladimir Poutine en France depuis novembre 2015 contribue à poser les fondements d’une meilleure relation, Emmanuel Macron la situant également dans le cadre plus large de l’Europe et de la relation franco-allemande. 

Comment les deux hommes ont-ils tenté d'atteindre l'objectif peut-être le plus important de cette rencontre, faire évoluer positivement les relations entre leurs deux nations ?

La partie russe a fini par comprendre que leur rejet d’Emmanuel Macron, perceptible pendant la campagne, allait s’avérer dorénavant contreproductive. Après une campagne marquée par l’hostilité de la presse russe, l’idée a donc été de savoir comment faire naître de nouvelles relations. Le message de félicitation de Vladimir Poutine au lendemain de l’élection, les déclarations de l’Ambassadeur Orlov, ont montré une volonté de la Russie de tourner la page.

Côté français, Emmanuel Macron a voulu certainement compléter une séquence internationale déjà très fournie en coupant l’herbe sous le pied à tous ceux qui se posaient des questions sur sa capacité à faire face à des interlocuteurs expérimentés. N’étant pas connu comme pro-russe, à la différence de la plupart de ses rivaux de la présidentielle, il peut donc aller sur le terrain de la coopération sans pour autant craindre un procès d’intention, à l’image de ce que l’on peut voir aujourd’hui aux Etats-Unis.   

C’est dans ce sens qu’il faut comprendre l’importance de la relation franco-russe pour le continent : laisser dériver la Russie vers l’Asie ne sert pas automatiquement les intérêts des deux parties. Et l’on ne peut laisser le monopole des relations avec la Russie à l’Allemagne : s’intéresser à la Russie et au voisinage Est de l’Union européenne, c’est replacer la France au sein de beaucoup de questions qui préoccupent nos partenaires. 

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