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Trump attendu aux quatre tournants du G7
©JIM WATSON / AFP

Gaffera, gaffera pas ?

A Taormina les 26 et 27 mai en Sicile, avec la rencontre des chefs d’Etat et de gouvernement, se clôture la série des dix réunions du G7 sous Présidence italienne.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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On connaît les trois chiffres du G7 : 7 pays, 10% de la population mondiale et le tiers de son PIB. On connaît aussi son cérémonial et ses codes, avec cette fois son lot de nouveautés (4 bizuths, dont Donald Trump !), donc d’interrogations. Si tout a été fait pour arrondir les angles lors des réunions antérieures des ministres (finances, affaires étrangères, santé, travail…), les sujets les plus ardus, notamment ceux des échanges internationaux et du climat ont été gardés. Ils seront soumis à l’arbitrage des « grands chefs ». On  verra donc.

Donald Trump sera la grande vedette de la réunion, non seulement par le PIB de son pays, mais pour voir comment il « accommode » aux plus grandes démocraties (Allemagne avec Angela Merkel, Canada avec Justin Trudeau, France avec Emmanuel Macron, Italie avec Paolo Gentiloni, Japon avec Shinzo Abe, Royaume-Uni avec Theresa May, Union Européenne avec Jean-Claude Juncker et Donald-Tusk) ses projets de campagne et ses idées actuelles.

En six sessions, tout devrait être abordé : international et sécurité (2 sessions), croissance, échanges et climat (1 session), l’Afrique (avec ses invités, pour une session), problèmes généraux (migrations, sécurité alimentaire et inégalité hommes/femmes en une session), plus une session sur le fonctionnement même du G7. Quelle efficacité !

En fait, ce G7 sera attendu à quatre tournants, avec Donald Trump.

Tournant 1 : la sécurité. Ce même mot cache une quadruple montée des périls. D’abord, tous les membres du G7 (et pas eux seulement bien sûr) ont subi des attaques terroristes, en liaison avec le « terrorisme islamique ». Les sources de ces attaques sont directes et multiples, mais au-delà des origines géographiques directes (Lybie, Irak, Tunisie, Maroc et Algérie pour la plupart des attaques), la question se pose aussi des bases arrière : le salafisme vient d’Arabie saoudite (point récemment oublié par Donald Trump) et d’Iran (point récemment souligné par Donald Trump). C’est ensuite la montée des tensions en Asie, avec la Corée du Nord, mais aussi en mer de Chine, avec la politique plus assurée de la Chine, d’autant qu’il semble que les Etats-Unis se retirent, au moins un peu, du théâtre de ces opérations. Puis vient la montée des tensions en Europe, avec une Russie plus agressive et plus liée à la Turquie, au moment où il semble que les Etats-Unis se retirent, au moins un peu, de l’Otan. Ceci sans oublier les cyberattaques ! De plus en plus de tensions diverses, violentes et efficaces nous entourent. Comment réagir si l’on veut défendre la croissance, par quelles structures, quels équipements, quels échanges et quels moyens ? Et avec quels moyens et messages supplémentaires « si » l’on veut soutenir, aussi, les droits de l’homme ? Peut-on faire l’un sans l’autre ? La realpolitik sera au menu, et Donald Trump devra préciser ses positions.

Tournant 2 : croissance et échanges. L’économie mondiale va mieux, les Etats-Unis poursuivant leur reprise, la zone euro sort du marasme, tandis que la croissance chinoise financée à crédits (souvent douteux) inquiète. Ceci sans oublier le Brexit et le Royaume-Uni et la lente progression du Japon, vieux et endetté. Les échanges internationaux sont le moyen de soutenir la croissance de tous, en liant les pays industrialisés aux pays émergents, même si les traités sont complexes à monter. Mais, là encore, Donald Trump tranche. Il a arrêté la participation des USA au Traité Transpacifique (qui voulait endiguer la Chine) et veut renégocier (au moins) avec le Mexique et la Canada. Allons-nous soutenir une politique d’accords internationaux à partir du G7 ou revenir à des fractionnements – au bénéfice de la Chine ? L’économie politique sera au menu, et Donald Trump devra préciser ses positions.

Tournant 3 : le réchauffement climatique. Encore une fois, Donald Trump devra préciser ses positions. Il semble souhaiter une renégociation de l’accord signé à Paris, quitte à le mettre en danger. Le 24 mai, il lance l’oléoduc Keystone XL qui traverse les Etats-Unis et soutient aussi les explorations et exportations de pétrole de schiste, ce qui pèse sur le prix du pétrole, alors même que l’OPEP réduit sa propre production, fragilisant sa situation financière. Les politiques énergétiques sont l’illustration la plus éclatante de la nécessité de coopérations mondiales, face à l’America first. L’économie de l’environnement sera au menu, et Donald Trump aura des difficultés à préciser ses positions.

Tournant 4 : l’évolution des démocraties. Le sujet n’est pas écrit ainsi, bien sûr, mais il faudra bien se demander où va ce monde. D’un côté, les démocraties patinent à sortir de crise et à embrasser la révolution technologique en cours, avec plus d’inégalités et de désirs différents, sinon opposés, à trancher par des votes contestés. D’un autre côté, les régimes autoritaires avancent, Chine en tête, avec une croissance forte et surtout régulière.

A priori, et souhaitons-le, il n’y aura pas de drame. La photo devrait être « de famille ». Mais les problèmes sont de plus en plus sérieux, la famille moins unie, à partir de son chef, et il est de moins en moins certain qu’elle accepte de discuter vraiment. Bientôt, à côté du G7, on verra les réunions des BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) et plus encore, autour de la Chine, les partenaires d’OBOR (One Belt One Road, 64 pays se sont réunis à Pékin le 15 mai pour unir l’Asie à l’Europe). OBOR, c’est le tiers du PIB mondial, comme le G7, mais 60% de la population mondiale, 6 fois plus. Moralité : à Taormina, il faut que le G7 négocie bien, et ensemble, ces 4 tournants – et qu’il soit conscient du changement de monde que nous vivons. La croissance est en question, la démocratie aussi.

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