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Quand la crise guyanaise nous rappelle que la démocratie se joue aussi dans les comportements individuels
©jody amiet / AFP

Démocratie

Le fait est entendu : la démocratie, partout en Occident, est malade. Des deux cotés de l’Atlantique, les pays qui ont fait le choix de ce système politique sont aux prises avec des difficultés profondes.

Les Arvernes

Les Arvernes

Les Arvernes sont un groupe de hauts fonctionnaires, de professeurs, d’essayistes et d’entrepreneurs. Ils ont vocation à intervenir régulièrement, désormais, dans le débat public.

Composé de personnalités préférant rester anonymes, ce groupe se veut l'équivalent de droite aux Gracques qui s'étaient lancés lors de la campagne présidentielle de 2007 en signant un appel à une alliance PS-UDF. Les Arvernes, eux, souhaitent agir contre le déni de réalité dans lequel s'enferment trop souvent les élites françaises.

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Les pays émergents, hier persuadés que leur développement économique et social passait par l’adoption de la démocratie, envisagent désormais fièrement d’autres voies de développement, plus conformes à leur conception traditionnelle de la Cité, et regardent ce système politique avec une condescendance de plus en plus en manifeste. 

Disons-le tout net : la critique de la démocratie n’a rien de nouveau. Les Grecs anciens, inventeurs du concept, ont très tôt compris que la démocratie avait son jumeau noir, la démagogie. En France, le décalage entre pays réel et pays légal est un fil rouge de notre histoire politique depuis 1789. Et l’exclamation de Winston Churchill, selon laquelle la démocratie est le pire des régimes à l’exception de tous les autres, reste valide. 

Est-ce à dire alors qu’il faille renoncer à débattre de notre système démocratique ? C’est le contraire qui est vrai. Dans ce cadre, il nous semble que notre démocratie doit s’interroger sur trois éléments fondamentaux.

D’abord, les Institutions. Alors que la France a depuis 1789 essayé à peu près toutes les formes institutionnelles, sans jamais trouver celle qui lui convient, chacun comprend bien que la V em République est aujourd’hui à bout de souffle. Or, paradoxalement, rarement la réflexion sur les Institutions a été aussi pauvre. Il est donc urgent de reposer la question de nos Institutions, comme le Comité Vedel avait su le faire au milieu des années 1990.

Ensuite, la vie politique elle-même. La crise de notre vie politique est profonde, et ressentie comme telle par les citoyens. Cette crise concerne tous les acteurs. Les partis politiques d’abord, qui sont devenus des coquilles vides d’idées, en crise profonde, alors même que leur rôle, inscrit à l’article 4 de la Constitution, est tout à fait fondamental. La presse, ensuite, dont le rôle est éminent pour éclairer le citoyen dans ses choix, et qui par son amateurisme et son sensationnalisme croissants est atteinte par le même discrédit que le personnel politique aux yeux de citoyens exaspérés. Internet, enfin, que certains ont vus comme l’auxiliaire naturel de la démocratie, mais qui s’est aussi avéré à bien des égards le lieu de l’instantanéité, de la brutalité, et parfois du mensonge (fake news). C’est peu dire que ces trois acteurs de la démocratie doivent procéder à un sérieux aggiornamento.

Pourtant, les meilleures institutions et une vie politique apaisée ne sont rien si l’impasse est faite sur l’essentiel : l’attitude des citoyens eux-mêmes. Pour paraphraser Baruch Spinoza, lequel soulignait que "la paix n'est pas l'absence de guerre, mais une vertu qui naît de la force de l'âme", la démocratie et la république puisent avant tout leurs racines dans les comportements individuels. Sans citoyens responsables, il n’est pas de démocratie solide, de République digne de ce nom. A cet égard, il nous semble que notre démocratie, dirigée par la gauche ou par la droite de gouvernement, a montré trop de mansuétude à l’égard de comportements individuels si inacceptables que les tolérer ronge jusqu’au cœur de notre système politique. Si les exemples ne manquent pas (ainsi le feuilleton vaudevillesque de la SNCM, qui s’est terminé par l’intervention du GIGN pour prendre d’assaut un bateau en pleine mer ; l’affaire des chemises arrachées chez Air France etc.), la situation actuelle qui se développe en Guyane est tristement emblématique des effets délétères qui résultent de la prise en otage d’une population par une minorité. Alors que la tension s’était considérablement réduite après l’accord du 21 avril – lequel a prévu le versement d’une aide de quelques 3 milliards d’euros en particulier pour combler le retard du territoire en termes d’infrastructures - le conflit s’est à nouveau fortement durcit, sous l’action d’une minorité d’ultras extrêmement violents. Et c’est désormais une part importante de la population de Guyane qui se trouve prise en otage, puisqu’en raison de l’action irresponsable de certains, jusqu’à 40% des guyanais pâtissent ces jours-ci de coupures d’électricité sauvages. Sans parler des attaques ad hominem au cocktail Molotov.

Au total, c’est bien d’une réflexion globale dont notre démocratie malade a besoin. Cette réflexion doit aussi placer en son cœur le citoyen lui même, et ne jamais omettre des principes simples : savoir faire prévaloir l’intérêt général sur celui de la minorité ; se souvenir que le contrat républicain confère au citoyen des droits, mais aussi des devoirs.

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