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Où sont les Danois qui se plaignent ? Autant chercher une aiguille dans une botte de foin
©Reuters

Bonnes feuilles

Pourquoi les Danois sont-ils les plus heureux au monde, et comment font-ils, année après année, pour que leurs enfants soient également heureux, confiants, dynamiques ? Ce guide pratique et optimiste révèle les habitudes des familles les plus heureuses sur terre. À l’aide d’exemples limpides, il présente les six principes fondateurs de la parentalité danoise. Extrait de "Comment élever les enfants les plus heureux du monde" de Jessica-Joelle Alexander et Iben Dissing Sandahl, publié aux Editions JC Lattès. (2/2)

Un jour glacial, quand le ciel nuageux gris sombre déverse une pluie verglaçante, si vous demandez à un Danois ce qu’il pense du temps, il vous répondra tout naturellement : « Heureusement que je travaille ! » « Je suis bien contente de ne pas être en vacances ! » « J’ai hâte de rentrer chez moi ce soir me faire dor‐ loter et câliner mes enfants. » « Le mauvais temps, ça n’existe pas. C’est juste un problème de mauvais vêtement ! » Si vous dites « Quel dommage que ce soit déjà le dernier week-end des vacances ! », ils répliquent : « Oui, mais c’est le premier week-end du reste de nos vies ! » Où sont les Danois qui se plaignent ? Autant cher‐ cher une aiguille dans une botte de foin. Quel que soit le sujet, ils vous laisseront perplexe par leur capacité à injecter un point de vue positif dans la conversation. Nous ne cherchons pas à insinuer que les Danois ont un point de vue exagérément positif sur la vie et qu’ils en édulcorent l’amertume. Les Danois ne flottent pas sur un petit nuage d’optimisme, tels ces gens toujours très contents de tout, au sourire scotché aux lèvres, dont la rengaine préférée est « Super ! » ou « Génial ! » Ces gens-là planent complètement. Pas les Danois. Ils n’ont pas la prétention de se croire imperméables aux difficultés. D’une manière très terre à terre, ils voient juste une autre facette de leurs tracas, facette que vous n’auriez pas nécessairement envisagée de prime abord.

Non seulement ils choisissent de concentrer leur regard sur les aspects agréables des gens et des circonstances et non sur leurs aspects crispants, mais, plutôt que de s’embourber dans un point de vue unique, ils élargis‐ sent aussi leur perspective en grand-angle sur toutes les situations. Ensuite, ils tempèrent leurs affirmations. Du point de vue des psychologues, les Danois sont des « optimistes réalistes ». Les optimistes réalistes ne sont pas des hyper opti‐ mistes au sourire greffé sur le visage – ces gens qui sonnent parfois faux tant leur vie paraît parfaite. Ces personnes hyper positives ont tendance à ignorer les mauvaises nouvelles et donc à négliger d’importantes vérités désagréables. Il est risqué de croire que tout va bien, de dire que « Non, il n’y a aucun problème, » quand ce n’est pas le cas. Les problèmes ont le potentiel d’exploser à la figure de qui les ignore. L’autoillusion, dont nous avons parlé au chapitre 3, sous-tend le mécanisme. À l’opposé du spectre, les personnes vraiment très négatives et pessimistes ont tendance, elles, à ignorer les informations positives. Elles passent à côté des aspects plaisants de la vie et peuvent sombrer dans le désespoir. Comment devenir un optimiste réaliste ? En restant au contact de la réalité, mais d’un point de vue positif. Les optimistes réalistes filtrent et expurgent les infor‐ mations désagréables inutiles. Ils apprennent à faire la sourde oreille aux mots péjoratifs et développent l’habi‐ tude d’interpréter les situations ambiguës d’une manière positive. Ils ne voient pas les choses d’un point de vue exclusivement négatif ou positif, noir ou blanc, mais ils croient en l’existence de toutes sortes de nuances entre les deux. Se concentrer sur les aspects les moins négatifs des circonstances et chercher un juste milieu réduit le niveau d’anxiété et favorise le bien-être.

Le recadrage protège de la souffrance

D’après Dean M. Becker, fondateur de la société Adaptiv Learning Systems, cité dans un article du Scientific American Mind : « La différence entre ceux qui réussissent et ceux qui échouent, ce n’est ni le diplôme, ni l’expérience, ni la formation, c’est avant tout le niveau de résilience de l’individu. C’est vrai dans les services de cancérologie, aux Jeux olympiques et aussi dans les comités de direction. » Or on devient résilient notamment en apprenant à recadrer les situations défa‐ vorables. Chez les psychologues, le recadrage est une technique thérapeutique appelée aussi « réévaluation cognitive » . De nombreuses études montrent que quand nous choisissons délibérément de réinterpréter un événement déplaisant afin de mieux le « digérer », l’activité cérébrale baisse dans les zones liées au traitement des émotions pénibles, tandis qu’elle augmente dans les aires associées au contrôle cognitif et à l’adaptabilité. Dans une expé‐ rience de réévaluation cognitive, les scientifiques ont présenté à deux groupes de participants des visages de personnes en colère. Au préalable, ils ont expliqué aux membres du premier groupe ce qu’ils allaient voir : des visages d’individus qui venaient d’avoir une mauvaise journée et dont la colère ne s’adressait pas vraiment à qui que ce soit. Aux membres du second groupe, ils ont juste demandé de regarder les visages et de noter les émotions qu’ils suscitaient en eux. Ils ont découvert que les photos n’avaient absolument pas troublé les personnes du premier groupe, à qui ils avaient auparavant donné le cadre de l’attitude.

En fait, l’analyse des signaux électriques de leur activité cérébrale, enregistrés pendant l’expérience, a montré que le cadrage cognitif avait annulé les signaux liés aux émotions pénibles. En revanche, les visages avaient perturbé les personnes du groupe ayant pu laisser libre cours à leurs émotions face aux photos. Nous ressentons ce que nous pensons. Lors d’une autre étude, des chercheurs de Stanford ont étudié la réaction de personnes atteintes de pho‐ bies des araignées et des serpents4 . Au premier groupe de participants, ils ont expliqué comment recadrer leur expérience avant de les exposer à l’objet de leur phobie. Ils n’ont rien dit au second groupe, le groupe contrôle. Confrontées à des araignées ou à des serpents, les personnes du premier groupe ont exprimé une peur et une panique nettement moins fortes que celles du second groupe. Ce changement significatif dans leur réaction émotionnelle a perduré dans le temps : plus tard, lors d’une seconde exposition aux animaux, il s’est maintenu. Voilà qui prouve l’impact durable du reca‐ drage cognitif. Le recadrage modifie notre chimie cérébrale, mais il nous aide aussi à interpréter la souffrance, la peur, l’anxiété et toutes sortes d’émotions et réactions émotionnelles*. Il est le résultat direct des mots que nous employons pour réinterpréter nos expériences, qu’il s’agisse d’une reformulation à voix haute ou dans notre tête.

Extrait de "Comment élever les enfants les plus heureux du monde" de Jessica-Joelle Alexander et Iben Dissing Sandahl, publié aux Editions JC Lattès. 

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