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Fast fashion: une nouvelle génération de marques de prêt-à-porter bat Zara et H&M à plates coutures sur le délai entre design et magasins
©Reuters

Surfer sur la vague

Asos et Boohoo, deux marques de prêt à porter nouvelle génération ont réussi à se démarquer dans le secteur en misant sur des délais de conception des collections resserrés. Cette stratégie leur permet de pouvoir réagir aux nouvelles tendances de la mode. Une stratégie payante puisque la maîtrise des stocks est contrôlée. Leurs résultats commerciaux s'en ressentent.

Christophe Benavent

Christophe Benavent

Professeur à Paris Ouest, Christophe Benavent enseigne la stratégie et le marketing. Il dirige le Master Marketing opérationnel international.

Il est directeur du pôle digital de l'ObSoCo.

Il dirige l'Ecole doctorale Economie, Organisation et Société de Nanterre, ainsi que le Master Management des organisations et des politiques publiques.

 

Le dernier ouvrage de Christophe Benavent, Plateformes - Sites collaboratifs, marketplaces, réseaux sociaux : comment ils influencent nos Choix, est paru en mai  2016 (FYP editions). 

 
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Atlantico : Asos et Boohoo sont deux marques de prêt-à-porter qui ont réussi dans un secteur très concurrentiel en raccourcissant les délais de conception des collections. Leurs résultats pour l'année 2016 sont d'ailleurs excellents. Quelles sont leurs astuces pour réussir à se démarquer et faire la différence par rapport à Zara et H&M ?

Chrisophe Benavent La première, et c'est plus qu'une astuce, c'est la maitrise du temps entre la conception et la la distribution, il semble que ASOS en soit à 4 semaines quand Zara est connu pour l'avoir raccourci à 7 semaines! La seconde est d'être essentiellement essentiellement digitale, et de correspondre aux usages de ses jeunes clients et clientèles. La troisième c'est le bénéfice de la nouveauté : ces marques appartiennent à un marché où la mode est le moteur principal! des marques comme zara et H&M ont relativement vieillies avec leurs clientèles, les marques elles-mêmes sont des objets de mode.

Il est en réalité difficile de distinguer les facteurs dans la mesure où ils se combinent et forme des business model différents.  Le Business Model traditionnel consiste à  dessiner une collection pour une saison très en amont de la distribution, de manière à organiser ensuite la production pour bénéficier des coûts les plus faibles. Le succès dépend de la clairvoyance des stylistes, et le marketing, sous la forme des promotions et du mécanisme des soldes permet a postériori d'ajuster les choix initiaux, ce qui est mal vendu le sera en fin de saison à prix soldés. Zara a introduit une rupture dans ce modèle par un raccourcissement des cycles de conception de production et de conception, associé à un tracking des ventes très précis et un système logistique très intégré. Celà permet un meilleur ajustement au marché, et un usage moins intense des soldes qui permet de soutenir des très bas prix en restant profitable. Dans le modèle traditionnel, on couvre les coûts en début de saison avec des prix élevés pour les consommateurs/trices qui veulent être en avance sur les autres. La fraîcheur fait le prix! 

Asos amène encore un autre modèle. Avec une distribution purement digitale bien sur ce cyle de conception/production/ vente est encore accéléré ( on parle de 4 semaines pour ASOS alors qu'il était de 7 semaines pour Zara), mais surtout on échappe au limites d'espace. C'est une gamme plus vaste qui est proposée et qui se reflète dans les prix  dont la palette est beaucoup plus vaste, on appelle cela une économie de variété.  Quand le prêt à porter traditionnel s'appuyait sur des économies d'échelle, et que les modèles de type Zara ou H&M s'appuie sur la flexibilité, les nouveaux modèles eux se fondent sur la longue traîne.  Le digital permet de plus un meilleur contrôle par les données et une réactivité plus grande aux variations de goût du marché.


Boohoo et Asos misent également sur des stocks très restreints. En quoi est-ce que ne pas avoir trop de stocks à gérer permet de les aider à être aussi compétitives ? Peut-on parler en ce sens de "Amazon" du prêt-à-porter ?

Tout à fait. D'ailleurs ASOS peut vouloir dire "As you See OnlineS ". Oui bien sur quand on considère le mécanisme de market place. Plus  que la vitesse, c'est l'économie de variété, pour Amazon on parle de longue traine, qui est le facteur stratégique clé. On peut offrir des produits à tout les prix : les plus bas pour faire du volume, des prix élevés pour faire de la marge. On reporte aussi le risque de mévente sur les producteurs, Et avec les données on peut ajuster de manière fine et rapide la production et les catalogues. Comme Amazon, la stratégie digitale est bien menée avec la gestion de la livraison ( presque gratuite) et une politique de retours généreuse ( en durée et condition).  

Comme Amazon, et quasiment au même rythme puisque ASOS a été crée au début des années 2000, ce modèle bénéficie de l'élargissement constant de la base de clientèle avec le déploiement de l'usage l'internet, notamment mobile, ce qui explique une croissance des ventes quasi exponentielle qui n'a pas encore faibli depuis 15 ans. On notera cependant qu'aujourd'hui, sur une cible connectée à 100%, ce moteur de croissance va se ralentir. 

Est-ce que les excès liés à la fast-fashion, à savoir des invendus qui sont directement enfouis dans des décharges sont mieux compris et intégrés par ces sociétés "nouvelle génération" ? 

Oui bien sur, mais je ne pense pas que ce soit l'objectif numéro 1, c'est plutôt un effet secondaire d'un modèle qui tend vers le build by order, autrement un modèle où la production est pilotée par les commandes, qui s'oppose au modèle classique où l'on tente d'écouler par un marketing de la saison ( les promotion) une production décidée très en amont dans le temps ce qui permet une meilleure planification.

Ceci dit on peut imaginer que dans le futur d'autres business modèles vont supplanter ASOS et compagnie. Ils seront basés  certainement sur de la production à la demande et donc quasi unitaire, et pour allez encore plus loin, quand les technologies du sur-mesure seront bien intégrées ( notamment la gestion des mensurations), on ira sans doute vers des modèles totalement personnalisés.  L'industrie et la distribution textile n'ont pas fini de muter.

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