Pourquoi perdre du poids ne rend pas heureux mais peut éviter les dépressions<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Santé
Pourquoi perdre du poids ne rend pas heureux mais peut éviter les dépressions
©Pixabay

Encore un effort

Selon plusieurs études australiennes, perdre du poids n'est pas le facteur de bonne santé psychologique le plus important. La qualité du régime est essentielle pour endiguer les symptômes de dépression.

Catherine Grangeard

Catherine Grangeard

Catherine Grangeard est psychanalyste. Elle est l'auteur du livre Comprendre l'obésité chez Albin Michel, et de Obésité, le poids des mots, les maux du poids chez Calmann-Lévy.

Elle est membre du Think Tank ObésitéS, premier groupe de réflexion français sur la question du surpoids. 

Co-auteur du livre "La femme qui voit de l'autre côté du miroir" chez Eyrolles. 

Voir la bio »

Atlantico : Une nouvelle étude de l'Université Deakin en Australie montre que le fait d'améliorer la qualité de son régime est la clé pour protéger et préserver sa santé mentale, au détriment de la perte de poids en elle-même. Qu'est-ce qui explique que faire attention à la qualité de son régime est plus importante pour être bien dans son corps ?

Catherine Grangeard Le poids ne fait pas le bonheur ! Prendre soin de soi y participe. La santé mentale réside aussi dans son estime de soi…Voici un rapide rappel de quelques grands principes.

Il y a une confusion sémantique entre le régime alimentaire de tout un chacun et se mettre au « régime » ce qui signifie moins manger que d’habitude dans le but de perdre du poids. Vous imaginez être guidé par une obsession de régimes pour perdre du poids ? La simple idée de privation met le moral à zéro !

A l’inverse, être content de soi, penser que l’on se donne le meilleur, que l’on donne le meilleur à sa famille avec la nourriture, c’est fort pour aller bien. Pourquoi donc une perte de poids serait un objectif ? Cette étude semble implicitement le prétendre. C’est tout de même curieux de penser le surpoids de la sorte. Généraliser cette obsession de la perte de poids, c’est créer des problèmes d’excès de poids ! A force de restrictions, les gens en arrivent à avoir peur de se nourrir.

De bons aliments pour la santé permettant d’être bien dans sa peau, dans tous les sens de cette expression, sont d’ailleurs réclamés par la majeure partie de la population. Beaucoup de gens se soucient de la qualité de la nourriture. A juste titre semble-t-il… La qualité de ce qui est produit, vendu, confectionné est une sécurité élémentaire que réclament les consommateurs. Cela ne dépend pas d’eux mais de contrôles qu’ils sont en droit d’attendre. Les produits doivent être fiables et donc de qualité.

Ensuite, ce qui dépend de chacun, ce qui relève d’un choix individuel, c’est comment remplir son caddie, ses placards, son frigo puis son assiette. On voit donc qu’un régime de qualité est une conséquence, avant d’être une cause.

C’est curieux comme on oublie l’aspect collectif, social et que l’on pense presqu’uniquement en termes individuels toute cette question.

La publicité, je le rappelle encore, façonne les goûts et les choix que l’on estime, à tort, personnels…

Quand on parle de régime de qualité, faut-il privilégier les produits considérés comme sains ou n'est-il pas malgré tout important de "se faire plaisir" ? 

Si « se faire plaisir » c’est, au quotidien, boire des sodas et se nourrir de « mal bouffe », il ne faut pas en plus espérer être en forme ! Soyons sérieux… On a bien le droit de succomber mais on aura la santé qui va avec. Si quelqu’un a envie de faire comme l’oiseau et veut tenter de voler du 15 ème étage sans parachute, vous le laisserez « se faire plaisir » ? Un régime de qualité est celui qui va satisfaire une personne à différents niveaux. Sinon, ce n’est pas un régime de qualité.

L’idéal absolu : se faire plaisir avec des produits sains ! On doit donc interroger cette notion de ce qui fait plaisir, comment se construit une association mentale entre l’aliment et le plaisir. Le goût bien sûr, mais le goût ça s’apprend. On sait que selon les contrées, on aime ce qui est pimenté ou pas. Cet exemple montre que l’éducation est fondamentale, elle entraîne des habitudes. Donc… récompenser avec un fruit ou un gâteau, ça induit des associations d’idées très différentes.

Déguster un produit naturel, en en faisant tout un plat, si j’ose dire, c’est montrer la valeur que le produit, en lui-même, possède. Prenons les fruits… Une bonne fraise a-t-elle besoin de sucre ?

Ce qui est considéré comme « régime de qualité » est donc à définir sous ces angles.

Lorsque seules les calories comptent, on ne peut pas parler de qualité, ni gustative ni nutritionnelle.

Le régime de qualité va apporter ce qu’il faut au corps pour fonctionner de manière optimale, à la fois en termes d’énergie et de plaisir… et au Sujet, à l’être humain, quelque chose qui lui donne confiance dans sa capacité à s’occuper correctement de lui-même et des autres !

L’un des innombrables problèmes que soulèvent tous les sites de coaching-minceur, les applis, et autres, c’est que la personne perd le peu de confiance qui lui restait sur ses compétences à être en capacité de savoir ce qui est bon pour elle. Perdre foi en soi, dans sa capacité de jugement, c’est grave. Aucun régime de qualité n’a droit à ce qualificatif si le prix à payer est de renoncer à s’octroyer la capacité de conduire (to coach) par soi-même son propre régime alimentaire…

Etre capable de se nourrir, d’assurer sa subsistance, n’est - ce pas un signe d’autonomie ?

La clé d'un bon régime n'est-elle pas d'oublier que l'on fait un régime ?

Cette idée de régime est équivalente à des frustrations. Faire un régime, c’est être dans un choix qui restreint, interdit, etc… Cela ne peut donc être quelque chose qui soit associé à du durable.

Or, on va se nourrir jusqu’à la fin de la vie.

Donc, logiquement, il nous faut penser alimentation uniquement sur du long terme. La clé, pour reprendre votre expression, qui ouvre des issues, ce ne peut être que dans cette direction. L’alimentation qui convient à chacun est quelque chose qui s’adapte à son mode de vie. Et non l’inverse ! Je ne vais pas passer ma vie à compter des calories, des points ou que sais-je encore…

Tout le monde a besoin de variété, d’équilibre alimentaire en fait et de produits de qualité… ni trop, ni trop peu… Et tout le monde n’a pas une formation en diététique !

En revanche, en adoptant un mode alimentaire qui va bien avec mon mode de vie, mes besoins et mes goûts, il se peut bien que j’arrive à adopter une alimentation qui me convienne sur tous les plans. La rigidité des conseils diététiques est vouée à l’échec. C’est grave que sous des prétextes d’équilibre parfait, le résultat soit pire que le mal…Les « yoyos » résultent de périodes successives de régimes. La prise de poids est toujours supérieures d’épisodes en épisodes. Le découragement aussi.

L’idée de régime en est responsable. Bien se nourrir est l’unique objectif. Pour être en forme, pour prendre plaisir à manger, pas pour viser un poids défini par des normes absurdes. Quelques kilos en trop ne sont pas un problème, ni de santé, ni esthétique.

Quand je parle de régime, il s’agit bien de toutes les formules, méthodes et autres expressions qui signifient au fond exactement la même chose… ça fait juste plus neuf, plus moderne. Je reprendrai volontiers votre question pour conclure en disant que la clé, c’est d’oublier de faire un régime !

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !