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Hauts-fonctionnaires contre Marine Le Pen : une drôle de guerre qui reste peu probable
©Reuters

La guerre de Troie n'aura pas lieu

Les invectives et menaces entre hauts-fonctionnaires hostiles au Front National et Marine Le Pen, candidate de ce parti, n'ont cessé de pleuvoir ces derniers temps. Cependant, si le ton est belliqueux, le champ de bataille semble bien mince, voire inexistant.

Hyppolite Lachaize

Hyppolite Lachaize

Hyppolite Lachaize est haut-fonctionnaire.

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Atlantico : L'administration peut-elle réellement s'opposer au projet d'un président élu par les Français ? Si cette question ne se pose pas en cas d'instauration d'un régime antidémocratique, ou antirépublicain, comment juger le devoir de réserve dans le cas d'une opposition politique, aussi marquée soit elle ?

Hyppolite Lachaize : En principe non, elle ne peut pas s’y opposer sauf dans un cas : si les ordres reçus sont "manifestement illégaux", c’est-à-dire de toute évidence contraire à la Constitution, aux engagements internationaux de la France ou aux lois. Dans une telle hypothèse, les fonctionnaires n’ont pas seulement le pouvoir, mais le devoir de refuser de les appliquer. Dans tout autre cas de figure, si les ordres ne sont pas manifestement illégaux, les fonctionnaires ont un devoir d’obéissance. Il faut noter que selon la Constitution, article 20 et 21, leur supérieur hiérarchique n’est pas le Président de la République, mais le Premier ministre et les membres du gouvernement.  

Dans cette polémique opposant le Front national et l'administration, cette dernière ne prend elle pas le risque de tendre "le bâton pour se faire battre" ?

Non. Les chances de l’arrivée au pouvoir d’un candidat lepéniste et d’une majorité de la même couleur à l’Assemblée qui disposerait d’un Premier ministre et d’un gouvernement du même bord sont infimes. Si une telle hypothèse venait à se présenter, les fonctionnaires sont protégés par un statut de la fonction publique qui empêche de les sanctionner pour des raisons politiques ou idéologiques. Ils peuvent être sanctionnés pour insuffisance professionnelle ou pour une faute, mais alors, sous réserve de la preuve de ces manquements. Une exception toutefois, les hauts fonctionnaires, préfets, ambassadeurs, directeurs d’administration centrale qui dirigent l’appareil d’Etat au quotidien pourraient être écartés de leur poste. Mais l’immense majorité d’entre eux, dans cette hypothèse, demanderaient spontanément à être relevés de leurs fonctions. Sans entrer dans la politique fiction, on peut alors prévoir un certain chaos dans l’appareil d’Etat. 

Au regard des candidats actuels, existe-t-il des projets susceptibles de véritablement "justifier" une volonté de rupture de l'Administration ?

Au regard des principes constitutionnels, du droit international et européen, les projets qui rompent avec le principe d’égalité entre les nationaux et les non nationaux – étrangers en situation régulière que la France a accueillis en leur accordant le droit au séjour – face à l’école, à l’accès au travail, ou aux logements sociaux – seraient de toute évidence manifestement illégaux. Le Conseil constitutionnel et le Conseil d’Etat s’y opposeraient de toute façon avant même que l’administration n’en soit saisie pour application.  On peut aussi imaginer que des projets totalement délirants et ruineux au regard des finances publiques, par exemple un revenu universel à 400 milliards d’euros, rencontre l’opposition ferme et résolue des hauts-fonctionnaires chargés de l’équilibre des finances publiques. 

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