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Quand Hamon rétropédale vers les démons historiques de la gauche
©Capture d'écran France 2

En avant vers le passé

Le passage dans l'émission politique de Benoit Hamon pose la question de l'héritage politique du parti socialiste. Et de savoir si son discours est encore en accord avec la modernité.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Ah vraiment! Quand on écoute Hamon, on ne peut pas s’empêcher de se dire que, parfois, ne pas être alourdi par une famille politique (cas d’Emmanuel Macron), qui vous demande de porter fièrement toutes les névroses qu’elle se traîne depuis des générations, ça aide. Accusé de ne pas assumer le bilan désastreux de François Hollande, et limité par les vieux fantasmes sociaux d’une gauche abimée par le temps, Hamon donne consciencieusement des coups de hache dans les points les plus intéressants de son programme, pour un bénéfice politique qui sera à peu près nul.

Comment Hamon a transformé le revenu universel en nouvelle aide sociale pour riches

Cette semaine, Benoît Hamon s’est d’abord ingénié à tuer son projet de revenu universel, en le transformant en nouvelle aide sociale. Il faut dire que le projet qu’il avait lancé à la cantonade en décembre coûtait très cher et mettait la France en position de sortir de la zone euro s’il avait dû se réaliser sous la forme qu’il avait évoquée. Et, à moins d’assumer le glissement de notre beau pays vers une forme assumée d’Union Soviétique moderne, on voyait mal comment il pouvait préserver être porté dans le cadre de nos institutions.

Une méthode simple aurait consisté à financer le revenu universel en le substituant à notre coûteuse sécurité sociale. Hamon avait d’ailleurs tenu des propos en ce sens, en accord avec la Fondation Jean-Jaurès. Cette formule aurait correspondu à un véritable renouvellement des idées de gauche, en créant de nouvelles solidarités totalement neutres pour les finances publiques.

Malheureusement, Hamon est rattrapé par les vieux démons de la gauche pour qui l’intervention de l’Etat doit être en expansion permanente, et pour qui 56% de PIB consacré aux dépenses publiques, ce n’est pas encore assez. L’ultra-libéralisme est à nos portes!

Donc Hamon propose désormais un revenu universel qui consiste en réalité en une prime d’activité augmentée, porteuse d’aberrations extravagantes. Ainsi, les étudiants qui travaillent en perdront le bénéfice, en revanche, les fils à papa dont les parents financent les études y auront droit. Comment, au nom de la solidarité, les vieux démons de gauche deviennent les principaux facteurs agissants de la reproduction sociale et de la sélection par l’argent.

Charité bien ordonnée… comme on dit dans la gauche caviar.

Hamon a tort de ne pas renoncer aux vieux schémas idéologiques

Pour le reste, Benoît Hamon continue à propager le fantasme d’un libéralisme hurlant, phase préparatoire au fascisme de Marine Le Pen. Quand on entend ça, on a envie de lui dire: Pépère, renonce à la vulgate marxiste de l’UNEF où tu as commencé ta carrière, et regarde la réalité sans tes oeillères de syndicaliste étudiant.

Macron est en effet tout sauf un libéral. Il est l’homme du capitalisme de connivence qui veut, sous un emballage remarketé, continuer un système qui prend l’eau. Marine Le Pen est une étatiste de premier ordre. Dans les deux cas, il n’y a pas l’once d’un soupçon de libéralisme qui pointe. Et, répétons-le, avec 56% de PIB étatisés, on n’est pas prêt de le voir arriver, le loup libéral.

Il vaudrait mieux déplacer le clivage sur d’autres lignes, mon cher Benoît, pour décoder le paysage politique.

Tiens! prenons les dépenses publiques. Il y a bien aujourd’hui deux types de projet. D’un côté, le projet Fillon qui, à une époque, a préconisé leur baisse drastique. De l’autre, tous les autres projets qui sont porteurs d’au mieux une stabilisation de la dépense publique dans le PIB, mais plus généralement de leur augmentation.

Prenons un autre clivage: la réduction du pouvoir de la technostructure. Là, on trouvera partiellement des pistes chez les uns ou les autres (peut-être au Front National d’ailleurs). Mais pour le reste, Macron appartient au même univers que Hamon : la présidentielle doit conforter l’emprise d’une aristocratie d’Etat sur un système qu’elle suce jusqu’à la moëlle.

Les portes ratées du slalom Hamon

Que n’eussions-nous béni le projet Hamon s’il avait réinventé la gauche. S’il avait proposé de nouvelles solidarités et une baisse des dépenses publiques. S’il avait proposé une rupture dans la gouvernance et les institutions tout en augmentant leur caractère démocratique. S’il avait proposé de nouvelles libertés pour tous, au lieu de nouvelles couches de réglementations, qui sont aux citoyens de la République ce que la pâtée est au canard en phase de gazage : une oxydation lente des neurones et des muscles avant la phase terminale des libertés.

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