Edito
La chute des cours du pétrole éloigne le risque d’un retour de l’inflation
La chute brutale des cours du pétrole en l’espace de quarante-huit heures vient de rappeler combien les prévisions en matière économique se révèlent aléatoires. Le débat se focalise désormais sur l’évolution future de la production pétrolière.
La chute brutale des cours du pétrole en l’espace de quarante-huit heures vient de rappeler combien les prévisions en matière économique se révèlent aléatoires. L’or noir, qui s’était installé au-dessus de 55 dollars le baril, est retombé en-dessous de cinquante, à 49 dollars, pour le WTI, tandis que le pétrole de la mer du Nord accusait un repli supérieur à sept pour cent. Ce mouvement spectaculaire a surpris par sa soudaineté et son ampleur, preuve qu’une certaine spéculation s’était installée depuis quelque temps en pariant au contraire sur une hausse du brut. En effet, les risques d’une pénurie s’étaient répandus sur les marchés, à l’annonce que les grandes compagnies réduisaient leurs investissements en matière de recherche, alors que la consommation continuait d’augmenter, ce qui se traduirait à terme par un retour de la pénurie et une inévitable hausse des prix. Certains spécialistes envisageaient à terme leur doublement autour de cent dollars, en raison d’une véritable flambée des prix. A cet égard, l’inflation de deux pour cent enregistrée en février dans la zone euro apparaissait comme un signe prémonitoire, susceptible d’entraîner les maux habituels : augmentation accélérée des taux d’intérêt et effets négatifs sur la croissance.
Mario Draghi a tenu à rassurer jeudi les marchés. Le président de la Banque centrale européenne assure que le risque de déflation redouté précédemment était conjuré grâce aux 1700 milliards qui avaient été déversés sur les marchés avec les rachats d’actifs, auxquels s’ajouteraient encore 620 milliards d’ici la fin de l’année. Au demeurant, selon lui, les taux d’intérêt, qui aveint commencé à se tendre un peu, pourraient encore connaitre un mouvement de baisse, car hors énergie, l’inflation de février dans la zone euro n’était que de 0,9% ce qui montre l’importance du rôle joué par le pétrole dans la fabrication des prix. La chute soudaine des cours des derniers jours aura donc ses répercussions sur l’indice de mars, qui pourrait se stabiliser et faire retomber les craintes émises par certains économistes.
Le débat se focalise désormais sur l’évolution future de la production pétrolière. L’accord de réduction d’un million deux cent mille barils jour de la mise sur le marché des pays de l’Opep conclu en novembre semble fonctionner normalement. Mais les investissements massifs qui ont repris aux Etats-Unis pour l’exploitation du gaz de schiste depuis que les prix sont remontés, apportent un complément d’offre qui compense déjà ce que les producteurs traditionnels ne fournissaient plus. Et la hausse régulière des stocks américains de semaine en semaine indique même que l’on se trouve dans une situation nouvelle où l’Amérique risque d’inonder de plus en plus le marché. L’inquiétude est telle parmi les fournisseurs traditionnels qu’une réunion vient de se tenir pour la première fois avec les producteurs de gaz de schiste, pour tenter de tracer des perspectives réalistes sur l’avenir de ce marché si sensible à la conjoncture, en prenant conscience d’une donnée fondamentale : le meilleur moyen de contrôler la production est de stabiliser les prix, voire de les orienter à la baisse pour décourager la multitude de petits producteurs d’outre-Atlantique à s’orienter vers une activité qui serait alors de moins en moins lucrative, malgré la baisse des coûts d’exploitation observée ces derniers temps. Ce serait la meilleure manière de rééquilibrer le fonctionnement d’un marché d’autant plus volatile qu’il est lié aussi aux aléas géopolitiques de plus en plus présents.
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