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Assemblée des départements de France : et le candidat qui risque d’être le mieux accueilli par les collectivités territoriales au bord de la crise de nerf est…
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Mille-feuille territorial

L'évolution du rôle du département dans la vie politique française pose question. C'est pourquoi l'Assemblée des Départements de France a décidé de convoquer les candidats à la présidence pour discuter de la façon dont on doit s'en occuper.

Pierre-François Gouiffès

Pierre-François Gouiffès

Pierre-François Gouiffès est maître de conférences à Sciences Po (gestion publique & économie politique). Il a notamment publié Réformes: mission impossible ? (Documentation française, 2010), L’âge d’or des déficits, 40 ans de politique budgétaire française (Documentation française, 2013). et récemment Le Logement en France (Economica, 2017). Il tient un blog sur pfgouiffes.net.
 

Vous pouvez également suivre Pierre-François Gouiffès sur Twitter

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Atlantico : Mercredi 8 mars, l'Assemblée des départements de France (ADF) reçoit les candidats à l'élection présidentielle pour connaître leurs propositions. Dans quelle situation les départements se trouvent-ils, après un quinquennat qui a mis en place une réforme territoriale, un contexte de baisse des dépenses et d'augmentation des allocataires ?

Pierre-François Gouiffès : Pour analyser la situation des départements il faut séparer la question institutionnelle et celle des politiques publiques prises en charge par cette collectivité territoriale.

Sur le plan institutionnel, rappelons que les départements créés à la Révolution constituent avec les communes la couche la plus ancienne du fameux "mille feuilles territorial" français et qu’ils connaissent depuis le début des années 1980 une baisse relative de leur poids dans le dispositif avec l’émergence de deux autres types de collectivité territoriale, les intercommunalités de différents types et les régions. Ils ne sont toutefois jamais remis en cause de façon intégrale car le plus souvent les textes d’organisation territoriale commencent leur vie avec un esprit régionaliste (c’est le cas de la réforme de 2003) mais sont en quelques sorte "départementalisés" lors du passage au Parlement et notamment au Sénat. Au final la réforme la plus audacieuse semble être celle effectuée sous le quinquennat Sarkozy avec le conseiller territorial à la fois compétent pour la région et le département, qui pouvait conduire à terme à faire des départements des subdivisions administratives des régions. Cette réforme a été retirée dès l’arrivée au pouvoir de François Hollande. Il n’en demeure pas moins une question existentielle latente avec les départements.

En effet les départements se sont principalement transformés en usine à financer des prestations sociales, principalement le RMI devenu RSA transféré en 2004 (revenu de solidarité active, montant financé doublé depuis cette date), l’APA (allocation pour l’autonomie) et l’aide sociale à l’enfance. Le département est structurellement affaibli sur le plan politique car beaucoup de décisions en matière d’aide sociale sont prises par l’Etat (augmentation du RSA de 10 % en cinq ans prévue par le plan pauvreté du Gouvernement Ayrault, de décembre 2012, revalorisation de l’APA par la loi adaptation de la société au vieillissement de 2015).

D’où des débats institutionnels sur la pertinence que le département ne soit qu’un guichet payeur ou sur sa capacité à adapter au niveau local les politiques d’aide sociale, comme l’a tenté le département du Haut-Rhin en 2015-2016.

On se souvient de la ville de Detroit aux Etats-Unis qui a été en situation de faillite jusque début 2015. Quel est le niveau d'endettement des départements français aujourd'hui ? En quoi faudrait-il repenser le rôle des départements, avoir une réflexion stratégique sur le territoire français pour répondre aux enjeux modernes ?

La synthèse de la Banque Postale sur les finances des départements présente les agrégats suivants pour les 101 départements français : des dépenses totales de 70mds€ quasiment équivalentes à leurs recettes, dont 48mds€ de dépenses d’aide sociale. La dette des départements est donc stable autour de 33mds€, soit 1,5% de la dette publique totale. Il y a bien sûr des départements avec des difficultés particulières mais dans l’ensemble on n’est pas du tout dans une situation de faillite puisque les départements ont augmenté les taux des droits de mutation à titre onéreux et réduit leurs investissements pour compenser la baisse des dotations versées par l’Etat.

Concernant les enjeux institutionnels voire existentiels sur les départements, il est intéressant de regarder les trois thèmes sur lesquels l’association des départements de France veut faire plancher les candidats ce matin : l’adaptation du modèle social, la fracture territoriale et la ruralité, le carcan normatif qui s’impose aux collectivités locales. Ce sont de bons axes pour analyser la situation des collectivités locales.

Parmi les candidats actuels, certaines propositions, certains projets relatifs à l'organisation des territoires vous semblent-elles plus pertinentes que d'autres ?

Si l’on prend (en ordre alphabétique) les propositions des trois candidats aujourd’hui en tête des sondages, les propositions sont les suivantes et correspondent d’ailleurs à des positionnements électoraux dans les territoires.

François Filon rappelle son attachement au système du conseille territorial qui conduit au rapprochement entre régions et départements et ne s’interdit pas dans ce cadre de retoucher à la carte des 13 nouvelles régions. Il indique par ailleurs que l’organisation territoriale ne doit pas nécessairement être uniforme, une situation existant d’ailleurs déjà (Corse, Lyon) et met en avant le choix des territoires à se rapprocher s’ils le souhaitent. Par ailleurs François Fillon impacte fortement les politiques publiques dont les départements ont la charge avec le projet d’une allocation sociale unique incluant le RSA.

Marine Le Pen propose peu ou prou la simplification du mille-feuilles territorial en revenant à la structure institutionnelle d’avant 1981 avec les trois niveaux d’administration de la commune des départements et de l’État. C’est donc la plus départementaliste des candidats, faisant fi de la montée des intercommunalités, des régions et du fait métropolitain. C’est un discours qui colle bien à la "France périphérique" fortement séduite électoralement par le Front national.

Emmanuel Macron met pour sa part en avant le fait métropolitain en proposant de rapprocher les métropoles ou les agglomérations des départements dans les parties les plus urbanisées du territoire. Il semble notamment s’inspirer de l’expérience lyonnaise de Gérard Collomb qui le soutient et qui a fusionné Lyon et la partie urbaine du département du Rhône. Ici c’est la France des métropoles qui est mise en avant.

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