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La France, fille malade du communautarisme
©ALAIN JOCARD / AFP

Bonnes feuilles

Jour après jour, le monde s'installe dans une société totalitaire de moins en moins démocratique et le champ de nos libertés individuelles se rétrécit sérieusement. Exemples à l'appui, le Comité Orwell a choisi de dénoncer les dérives de nos sociétés. Parce qu'il y a peu de chances qu'un candidat à la présidentielle de 2017 se saisisse de ces sujets, alors qu'ils sont les seuls qui vaillent, les seuls qui déterminent la capacité à agir - ou la totale impuissance - du futur Président. Extrait de "Bienvenue dans le pire des mondes", de Natacha Polony et le comité Cornwell, aux éditions Plon 2/2

Natacha Polony

Natacha Polony

Natacha Polony est directrice de la rédaction de Marianne et essayiste. Elle a publié Ce pays qu’on abat. Chroniques 2009-2014 (Plon) et Changer la vie (éditions de L'Observatoire, 2017).

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En raison de sa spécificité historique, la France a longtemps résisté à ce totalitarisme soft. En 1981, les Français élisent un président socialiste alors que le néoconservatisme reagano-thatchérien est déjà en passe de triompher. Pourtant, sous couvert de célébration de la Révolution, le 14 juillet 1989 ressemble en réalité à une cérémonie d'adieu au modèle républicain.

Pas de bonnets phrygiens, ni de carmagnoles, encore moins de sans-culottes, mais des Chinois qui défilent en silence, des danseuses arabes, des tambours africains, des percussionnistes sénégalais, le moonwalking de Michael Jackson et enfin une cantatrice noire-américaine, Jessye Norman, qui entonne l'hymne national. La Marseillaise. Le défilé-opéra sur les Champs-Élysées pourcélébrer le bicentenaire de la Révolution française le 14 juillet 1989, a des allures de pub Benetton. Pas étonnant, son chorégraphe, Jean-Paul Goude, est un publicitaire. Mais son esthétique branchée dissimule une véritable idéologie : celle de la religion du multiculturalisme et des droits de l'homme. Au lendemain de la célébration, il précise quelles étaient ses intentions : "Pour moi la Révolution, c'est d'abord les droits de l'homme, le reste n'est qu'un souvenir", ou encore : "Nous savions que nous allions célébrer la fête des tribus planétaires."

La Révolution est expurgée de sa dimension patriotique et sociale. L'universalisme républicain, fondé sur l'assimilation d'un héritage politique et culturel commun, est repeint aux couleurs du multiculturalisme étatsunien fondé sur la juxtaposition des communautés. Une trahison complète de la Révolution qui avait justement tout fait pour limiter le pouvoir des communautés. La France est une nation multiethnique, mais en aucun cas multiculturelle. "Il faut tout refuser aux Juifs comme nation et tout accorder aux Juifs comme individus", avait dit Stanislas de Clermont-Tonnerre dans un célèbre discours à l'Assemblée nationale en 1789. François Furet a préparé le terrain à cette relecture idéologique en fustigeant la vulgate "lénino-jacobine" des historiens supposément marxistes et en ne voulant retenir de la Révolution que "les droits de l'homme". Paradoxalement, ce sont les historiens anglais ou américains qui contestent avec le plus de vigueur "le révisionnisme furetien". Dans deux longs articles critiques parus en septembre 2004 dans la London Review of Books (septembre 2004), le Britannique Perry Anderson voit en Furet "le joueur de flûte intellectuel qui aurait converti l'intelligentsia hexagonale au libéral-capitalisme et, par là, affadi la culture française".

Quatre mois après les cérémonies du Bicentenaire, le mur de Berlin chute. L'Union soviétique s'effondre, et l'utopie communiste avec elle. Un nouveau monde globalisé émerge, censé donner naissance à une humanité "festive, plurielle et métissée". Celui-ci marque en fait le triomphe d'un individualisme consumériste en passe d'affranchir l'homme de tous les déterminismes et de détruire les nations. Dès 1992, l'essayiste néoconservateur américain Francis Fukuyama théorise ce nouvel ordre mondial dans son célèbre essai La Fin de l'histoire et le dernier homme. Pour lui, le modèle américain, fondé sur l'alliance du marché et des droits individuels, est le stade ultime de la civilisation. Il ne saurait y avoir d'autre modèle car, selon lui, seule la "démocratie libérale" est capable de satisfaire les aspirations humaines fondamentales. There is no alternative, comme le disait Margaret Thatcher.

Après avoir résisté au début de son premier mandat, François Mitterrand choisit de s'inscrire dans la fin de l'histoire. La France n'a plus vocation à éclairer le monde, mais à se fondre dans la globalisation.

Extrait de "Bienvenue dans le pire des mondes - Le triomphe du soft totalitarisme", de Natacha Polony et le comité Cornwell, publié aux éditions Plon, novembre 2016. Pour acheter ce livre, cliquez ici

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