Pénurie de filles en Chine : qu'à cela ne tienne, l'Empire du Milieu a déjà connu le problème et à l'époque les femmes prenaient... plusieurs maris <!-- --> | Atlantico.fr
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Le pays compte 33 millions d'hommes de plus que de femmes. Une disproportion qui mène notamment à une certaine déprime chez les hommes, alors que le mariage reste socialement très valorisé.
Le pays compte 33 millions d'hommes de plus que de femmes. Une disproportion qui mène notamment à une certaine déprime chez les hommes, alors que le mariage reste socialement très valorisé.
©Reuters

Ménage à trois

Dans la Chine des 18ème et 19ème siècles, il n'était pas rare, bien qu'interdit, que certains couples "engagent" un mari supplémentaire pour subvenir à leurs besoins.

On le sait : la Chine a un problème de sex-ratio. Le pays compte 33 millions d'hommes de plus que de femmes. Une disproportion qui mène notamment à une certaine déprime chez les hommes, alors que le mariage reste socialement très valorisé. Mais cet écart de population par sexe dû à ce déficit de femmes n'est pas nouveau. Si la politique de l'enfant unique a contribué à élargir cet écart, la Chine a déjà connu une situation similaire aux XVIII et XIXème siècles, rapporte le site Quartz. Restait alors une solution, inconcevable aujourd'hui : la polygamie féminine, autrement appelée polyandrie.

Ce célibat de masse chez les hommes, appelé Sheng nuen Chine, a déjà eu lieu plusieurs siècles durant, sous la dernière des dynasties chinoises, la dynastie Qing. Mais il n'était pas rare que les Chinoises s'unissent avec deux maris à la fois, voire davantage. La polyandrie, bien qu'interdite par l'Empereur, était surtout pratiquée et acceptée dans les provinces agricoles. Comme on l'apprend dans Polyandry and Wife Sale in Qing Dynasty China, le livre de l'historien Matthew Sommer de l'Université de Stanford (Californie, États-Unis), il arrivait bien souvent qu'un ménage à trois soit créé en cas de difficultés financières au sein du couple ou d'incapacité de travail chez le mari.

©Xiamen, 1871 (John Thompson, Wellcome Library, London, licence CC 4.0)

Gagnant-gagnant

Il faut dire que la vie n'était pas facile pour les paysans de l'Empire du Milieu. Entre 1700 et 1850, la population chinoise triplait tandis que la superficie des zones cultivées n'avait que doublé. L'exploitation intensive des terres paysannes menaient à leur appauvrissement et à terme, à de mauvais rendements. Des conditions de travail difficiles et un bas salaire qui plongeaient des milliers de familles dans la misère, et poussaient souvent les nouveaux parents à tuer leur nouveau-né lorsque celui-ci se révélait être une fille. Les familles avaient le plus souvent le choix entre vendre leurs enfants ou accueillir un mari supplémentaire à la table. L'opportunité était grande pour les hommes célibataires, qui devaient traditionnellement s'acquitter d'une lourde somme au moment du mariage. Celle-ci était alors allégée.

Matthew Sommer raconte dans son livre comment un couple de fermiers, Guoshung Zheng et Shi Jiang, avaient "adopté" un deuxième mari. Guoshung devenant aveugle, sa femme s'était unie une deuxième fois avec un homme célibataire, Yilang Jiang (pas de lien de parenté). Celui-ci profiterait des avantages du couple – comme le sexe, ne nous y trompons pas – et devrait faire marcher la ferme en contrepartie. Une fois son égo mis de côté, Guoshung pourrait alors continuer à vivre des revenus de l'exploitation. Le ménage à trois avait ainsi fonctionné durant 28 ans, avant que le pauvre Guoshung ne décède. Entre temps, Shi avait donné naissance à deux enfants, sans qu'on connaisse de quel père ils étaient issus. Un avantage de plus pour Yilang Jiang, qui pouvait alors compter sur sa descendance pour veiller sur lui durant ses vieux jours. Des mariages arrangés qui donnaient ainsi parfois lieu à de véritables histoires d'amour.

©(John Thompson, Wellcome Library, London, licence CC 4.0)

Et aujourd'hui ?

Et justement. Tous ces cas de polygamie ne se déroulaient pas toujours aussi sereinement, jalousie oblige. Il apparait que bon nombre d'entre eux finissaient mal, à la suite du meurtre du premier mari par le deuxième, ou inversement. Les historiens ne disposent que de très peu de traces écrites, car les paysans étaient en grande majorité illettrés et les hautes sphères étatiques cultivées ne s'intéressaient que très peu à leur sort.

La polyandrie, bien moins répandue que la polygynie (un homme et deux femmes), subsiste toutefois dans quelques régions du globe, comme au Tibet (où elle est illégale) ou au Bhoutan (légale mais peu pratiquée). Alors, la polyandrie pourrait-elle faire son retour en Chine ? Une proposition qu'un professeur d'économie chinois, Xie Zuoshi, avait formulée fin 2015, afin de contenter les plus de 30 millions de célibataires. Il s'était alors fait lyncher sur les réseaux sociaux, notamment par des militants féministes et LGBT qui avaient qualifié ces propositions de discriminatoires, sexistes et hypocrites.  

Les Chinois devront prendre leur mal en patience. 

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