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Edouard Philippe : "Les attaques portées au cours de cet entre-deux tours ont déçu certains membres dans l'équipe Juppé"
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Sans hésitation

Alors que s'est tenu ce jeudi 24 novembre le débat du second tour entre Alain Juppé et François Fillon, Edouard Philippe, membre de l'équipe Juppé, nous livre son analyse sur l'avenir de la droite à l'issue de la primaire.

Édouard Philippe

Édouard Philippe

Édouard Philippe est un homme politique membre du parti Les Républicains. Il est député de la 7e circonscription de la Seine-Maritime, maire du Havre, président de la communauté de l'agglomération havraise et porte-parole d'Alain Juppé.

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Atlantico : Alors que la tonalité de la campagne de cet entre-deux tours a gagné en intensité, avec des attaques d'un côté comme de l'autre non pas sur les propositions mais sur les convictions, quel avenir peut-on imaginer pour la droite après le second tour ?

Edouard Philippe : Je n'ai aucun doute sur le fait que quel que soit le vainqueur de la primaire, l'union sera complète dès dimanche soir et sans équivoque. Je le sais parce que même s'il y a des différences sur le fond et la méthode entre les deux projets qui sont en lice, les candidats ont beaucoup d'estime l'un pour l'autre et une assez large convergence de vues sur de nombreux sujets. Par ailleurs, la dynamique de la primaire conduit à ce que le candidat qui a été désigné légitimement soit porté par l'ensemble des forces en présence. J'observe que François Fillon et Nicolas Sarkozy ne se sont pas échangés que des amabilités avant le premier tour ni même avant la primaire et cela ne leur interdit absolument pas au soir du premier tour de préserver l'union. 

Il y a certes des différences entre les projets mais elles sont essentielles : soit il n'y a pas de différences entre les projets et alors il est inutile d'organiser une élection, soit il y a des différences entre les projets et auquel cas il faut les présenter. C'est ce qu'Alain Juppé cherche à faire : présenter ses différences sur le fond et sur la méthode. 

Quelles ont été les réactions au sein de l'équipe de campagne de François Fillon sur les différentes attaques de cet entre-deux tours ? 

Tous les membres de l'équipe d'Alain Juppé sont soucieux de faire en sorte que le débat porte sur les aspects programmatiques. Mercredi soir au 20h de TF1, Alain Juppé est resté exactement sur cette-ligne là : très calmement et respectueusement, il pointe des désaccords, il pose des questions et il expose ses différences de méthode et de fond. 

Les différentes attaques portées au cours de cet entre-deux tours ont évidemment déçu certains membres dans l'équipe Juppé, qui ont considéré que le curseur était parti un peu loin et ont indiqué qu'ils souhaitaient que le débat porte exclusivement sur les différences de projet et de méthode. Ils l'ont dit soit directement au candidat soit publiquement. Mais une fois qu'ils ont fait valoir leurs désaccords, ils sont restés dans l'équipe. 

Quelles sont les positions d'Alain Juppé qui vous semblent incompatibles avec celles de François Fillon ?

Incompatibles, je ne sais pas… Je n'aurais jamais employé ce terme. Mais il y a des différences, oui. Dans le projet de François Fillon, je ne vois pas comment certaines mesures pourraient être prises sans bloquer le pays et sans interdire les autres réformes nécessaires. Ne pas prévoir de recrutements dans la police et la magistrature, dans la situation d'insécurité et face au risque que connait la France ne nous semble pas réaliste. Dire aux fonctionnaires qu'ils vont travailler plus pour compenser 500 000 suppressions de postes et ne pas les payer à la hauteur de l'activité supplémentaire exercée nous semble de nature à susciter le rejet, l'incompréhension et donc à bloquer le pays brutalement. Nos différences portent également sur la politique étrangère, la relation à construire avec l'Allemagne, l'éducation, la santé, la fiscalité. Sur ces sujets, nous nous interrogeons sur la capacité de François Fillon à appliquer ce qu'il dit. 

Pendant quasiment deux ans, et en tout cas pendant les six derniers mois, nous avons été les favoris de cette primaire. A chaque fois que nous formulions une proposition, nous étions bombardés de questions – à juste titre d'ailleurs - : c'est aussi ça être favori, c'est passer au scanner de la curiosité publique. Désormais, François Fillon est l'archi-favori de ce second tour et il passe lui aussi d'une certaine façon au crible des questions qui sont posées sur son projet et ses déclarations. Il ne faut pas que la situation devienne tendue, mais il faut qu'il y ait un débat, et un débat c'est une explication. On peut le faire de façon très calme et respectueuse, mais il faut le faire. 

En quoi Alain Juppé incarne-t-il une droite différente de celle qu'incarne François Fillon ? Pourquoi la droite qu'il incarne semble-t-elle être plus en adéquation avec la demande des électeurs ?

Il incarne une préoccupation un peu différente de celle de François Fillon : est-ce qu'on fait un programme intellectuellement parfait, ambitieux, ou est-ce qu'on conçoit un programme en se disant que l'important c'est de le mettre en œuvre ? Il y a une vraie différence d'approche. Alain Juppé, pour plusieurs raisons, notamment liées à son expérience de 1995, considère que c'est très bien de faire un beau programme mais que c'est plus important, ou au moins aussi important, de se demander comment le mettre en œuvre. 

Dans ces deux droites dont on parle parfois – il y en a d'ailleurs selon moi plus que deux -, il y a celle de François Fillon, qui conçoit et affirme la nécessité d'un choc libéral et qui apparaît attachée au respect et au maintien de certaines valeurs qui sont les siennes et il y a une deuxième droite qu'Alain Juppé qualifie de moderniste et qui est plus tournée vers la transformation de la société que vers la conservation de certaines valeurs. Cela n'a rien de nouveau et ne va pas s'arrêter dimanche soir. 

Les électeurs trancheront. Ce sont eux qui diront la vérité, qui détermineront la ligne de démarcation. C'est un processus démocratique sur lequel nous nous sommes mis d'accord et que chacun respecte. Voilà un facteur d'union très fort. Je ne suis pas certain qu'à gauche ils parviennent aussi bien à se mettre d'accord. En effet, à gauche, plusieurs candidats ne souhaitent pas participer à la primaire, ce qui n'a pas été pas notre cas : nous avons tous considéré que malgré nos différences de personnalité, de projet, nous avions beaucoup de points communs et pouvions participer collectivement à un processus démocratique. C'est pour cela que je n'ai aucun doute sur la force, la solidité et la dynamique de l'union dimanche soir après le second tour. 

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