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La primaire à gauche patinera-t-elle jusqu'à ne jamais démarrer ?
©Reuters

Tic Tac

Alors que plusieurs personnalités sont d'ores et déjà candidates à la primaire socialiste en vue de l'élection présidentielle de 2017, la campagne a du mal à s'emballer à gauche. Parmi les principales raisons qui expliquent ce "flou" actuel, la distance prise par François Hollande. Une attitude qui est tout sauf un hasard pour le président de la République.

Frédéric  Métézeau

Frédéric Métézeau

Frédéric Métézeau est journaliste depuis 15 ans. Il a été journaliste pour France Bleu Nord, basé à Lille, et a présenté les informations sur France Inter avant devenir chef du service politique sur France Culture. Depuis août 2015, il est chef du service politique de France Inter.

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Atlantico : Si la primaire de la gauche avait connu un certain regain d'intérêt ces dernières semaines suite aux annonces successives des candidatures, il semble que la campagne n'ait pas encore vraiment débuté du côté des concurrents de François Hollande. Comment peut-on expliquer cette "inaction" selon vous ?

Frédéric Métézeau : L'inaction dont vous parlez est principalement due à "l'absence" de François Hollande. Tant que le candidat principal (le plus attendu) n'est pas déclaré, cela crée une drôle de campagne, comme on a eu une "drôle de guerre" en 1940. On avait d'ailleurs ressenti sensiblement la même chose à droite tant que Nicolas Sarkozy n'avait pas officialisé sa décision de concourir à la primaire de la droite et du centre. La primaire avait alors du mal à se lancer. Cette attente, ces incertitudes, sont donc principalement liées au fait que François Hollande n'a pas encore fait part de sa décision.

Plusieurs autres éléments d'explication peuvent également être avancés ici. Ainsi, quelle est la différence fondamentale entre l'offre d'Arnaud Montebourg et celle de Benoît Hamon, eux qui sont rentrés et sortis du gouvernement en même temps… ? Forcément, quand il y a un souci de visibilité entre deux candidats, c'est un problème.

Troisièmement, et sans leur faire injure car ce sont par ailleurs des gens de conviction, avec un esprit militant, et qui travaillent leurs dossiers, Marie-Noëlle Lienemann et Gérard Filoche sont encore assez peu connus du grand public. Cela n'aide pas à faire une primaire aussi "intéressante" que celle de la droite, où nous avons parmi les candidats un ancien président de la République, deux anciens Premiers ministres et une flopée d'anciens ministres.

Y a-t-il encore une petite chance que cette primaire n'ait finalement pas lieu, elle qui serait inédite dans l'histoire de la Vème République avec un Président en exercice parmi les concurrents ?

Je ne sais pas si l'absence d'une primaire de la gauche serait une chance ou une malchance. Parlons donc plutôt de possibilité. Je pense qu'il y a toujours une possibilité que cette primaire n'ait pas lieu, en raison soit d'une crise majeure dont on n'est jamais à l'abri, soit de sondages qui donneraient en décembre la gauche assurément éliminée au premier tour. La seule façon de mettre tout le monde d'accord et de passer outre la primaire, c'est si François Hollande était très populaire et en très bonne position pour être réélu. Or, ce ne sera sans doute pas le cas en décembre, il ne pourra pas refaire son retard. Mais imaginons que François Hollande serait disqualifié, qui pourrait être mis à sa place ? Il faudrait bien alors une sélection.

S'il a longtemps appelé de ses vœux l'organisation d'une primaire, Arnaud Montebourg entretient malgré tout le flou sur sa participation, en réclamant strictement les mêmes conditions qu'en 2011. Comment interpréter cette posture ? Pourrait-il réellement, politiquement et financièrement, faire campagne pour 2017 en-dehors du Parti socialiste ?

D'un point de vue politique, ce serait difficile pour lui puisqu'il a été le grand défenseur de la primaire en 2011, qu'il a portée au plus haut sommet du Parti socialiste. Deuxième, s'il partait tout seul dans la course à la présidence, il lui faudrait alors se différencier d'une part de Jean-Luc Mélenchon (déjà déclaré), et d'autre part du candidat issu de cette primaire socialiste. Je pense donc qu'il s'agit avant tout d'un positionnement tactique de sa part, plus que stratégique. Il fait monter les enchères. Il est pour l'instant la seule "star" de cette primaire avec son bagou et son enthousiasme, il peut mettre en avant son score de 17% à la primaire de 2011… Étant donné qu'il est un petit peu "l'attraction" de cette primaire, c'est dans son intérêt de se mettre au centre du jeu et de faire monter les enchères.

Deuxièmement, d'un point de vue financier et logistique, il est compliqué de faire campagne de nos jours. Emmanuel Macron, malgré ses puissants réseaux, a encore besoin de récolter beaucoup de fonds, n'étant pas adossé à un parti ou un micro-parti. Jean-Luc Mélenchon, de son côté, a du mal à réunir les 500 signatures.

S'il fait cavalier seul, Arnaud Montebourg risque donc d'avoir un problème d'argent et un problème de signatures.

Faut-il voir derrière le flou actuel la main de François Hollande ? Le chef de l'État est-il à la manœuvre pour désactiver la concurrence ? Si oui, a-t-il des chances de succès dans cette entreprise ?

Je ne sais pas quels sont les moyens du président de la République pour "désactiver la concurrence" et empêcher les gens d'être candidat, excepté peut-être en leur offrant un poste de ministre... En revanche, il peut jouer la montre. Il l'a dit, c'est le maître de l'horloge. Il sait très bien qu'il lui reste cette possibilité-là. Il ne va sans doute pas dissuader les concurrents, mais il va essayer de les épuiser, de les fatiguer. C'est un petit jeu dans lequel il est encore très fort.

Ensuite, il y a des symboles, des affichages qui ne sont pas anodins. N'oublions pas que mercredi après-midi, il présidait une cérémonie de réhabilitation des mineurs de 1948 en présence de Christiane Taubira. C'est un moyen de "neutraliser" quelque part des candidats qui se veulent plus de gauche que lui.

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