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Espagne, Royaume-Uni et les autres… Le suicide électoral des gauches européennes
©www.flickr.com/photos/matthigh/2772052540

Coup de la corde à linge

A chaque scrutin, qu'il soit local, régional, national ou européen, les partis sociaux-démocrates européens ne cessent de reculer. La crise que connaît depuis plusieurs années maintenant à l'échelle européenne la social-démocratie affecte l'ensemble des partis de gauche. Un phénomène aggravé par les dissensions qui existent au sein même des partis sociaux-démocrates et avec les autres partis de gauche.

Raul  Magni Berton

Raul Magni Berton

Raul Magni Berton est professeur de sciences politiques. Il a enseigné à Paris, Montréal et Bordeaux et enseigne depuis 2009 à l’Institut d’Études politiques de Grenoble. Spécialiste de politique comparée, il travaille sur les régimes, les élections et l’opinion publique, surtout dans les pays européens. Il a publié plusieurs livres et articles dont Démocraties libérales (Economica, 2012) et Que pensent les penseurs ? (PUG, 2015).

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Atlantico : Depuis plusieurs scrutins désormais, et ce dans plusieurs pays européens (Espagne, Grande-Bretagne, France, Allemagne, Italie, etc.), la social-démocratie apparaît en grande difficulté. Dans quelle mesure cela impacte-t-il plus largement l'ensemble des partis de gauche (extrême-gauche, gauche radicale, Front de gauche, écologistes, etc.) ?

Raul-Magni Berton : Cela dépend. Dans les pays du sud de l'Europe, la gauche de la gauche profite largement des difficultés de la gauche dite "traditionnelle". Dans d'autres pays, dont la France, l'extrême-gauche ne profite pas des insuccès du parti social-démocrate. En réalité, si l'on regarde les scores des partis de gauche cumulés, la tendance est clairement à la baisse. Et cela est d'autant plus vrai en France.

Comment s'expliquent les scissions que l'on peut observer à l'échelle européenne entre les partis se réclamant de la social-démocratie et les autres partis de gauche ? A quel point ces tensions sont-elles préjudiciables sur le plan électoral pour les gauches européennes dans leur ensemble ?

Les partis sociaux-démocrates ont épousé la cause européenne et l'ouverture des frontières. L'internationalisme a toujours été une valeur de gauche. Cependant, cela a conduit à une perte de souveraineté qui réduit fortement la marge de manoeuvre pour faire des politiques redistributives. D'autres partis de gauche ont fait marche arrière sur ce point : les politiques redistributives sont prioritaires par rapport à l'internationalisme. C'est là-dessus que les deux types de gauches s'opposent. 

Cette compétition des deux gauches peut conduire à accroître le soutien à la gauche en général - comme cela se passe en Espagne ou, surtout, en Italie - mais il peut également l'affaiblir. Je pense que la présence d'un parti de droite souverainiste est l'une des raisons qui explique l'affaiblissement de la gauche. Mais une deuxième raison est l'absence d'une réelle compétition à gauche. Les deux gauches s'opposent, mais en fin de compte s'allient souvent et, sur le long terme, cela ne profite à aucune des deux.

Les difficultés auxquelles les gauches européennes font face sont-elles les mêmes d'un pays à l'autre, ou bien observe-t-on des particularités propres à chaque pays ? Si oui, quelles sont-elles ?

La crise des partis social-démocrates ne doit pas être exagérée. Dans plusieurs pays, ils sont au gouvernement, et dans d'autres ils sont en course pour y revenir. En fait, la gauche traditionnelle n'est pas beaucoup plus en crise que la droite traditionnelle, qui, elle aussi, perd des voix sur le long terme. Ce qu'on observe un peu dans tous les pays, c'est la baisse en voix des partis traditionnels et la montée de l'abstention. Les variations entre pays, donc, sont surtout liées aux partis qui profitent de cette situation.

Dans quelle mesure les autres partis politiques profitent-ils de ce que l'on pourrait appeler le "suicide des gauches européennes" ?

Encore une fois, le terme "suicide" est fort, surtout face à des droites européennes qui elles aussi ont du mal. Mais il est vrai que, partout, les partis plus sensibles aux questions liées à la souveraineté bénéficient plus des échecs des gouvernements de gauche que de ceux de droite. 

J'ai par ailleurs écrit sur ce point un court billet dans le blog slowpolitix auxquels je vous renvoie.

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