François Kalfon : “Progressivement, Arnaud Montebourg apparaîtra aux yeux de tous comme le vote utile, un airbag anti-21 avril. Lui seul à gauche peut battre Nicolas Sarkozy.”

Atlantico : Que révèle ce sondage "secret" commandé par le Parti socialiste, réalisé par l'Ipsos et révélé ce jeudi par Le Point ? 

François Kalfon : Il s'agit d'un sondage réalisé par un institut dont la réputation n'est plus à faire sur la base d'un échantillon robuste. Il indique deux éléments principaux. Tout d'abord, il montre que le rejet de François Hollande parmi ceux qui étaient ses électeurs en 2012 est massif et récurrent. Deuxièmement, il révèle qu'il existe aux yeux des électeurs de François Hollande en 2012 et des électeurs de la primaire de 2011, une alternative claire et incarnée par la personne d'Arnaud Montebourg. 

En effet, Arnaud Montebourg, selon cette enquête incontestable, apparait comme le challenger émergeant en tout hypothèse, qui l'emporterait dans tous les cas de figure face à François Hollande sur un corps électoral comparable à celui des primaires de 2011.  

Pour autant, selon ce même sondage, 72% des électeurs du PS voteraient pour François Hollande. Quand on sait que ce sont avant tout les sympathisants du PS qui votent lors de la primaire, à quel point cela peut-il représenter une faiblesse pour Arnaud Montebourg ? 

En fait, ceux que l'on nomme aujourd'hui les sympathisants socialistes, c'est l'électorat résiduel du Parti socialiste qui, compte-tenu de l'impopularité du parti, se résume aujourd'hui au parti d'un président impopulaire. Dans ces conditions, le score de 72% apparait même faible car près de sept électeurs de 2012 sur dix ne se revendiquent aujourd'hui plus comme proches des socialistes. La grande majorité des électeurs de François Hollande en 2012 formule dans cette enquête un autre choix : celui d'Arnaud Montebourg qui apparait comme fidèle aux valeurs de la gauche et au discours du Bourget, mais également comme une figure en capacité de gouverner car sa "présidentialité" est clairement constituée. A l'inverse, dans cette même enquête, d'autres candidatures "gauche de la gauche" ne recueillent qu'un soutien limité de la part des électeurs de la primaire. 

Aujourd'hui, selon les enquêtes de simulation présidentielle, dans tous les cas de figure, François Hollande est systématiquement éliminé au soir du premier tour de l'élection présidentielle car il existe un divorce entre sa personne, sa politique et le peuple français.

Ce sondage indique bien qu'il existe une alternative crédible que les électeurs socialistes peuvent désormais saisir pour conjurer le mauvais sort et permettre à la gauche d'être présente au second tour. En effet, pour un électeur socialiste, rien n'est pire que d'avoir à arbitrer un duel anxiogène entre Mr Sarkozy et Mme Le Pen. Il faut donc changer de pied. C'est pourquoi, progressivement, Arnaud Montebourg apparaitra aux yeux de tous comme le vote utile, un airbag anti-21 avril. Lui seul à gauche peut battre Nicolas Sarkozy.

Le fait qu'Arnaud Montebourg ne bénéficie pas du soutien du PS et de ses sympathisants ne vous semble donc pas être un obstacle ? 

On peut tordre le sondage dans tous les sens mais il n'empêche que parmi les répondants "certains d'aller voter", Arnaud Montebourg est largement en tête. La méthode des instituts de sondage éprouvée consiste à interpeller un corps électoral potentiel large en "ventilant" les choix entre les différents candidats parmi la catégorie des "certains d'aller voter". Avec cette même méthode, les instituts de sondage ont donné le bon résultat en 2011 lors de la primaire de la gauche. Il y a donc tout lieu de considérer que les mêmes causes auront les mêmes effets et que cette méthode qui s'applique également dans la primaire des Républicains s'avère juste et tout à fait crédible. 

Qu'a appris Arnaud Montebourg de la primaire de 2011 qui pourrait changer la donne aujourd'hui ?

Tout d'abord, Arnaud Montebourg a réalisé un score très impressionnant en 2011puisqu'avec plus de 17%, il totalisait trois fois plus de voix que l'actuel Premier ministre. La raison ? Arnaud Montebourg dispose d'une véritable équation personnelle et d'un rapport naturel et sans filtre aux Français. Entre temps, Arnaud Montebourg, qui présente incontestablement les qualités de candidat, s'est densifié non seulement au regard de son expérience que de la largeur du spectre des thèmes qu'il aborde. En 2011, il était le candidat de la démondialisation. Aujourd'hui, dans un discours robuste et foisonnant, Arnaud Montebourg traite aussi bien de la question du vivre-ensemble, des sujets régaliens comme la défense ou le terrorisme, de thèmes économiques, sociaux et environnementaux, que de son point fort sur le réarmement industriel de notre pays par le "Made in France".

C'est donc un candidat prêt à gouverner qui se présente aux Français et les électeurs potentiels de la primaire de la gauche ne s'y trompent pas en le plaçant en tête au second tour face à tous les candidats qui lui sont opposés.

Naturellement, restons calme : il s'agit d'une photographie à l'instant donné. Tout reste à faire mais la potentialité est là. Il la reçoit comme un encouragement à consolider sa relation avec les Français. 

Propos recueillis par Emilia Capitaine