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500 milliards ?! Erreur sur l'addition, le vrai coût du mandat de Nicolas Sarkozy
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Le juste prix

Selon l'hebdomadaire Marianne qui le placardait partout cette semaine, le coût du mandat de Nicolas Sarkozy se chiffrerait à 500 milliards d'euro. La facture distingue-t-elle ce qui concerne la crise économique et les décisions propres du Président ?

Charles Beigbeder

Charles Beigbeder

Charles Beigbeder est président de la Fondation du Pont-Neuf. Président de sa holding industrielle et financière, Gravitation SAS, Charles Beigbeder est engagé dans plusieurs mouvements liés à l'entreprise et à la vie de la cité.
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Nicolas Sarkozy est encore Président de la République jusqu’au 6 mai prochain, pourtant déjà les dresseurs de bilan, redresseurs de torts à leurs heures perdues, se sont lancés, chiffres à l’appui, à l’assaut des cinq années de 2007 à 2012.

Connaissant le pouvoir des nombres, qui saisissent bien plus facilement que les mots dans une société habituée au sensationnalisme, le magazine Marianne a baptisé le Président, "l’homme qui a coûté 500 milliards", lui attribuant la quasi-totalité de la hausse de la dette depuis 2007. Quoi de plus facile dans cette période troublée que de lier Nicolas Sarkozy et l’endettement du pays, pour dissoudre les réformes entreprises, amoindrir la portée de son action, retourner à l’immobilisme douillet. Parce que la manipulation doit être dénoncée, reprenons ces chiffres, et les raisons de la hausse de la dette entre 2007 et 2012.

Un cadeau empoisonné, le poids de l’immobilisme

Au premier jour était un fardeau empoisonné, un héritage non désiré, trente ans de "mauvaise gestion" de gauche comme de droite, évalués à 370 milliards d’après les journalistes de Marianne eux-mêmes. La piètre gouvernance est dotée d’une incroyable inertie, celle d’un véhicule lancé à pleine vitesse. En arrêter la course d’un freinage brutal aurait été inenvisageable, à moins de licencier sans préavis des millions de fonctionnaires ou de mettre fin du jour au lendemain à l’Etat providence. Est-ce le refus de ces extrémités que l’on reproche au Président, pour lui attribuer les fruits pourris d’un arbre qu’il n’a pas planté ?

Les dépenses, et plus particulièrement les dépenses sociales, parfois engagées il y a des décennies produisent leurs effets encore aujourd’hui ; de manière très concrète la population vieillit. Ce n’est pas pour rien que la Sécurité sociale a inventé l’ONDAM, objectif national des dépenses d’Assurance maladie, pour juguler sa folle croissance. Toutefois c’est sous Nicolas Sarkozy, en 2011, que l’ONDAM a été respecté pour la première fois depuis sa création, alors que depuis 1997 le dépassement était de 1,5 milliard d’euros en moyenne ; c’est sous Nicolas Sarkozy que la Revue générale des politiques publiques a permis de réduire le nombre de fonctionnaires ; c’est enfin sous Nicolas Sarkozy que la réforme des retraites a permis d’assurer la pérennité, même temporaire, d’un système voué à l’implosion rapide dans son schéma de fonctionnement précédent.

Que celui qui a vu la crise, jette la première pierre

Au second jour était la crise. La crise c’est la conjoncture, les ménages comme les entreprises ont des rentrées d’argent plus faibles, les recettes de l’impôt et des cotisations plongent, tandis que les dépenses sociales, spécialement l’indemnisation du chômage, explosent. Il semblerait difficilement crédible de pointer une quelconque responsabilité de l’exécutif dans ce mouvement. Même si le bon sens impose de construire les budgets de l’Etat avec une certaine précaution, nul ne pouvait s’attendre à un tel chaos à partir de 2008. Pour rappel, l’Allemagne qui avait atteint l’équilibre budgétaire en 2008 a affiché un déficit de 6% en 2010. La crise aura au total représenté 109 milliards d’euros pour la France.

Et puis la crise, c’est celle des subprimes, crédits hypothécaires vendus aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en Espagne mais pas en France. S’il s’agit de dresser de manière scientifique le bilan d’un chef d’Etat, ne faudrait-il pas y ajouter l’argent qu’il a fait économiser à son pays en ne jouant pas le jeu dangereux du crédit irresponsable pour les ménages ? Ne pourrait-on pas mettre à son crédit la sagesse d’un sauvetage des banques qui a rapporté (sic) 2 milliards d’euros quand il en aura coûté plus de 50 outre Manche ?

Des réformes coûteuses mais payantes

Il reste alors 150 milliards de décisions et de choix budgétaires à analyser. D’abord la baisse des prélèvements obligatoires décidée en 2007, laquelle n’a été analysée que par le biais du bouclier fiscal. Or celui-ci représente moins de 4% de cette baisse d’impôts de 52 milliards d’euros, les principaux points étant la défiscalisation des heures supplémentaires, le crédit d'impôt sur le revenu des intérêts d'emprunt immobilier, l’allègement des droits de succession pour les petits et moyens patrimoines ou encore la défiscalisation des salaires des étudiants, autant de mesures à destination de la classe moyenne, qui était la principale victime des précédentes hausses d’impôt.

Ensuite les grandes réformes visant à redonner de la compétitivité à court-terme au secteur industriel français ont eu un coût. Il s’agit du renforcement du crédit impôt recherche qui a exigé plus de 2 milliards d'euros en 2011 mais entraîne 2 à 3 euros d’investissements privés pour 1 euro de dépenses. Depuis 2008, la croissance des dépenses de R&D des entreprises est d’ailleurs supérieure à celle du PIB, ce qui n’avait pas été le cas sur période 2000-2008. Dans le même temps, la suppression de la taxe professionnelle pour 5 milliards d’euros par an à partir de 2010 a permis de libérer les investissements. Les collectivités locales ont vu, par ailleurs, compenser entièrement leurs pertes de recettes. Ces réformes ont fonctionné puisque la part des exportations françaises dans les exportations à l’intérieur de la zone euro qui a commencé à s’éroder à partir de 1992, puis a lourdement chuté entre 1999 et 2007 passant de 17% à 12,5%, s’est stabilisée depuis 2007.

Enfin, le grand emprunt, 35 milliards, a servi à financer les nouveaux programmes d'investissement dans des secteurs d'avenir. L'enseignement supérieur et la formation en ont été les principaux bénéficiaires avec 11 milliards, de même que l'industrie avec 6,5 milliards d'euros, notamment en faveur des pôles de compétitivité et des PME innovantes ou le développement durable et l'économie numérique à hauteur de 5 milliards et 4,5 milliards.

Ainsi, le bilan de Nicolas Sarkozy est celui de réformes nombreuses, des universités, des hôpitaux, des tribunaux, d’une volonté de freiner la croissance des impôts et des dépenses publiques dans un pays recordman du monde en la matière. Certes certaines d’entre elles auraient pu être encore approfondies, sans doute la baisse de la TVA dans la restauration aurait pu trouver meilleur usage, mais sérieusement, après l’immobilisme mortifère qui caractérisa les mandats précédents, cette énergie salutaire a bien plus apporté que coûté à notre France.

Charles Beigbeder vient de publier l'ouvrage intitulé Puisque c'est impossible, faisons le. Editions JC Lattès (janvier 2012)

Charles Beigbeder est l'un des actionnaires d'Atlantico. 

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