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Trop Français pour les uns, trop sioniste pour les autres : pourquoi le voyage de Manuel Valls en Israël et dans les territoires palestiniens ne sera pas une partie de plaisir
©Reuters

Vœu pieux

Une semaine après le déplacement de Jean-Marc Ayrault, le Premier ministre français se rend à son tour en Israël et dans les territoires palestiniens. Après l'accueil glacial réservé au ministre des Affaires étrangères, cette visite vise à empêcher l'échec de l'initiative française d'organisation d'une conférence pour la paix au Proche-Orient.

Gil  Mihaely

Gil Mihaely

Gil Mihaely est historien et journaliste. Il est actuellement éditeur et directeur de Causeur.

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Atlantico : Une semaine après Jean-Marc Ayrault, Manuel Valls est jusqu'au mercredi 25 mai en voyage officiel en Israël et dans les territoires palestiniens. Quel est l'objectif de ce déplacement et quelles en seront les principales étapes ?

Gil Mihaely : La conférence ministérielle sur la paix au Moyen-Orient (dont la France est le principal promoteur) constitue un enjeu important pour la diplomatie française. Il est donc tout à fait normal que la France mette tout en oeuvre pour que cet événement et l’initiative derrière réussissent. Ces deux déplacements en sont la preuve. L’objectif de la France est de s’imposer de nouveau dans le jeu diplomatique proche-oriental. Rappelons que depuis l’automne dernier, la France est exclue des négociations sur le dossier syrien et que même dans les négociations sur le nucléaire avec l’Iran, la France a été marginalisée alors que les Etats-Unis étaient en première ligne. Il y a donc une opportunité à saisir : Washington est hors-jeu d’ici fin janvier prochain (date à laquelle un nouveau président s’installera à la Maison blanche). Paris peut donc essayer de tirer la couverture (surtout médiatique) à elle et gagner quelques points dans les opinions publiques arabes. Valls et Ayrault ont donc pour mission d’éviter que les principaux intéressés (Palestiniens et Israéliens), pourtant non invités à Paris, ne torpillent l’initiative trop tôt car sinon Paris n'en tirera aucun mérite.                 

Les relations franco-israéliennes sont actuellement tendues et le Premier ministre israélien a mis en doute récemment l'"impartialité" de l'initiative française visant à organiser une conférence internationale pour relancer le processus de paix entre Israéliens et Palestiniens. L'image favorable dont jouit le Premier ministre français en Israël (du fait notamment de ses prises de position contre l'antisémitisme) suffira-t-elle à susciter l'adhésion de Benyamin Netanyahou au projet français ? A quel point les relations entre la France et Israël sont-elles dégradées ? 

En Israël, le poids diplomatique de la France et de l’Europe est faible. Les liens de l'état hébreu sont beaucoup plus forts avec des pays comme les Etats-Unis (où d'ailleurs les bonnes relations ne se limitent pas aux chefs d'Etat mais concernent tout un ensemble d'officiels), la Russie (et la promotion d’Avigdor Liberman va dans ce sens), l’Egypte, l’Arabie Saoudite, la Jordanie, la Chine et l’Inde. Quant aux relations franco-israéliennes, elles sont certes empreintes de tensions mais il ne faut pas oublier que sur un dossier très important pour Israël et notamment pour Netanyahou, l’Iran, les positions françaises et israéliennes étaient proches.     

Quel est le contexte politique israélien actuel ? Dans quelle mesure est-il susceptible de mettre à mal tout réchauffement franco-israélien ?

Au moment où je vous réponds, les choses ne sont pas encore claires mais il semblerait que Netanyahou ait fait le choix d’un gouvernement de droite dure plutôt que d'une ouverture au centre. Cependant, Avigdor Liberman (le nouveau ministre de la Défense) est un "joker", une carte imprévisible. Il est tout à fait capable, comme Arik Sharon, de tenir un discours radical en public et de se montrer pragmatique dans le cadre de négociations privées.         

Qu'en est-il dans les territoires palestiniens ? Manuel Valls y a-t-il une bonne image ? N'a-t-on pas des raisons sérieuses de penser que le Premier ministre y sera accueilli froidement ?

Les Palestiniens ont intérêt à profiter du contexte politique israélien pour démontrer qu’Israël n’est pas un partenaire crédible pour des négociations de paix du fait de la composition du gouvernement et de la majorité. Ce serait donc une grave erreur de créer un incident avec Valls ou de l’accueillir froidement. Du point de vue de la communication, Israël fait le travail pour eux, il ne leur reste qu'à ne pas gâcher cette opportunité. 

Si le bilan diplomatique de cette visite risque de s'avérer nul, que peut-on néanmoins en attendre ? 

Il faudrait faire le bilan plus tard, il est peu probable que la France annule son initiative au retour de Valls même si le voyage s’est mal passé… Au contraire. Je pense que tout le monde (en Europe) est convaincu qu’Israël va ralentir le processus et essayer de faire échouer cette initiative. Cette éventualité est donc le point de départ de la réflexion (sinon, ils sont vraiment nuls). La stratégie consiste donc à accentuer la pression sur Jérusalem pour créer une dynamique à laquelle même le prochain locataire de la Maison blanche ne pourra pas échapper. Si cette stratégie aboutit à des sanctions auxquelles les Américains s'associent, Israël se retrouvera dans une situation très délicate. Cependant, la fenêtre de tir est étroite et cela fait beaucoup de "si".                

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