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L'antibiorésistance, ce phénomène qui effacera 150 ans de progrès médical si rien n'est fait (mais on travaille à une solution)
©Reuters

Virus vs bactérie

Les antibiotiques sont de moins en moins efficaces.

Dans Richesse et pauvreté des nations, l’historien David Landes raconte comment Nathan Rothschild, le deuxième homme le plus riche de tous les temps, est mort à 58 ans d’une septicémie causée par une banale infection, et qu’on soigne aujourd’hui par le plus simple des antibiotiques.

Les antibiotiques sont en effet des miracles médicaux. A tel point que les médecins peuvent parfois y avoir recours un peu trop facilement : ainsi, en France, 90% des consultations se soldent par la prescription d’un médicament.

Seulement, "les antibiotiques c'est pas automatique." C'est le problème de l'antibiorésistance. La sélection naturelle, darwinienne, fait son office. Plus on bombarde les gens (et les animaux) d'antibiotiques, plus les bactéries deviennent résistantes. De plus en plus d'antibiotiques perdent leur efficacité. Et on découvre certaines bactéries qui résistent à tous les antibiotiques connus. Presque tous les gains en espérance de vie et de bien être que nous avons connus depuis 100 ans viennent des antibiotiques. Si nous perdons l'efficacité des antibiotiques, ce serait une catastrophe de santé presqu'inimaginable.

Aux Etats-Unis, d’après le Center for Disease Control, les bactéries résistantes infectent deux millions de personnes par an, et en tuent au moins 23 000. Les patients âgés et hospitalisés y sont particulièrement vulnérables.

Une solution potentielle : la phagothérapie

Les chercheurs travaillent dur pour essayer de résoudre le problème. Une arme originale : les virus bactériophages (ou phages). « Immense avantage des phages, chacun d’eux ne s’attaque qu’à un type précis de bactérie ; une phagothérapie utilisée contre une infection à staphylocoque doré ne détruira donc que les staphylocoques, en préservant le microbiote naturel du patient. Revers de la médaille, il faut connaître précisément la bactérie qui infecte le patient », raconte Le Figaro.

C’est une bonne nouvelle, mais pourquoi semble-t-il qu’on découvre la guerre entre virus et bactéries ?

Développés au début du XXème siècle, les phages avaient remporté quelques succès contre la dysenterie, le choléra ou la peste bubonique. Mais la petite portée de leur action et l’inadaptation du matériel médical de l’époque avaient conduit les médecins à les abandonner – au profit des antibiotiques, récemment découverts et à l’origine de guérisons remarquables.

En revanche, « dans les pays de l’ancien bloc soviétique, la difficulté de se procurer ces antibiotiques fabriqués à l’Ouest a permis à la phagothérapie de vivre secrètement pendant des années. Mais les travaux des chercheurs de l’Est sont restés longtemps méconnus faute de publications dans des revues scientifiques anglophones », poursuit Le Figaro.

Alors, il a donc fallu attendre l’année 2009 pour qu’un groupe de chercheurs occidentaux se penchent à nouveau sur la question. Ils ont sélectionné vingt-quatre patients atteints d’infections auriculaires chroniques et antibiorésistantes, et leur ont donné une simple dose de phages : très rapidement, la présence de la bactérie a significativement chuté, et les symptômes ont progressivement disparu. Par comparaison, les plus vigoureuses des infections requièrent qu’on prenne des doses quotidiennes d’antibiotiques pendant des semaines.

Des problèmes de réglementation

L’entreprise française Pherecydes Pharma, qui contribue au grand retour de la phagothérapie, a donc passé un contrat avec les égouts de Paris, pour récupérer les eaux usées des hôpitaux. Mais les autorités sanitaires sont strictes, et les phages n’appartiennent pas à la pharmacopée européenne – le recueil de normes communes à l’échelle du Conseil de l’Europe. Cela complique la mise en place d’essais cliniques.

De plus, les virus ont l’immense avantage d’être du vivant, à la différence des antibiotiques qui ne sont que des molécules inertes assemblées par des chercheurs humains. Cela leur permet donc de s’adapter à leur ennemi : les bactéries. Mais cela suppose aussi qu’on ne puisse pas les breveter, ce qui ne suscite pas l’enthousiasme des grands laboratoires pharmaceutiques.

Quoi qu’il en soit, la redécouverte des phages est porteuse d'espoir dans une des luttes les plus importante de la santé publique mondiale au XXIème siècle. 

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