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Etes-vous atteint du syndrome du bien-être ? (Et non, si c’est le cas, ce n’est pas une bonne nouvelle)
©Pixabay / Sciencefreak

Sens-toi bien et tais-toi

Vous êtes accro à la salle de sport ? Vous ne comptez plus les moutons mais vos calories pour vous endormir ? Vous vous sentez coupable de ne pas être suffisamment heureux, et ce malgré tous vos efforts ? Alors vous souffrez sûrement du "syndrome du bien-être", provoqué par un glissement de la norme médicale vers la norme morale.

Carl  Cederström

Carl Cederström

Carl Cederström est enseignant chercheur à la Stockholm Business School. Il est le coauteur de Le syndrome du bien-être (Edition de l'échappée 2016) de Dead Man Working (Zero Books, 2012) et de How to Stop Living and Start Worrying (Polity Press, 2010).

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Atlantico : Quelles formes peut prendre "l'idéologie du bien-être" que vous dénoncez ?

Carl Cederström : "L'idéologie du bien-être" est le fait de se sentir obligé de devoir multiplier les activités saines (salles de sport, cours de yoga), de modifier son mode de vie (alimentation équilibrée, soucis de sa santé…) et sa façon de réfléchir (pensée positive, méditation, pleine conscience) afin d'atteindre un niveau de bien-être optimal que nous impose de plus en plus les sociétés occidentales. On distribue désormais pas exemple sur les campus à mes étudiants des "chartes de bonne santé ", intégrant repas sains, excursions saines, loisirs sains...

Ce qui est problématique, c'est que les activités, les comportements et les façons de penser sa vie ne sont plus de simples loisirs ou des décisions/initiatives personnelles mais sont devenues des normes sociales que tout le monde doit respecter, sous peine d'être marginalisé et catégorisé comme de "mauvaises personnes", au sens moral du terme.

Vous définissez dans votre livre un "syndrome du bien-être". En quoi la recherche du bien-être optimal, loin de produire les effets bénéfiques vantés, provoque-t-elle des effets négatifs sur la personne ?

Etre obsédé par son bien-être génère de la culpabilité et de l'anxiété si, pour une raison ou pour une autre, on fait défaut au régime sain que tout le monde est censé suivre.

L'obsession de l'entretien de son corps peut aussi isoler les individus qui cherchent  à atteindre un niveau de bien-être optimal, car on ne pense plus qu'à sa propre personne et à ses propres performances .

Vous expliquez que cette "idéologie du bien-être" est en réalité révélatrice des transformations de notre société et de notre système économique. Pouvez-vous expliquer le rôle que jouent les acteurs économiques dans le développement de l'idéologie du bien-être ?

Cette idéologie est en réalité révélatrice des transformations de notre société et de notre système économique. Encouragée par les entreprises – la Sillicon Valley et Google sont précurseurs en la matière – elle fait peser sur les individus leurs propres réussites et ainsi leurs propres échecs. Nous avons révélé trois objectifs qui se cachent derrière le développement de "l'idéologique du bien-être" :

1/ Augmenter la productivité des salariés (les travailleurs mieux dans leur peau sont plus productifs) .

2/ Accompagner les réformes néolibérales (en proposant aux citoyens de se préoccuper en premier lieu de leur propre bien-être au détriment de l'action publique et sociale).

3/ Faire accepter un ordre social méritocratique (la réussite ne dépend que de soi).

Vous soulignez le paradoxe entre une société qui fait reposer la réussite d'un individu sur lui-même, alors que sa réussite dépend de nombreux autres facteurs. Pouvez-vous définir de quels facteurs il s'agit ?

Avec le développement de ce diktat du "bien-être", nos sociétés créent en effet plus de frustration, car la réussite ou l'échec de chacun ne dépend pas que de paramètre personnelles, mais aussi du cadre collectif.

Etre né dans une bonne famille fortunée par exemple, permet de fréquenter aux Etats-Unis les meilleurs facultés, et donc d'accéder aux meilleurs postes. L'ascenseur social est complètement bloqué.

Avez-vous des solutions à proposer aux individus qui souffrent du "syndrome du bien-être", pour qu'ils puissent sans sortir ?

Il faut réussir à se décentrer et à réfléchir sur le corps social et politique.
Il est aussi important de ne pas toujours traiter les informations de manière positive. Lorsqu'il s'agit d'événements graves, il est bon de les aborder avec tristesse ou pessismisme, par exemple.
A lire : "Le syndrome du bien-être" (The Wellness Syndrome), de Carl Cederström (Auteur), André Spicer (Auteur), Edouard Jacquemoud (Traduction), 13 avril 2016, L’Echappée. 

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