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L’effondrement économique de la France laisse Berlin exercer seul le leadership de l’Union européenne et de la zone euro
©Reuters

Bonnes feuilles

Extrait de "Danser sur un volcan" de Nicolas Baverez, aux éditions Albin Michel 1/2

Nicolas Baverez

Nicolas Baverez

Nicolas Baverez est docteur en histoire et agrégé de sciences sociales. Un temps éditorialiste pour Les Echos et Le Monde, il analyse aujourd'hui la politique économique et internationale pour Le Point.

Il est l'auteur de Lettres béninoises et de Chroniques du déni français aux Editions Albin Michel.

 
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Il est temps de sortir du déni et d’affronter la réalité : en termes de marché du travail comme de capital humain, la France est écartelée. La protection totale d’un noyau dur de la population active composé de la fonction publique et des salariés titulaires d’un contrat à durée indéterminée va de pair avec la précarité d’une partie de la main-d’œuvre qui supporte toutes les fluctuations de l’activité. D'un côté, le système scolaire rejette chaque année 161 000 jeunes qui maîtrisent insuffisamment lecture, écriture, calcul, et qui grossissent les rangs des exclus. De l’autre, 80 000 personnes à haut potentiel quittent chaque année le territoire pour s’installer à l’étranger afin d’échapper au malthusianisme national et de bénéficier d’un environnement plus favorable à leurs projets et à leur épanouissement. Plus de 2,1 millions de Français vivent aujourd’hui à l’étranger dont 600 000 à Londres ; à Hong Kong et à Singapour, nos compatriotes constituent les communautés étrangères les plus nombreuses.

Les Français, qui continuent à croire que la France est un pays riche, se paupérisent en réalité rapidement. Parmi les atouts théoriques de notre pays fi gure le dynamisme de sa démographie. Forte aujourd’hui de 66,3 millions habitants, la France devrait voir sa population compter 76 millions d’habitants en 2060 contre 71 millions pour l’Allemagne. Mais en raison de la décroissance et du chômage de masse, la richesse par habitant est désormais inférieure de 6 % à la moyenne des pays développés et de 13 % à celle de l’Allemagne. Depuis les années quatre-vingt, la France a régressé du sixième au seizième rang mondial – hors États pétroliers.

Encore ces données n’intègrent-elles pas le passif lié à la dette publique. Pierre Mendès France rappelait à juste titre que « les comptes en désordre sont la marque des nations qui s’abandonnent ». Voilà plus de quatre décennies que la France capitule, puisque le dernier excédent budgétaire remonte à 1973 ! La France fait là encore exception. Elle est le seul pays développé à n’avoir jamais restauré l’équilibre de ses fi nances publiques depuis les chocs pétroliers. Et ce en raison de la perte de tout contrôle des dépenses publiques.

La principale dérive ? Elle provient des transferts sociaux qui s’élèvent à 34 % du PIB et des effectifs de la fonction publique qui ont encore augmenté de 40 000 en 2014 pour atteindre 5,64 millions de postes absorbant 13 % du PIB. Dans le même temps, les recettes publiques battent des records à 53,5 % du PIB, réalisant l’euthanasie de la croissance et de l’emploi, de l’épargne et de l’investissement. La dette publique, qui s’élevait à 20 % du PIB en 1980, représentera une année de PIB d’ici à 2017. Si l’on ajoute les – nombreux – organismes ou sociétés liés à l’État ainsi que la charge des retraites, les engagements publics culminent à 250 % du PIB. Et dans le même temps, le patrimoine national s’est vu amputé de 1,8 % en 2014. Sans croissance et sans infl ation, notre pays court donc droit au défaut de paiement !

Ce déclin, longtemps nié, est d’autant plus spectaculaire qu’il contraste avec le redressement du monde développé et des autres pays européens. Les États-Unis ont renoué avec une croissance annuelle proche de 3 % et avec le plein-emploi en redevenant le territoire le plus compétitif de la planète grâce à des gains de productivité du travail de 15 %, à la restructuration du secteur fi nancier, à la révolution des hydrocarbures non conventionnels et à la domination sans partage de l’économie numérique. Le Japon tente de se dégager d’un quart de siècle de défl ation. Le Royaume-Uni affiche une croissance de 2,8 % et un taux de chômage réduit à 5,2 %. La divergence avec l’Allemagne est particulièrement spectaculaire : croissance stable autour de 2 % ; exportations représentant 52 % du PIB et excédent commercial de 7,4 % du PIB ; taux de chômage réduit à 4,7 % ; excédent budgétaire de 1 % et dette ramenée de 81 à 75 % du PIB. L’effondrement économique de la France laisse ainsi Berlin exercer seul le leadership de l’Union européenne et de la zone euro.

Extrait de "Danser sur un volcan" de Nicolas Baverez, publié aux éditions Albin Michel, 2016. Pour acheter ce livre, cliquezici.

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