Record absolu du nombre de chômeurs de catégorie A : pourquoi l’inversion de la courbe ne se produit toujours pas malgré la hausse des créations d’emplois<!-- --> | Atlantico.fr
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On constate une explosion du nombre de chômeurs en catégorie A en octobre.
On constate une explosion du nombre de chômeurs en catégorie A en octobre.
©Reuters

+1,2% de demandeurs d’emploi

La France présente dorénavant des signes économiques positifs pour l'emploi et les problématiques liées au chômage. Pour autant, malgré ce contexte favorable, on constate une explosion du nombre de chômeurs en catégorie A... L'inversion de la courbe promise ne devrait pas arriver de sitôt.

Pierre-François Gouiffès

Pierre-François Gouiffès

Pierre-François Gouiffès est maître de conférences à Sciences Po (gestion publique & économie politique). Il a notamment publié Réformes: mission impossible ? (Documentation française, 2010), L’âge d’or des déficits, 40 ans de politique budgétaire française (Documentation française, 2013). et récemment Le Logement en France (Economica, 2017). Il tient un blog sur pfgouiffes.net.
 

Vous pouvez également suivre Pierre-François Gouiffès sur Twitter

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Atlantico : Le nombre de demandeurs d'emploi en catégorie A, c'est-à-dire sans activité dans le mois, a augmenté de 1,2% en octobre par rapport à septembre, soit 42 000 demandeurs en plus. Comment expliquer cette forte hausse alors que certains indicateurs économiques (PMI, rapport Insee) indiquent un mieux ? A quoi est-ce dû ?

Pierre-François Gouiffès : Les chiffres qui viennent de tomber hier soir incluent effectivement un double élément de surprise et de décalage par rapport aux autres indicateurs économiques. Concernant l’indicateur phare des DEFM A - les demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi et sans emploi –le pays rate une nouvelle fois une séquence de deux mois de baisse consécutive, une séquence qui ne s’est pas produite depuis octobre 2010 et très attendue par certains analystes mais bien davantage par le gouvernement compte-tenu des engagements politiques pris en matière de chômage par François Hollande. Mais c’est en outre l’un des pires chiffres mensuels récents, dépassé seulement en janvier et septembre 2013 et finalement assez proche des chiffres mensuels de chômage de la terrible séquence de l’hiver 2008-2009. Enfin on alterne depuis juin mois de hausse et mois de baisse. Cette situation caractérise une période de flottement et de croissance qui reste molle. Concernant le redressement des indicateurs économiques, il faut relativiser leur portée car la France demeure dans une zone de croissance molle, avec par exemple une prévision gouvernementale de hausse du PIB de 1,5% en 2016 dans le projet de loi de finance (1,2% pour COE-Rexecode).

Peut-on imputer principalement cette augmentation aux catégorie B ou C, soit les personnes déjà inscrites à Pôle emploi ?

La ministre et le ministère du travail mettent effectivement en avant des allers retours entre la catégorie A qui augmente (+42 000) et les catégories B et C - DEFM ayant une activité réduite - qui baissent (-28 900 en cumulé). C’est l’exercice classique consistant à tourner autour des indicateurs et à les présenter de façon pédagogique ou favorable. Mais au final l’indicateur cumulé (DEFM A+B+C) augmente encore de 13 100 en octobre 2015 et n’a baissé que deux fois depuis mai 2012. Depuis cette date la hausse des DEFM ABC (+1,1 millions de personnes et +25,6 %) est totalement cohérente avec celle des seuls DEFM A (+695 000 personnes et +24 %). Donc il n’y a pas d’un côté hausse du nombre de chômeurs sans aucune activité et de l’autre baisse du nombre des chômeurs avec activité réduite.

Que peut-on dire du chômage des jeunes qui baisse de 2,9 % par rapport à l'an passé mais qui continue d'exploser chez les plus de 50 ans (9,2 %) ?

C’est effectivement ce qu’on constate sur un an concernant la catégorie des DEFM A : sur cette période, plus on est jeune plus on a de chance de trouver un emploi. C’est également clair même si c’est de façon moins nette sur les DEFM ABC : +6,1% au totalsur un an, +0,6% pour les moins de 25 ans, +5,7% pour les 25-49 ans et +6,1% pour les plus de 50 ans. Il faut également regarder l’ancienneté dans le chômage des DEFM ABC : le chômage de courte durée n’augmente pas et même baisse légèrement, mais il y a +8,4% pour les chômeurs entre 6 mois et 1 ans d’ancienneté, +10,8% pour les chômeurs de plus d’un an… et +19 % pour les chômeurs de plus de trois ans ! Le drame du chômage français, c’est son niveau considérable mais également le fait qu’il devient fatal au-delà d’un certain âge ou d’une certaine ancienneté dans le chômage puisqu’il devient alors très difficile d’en sortir.

Enfin comment expliquer le chiffre paradoxal de la reprise d'emplois qui s'établit à 101 000 depuis le début d'année ? La dynamique de créations d'emplois est là mais malgré cela la hausse du chômage se poursuit ?

Les statistiques de créations d’emploi salarié dans le secteur marchand fournis par la DARES et l’INSEE sont effectivement entrés en territoire positif en 2015 après avoir été en permanence négatifs sur la période 2011-2014. Mais on est encore loin des volumes de création de la fin des années 1990 ou même de la période 2005-2006, en lien à tout une série d’indicateurs certes positifs mais peu vigoureux. L’articulation entre un chômage qui continue de monter et des créations d’emplois positivescorrespond en outre au décalage entre les évolutions respectives de la population active et des emplois disponibles, dans un environnement global qui reste incertain et pour lequel aucune tendance forte et claire n’apparaît à ce jour.

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