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Anonymous déclare la guerre à l'Etat islamique : mais qu'ont-ils les moyens de faire réellement ?
©REUTERS/Thomas Peter

Cyberguerre

Le groupe d'activistes en ligne ne se limite plus aux canulars : depuis les attaques contre Charlie Hebdo, et à nouveau depuis les attentats à Paris, Anonymous veut combattre Daesh. Mais ils ne risquent pas d'être plus qu'une épine dans le pied.

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry est journaliste pour Atlantico.

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Anonymous, le groupe de "hacktivistes" (activistes-hackers), aurait déclaré la guerre à Daesh. Ils ont publié ce matin une vidéo YouTube promettant une "cyberguerre" sans précédent contre le groupe terroriste islamiste. En réalité, ce mouvement avait commencé après les attaques contre Charlie Hebdo. 

Anonymous n'est pas une entité centralisée, mais plus un label que choisissent des groupes d'activistes en ligne et qui recouvre un grand nombre d'initiatives à origine décentralisée. A l'heure actuelle, dans Anonymous il existe sans doute quelques dizaines d'activistes fortement engagés qui représentent le centre du collectif, et une galaxie beaucoup plus large de compagnons de route. Pour Fabrice Epelboin, cofondateur de Yogosha, société de sécurité informatique, Anonymous est à l'économie numérique ce que le syndicalisme fut à la révolution industrielle--un mouvement transversal avec sa propre logique, qui défend les valeurs et les intérêts d'une communauté donnée. Anonymous pourraient potentiellement priver temporairement Daesh de moyens de communication mais pas faire beaucoup plus.

Le groupe s'était fait connaître il y a plusieurs années par ses attaques contre la scientologie. Le plus souvent, leurs initiatives se résument à des canulars, et à des "attaques" en ligne sans conséquences vraiment grave, comme des attaques "DDoS" qui peuvent pousser un site à être momentanément indisponible mais sans dégâts de long terme. Ainsi, ils ont récemment dégommé 5elafabook, un réseau social pour radicaux islamistes créé sur le modèle de Facebook.

Après les attaques contre Charlie Hebdo, donc, certains des membres du groupe, révoltés par le barbarisme des attaques, avaient décidé de mette leurs compétences informatiques au service d'une cause plus importante, celle de la lutte contre le terrorisme. Ce qui s'est passé depuis peut nous donner des indications sur ce qui se risque de se passer--en résumé, pas grand-chose. 

Le domaine principal d'action des Anonymous est les médias sociaux. Après l'attaque de Charlie Hebdo, les activistes d'Anonymous ont créé une base de données de plusieurs dizaines de milliers de comptes Twitter selon eux tenus par des membres de Daesh ou par des sympathisants. Ils ont ensuite organisé des campagnes pour forcer Twitter à désactiver ces comptes. Parfois, plus prosaïquement, ils submergaient les conversations en ligne publiques des islamistes de messages hostiles (et souvent orduriers), rendant ces conversations impraticables.  

Ils ont également répertorié les sites utilisés par les jihadistes et les ont attaqués, soit directement, soit indirectement, en les dénonçant aux hébergeurs, la plupart d'entre eux ne voulant pas être associés au jihadisme. 

L'heure de gloire de cyberguerre d'Anonymous contre Daesh serait survenue lorsque, avec une combinaison de surveillance de Twitter et de géolocalisation, ils auraient déjoué une attaque prévue par un groupe tunisien affilié à Daesh, en transmettant les informations au FBI. 

GhostSec, un groupe issue d'Anonymous et qui prend très au sérieux cette cyberguerre, relaierait souvent des informations aux services de sécurité américains à travers des intermédiaires. Certains de ces renseignements auraient de la valeur, selon Michael Smith, responsable de la société en conseil en sécurité informatique Kronos Advisory. 

Dans l'ensemble, à quoi mène donc cette cyberguerre ? Pas à grand-chose. Malgré quelques bons points, Anonymous ne semble pas plus qu'une épine dans le pied de Daesh, et encore. 

Mais peut être que l'objectif d'Anonymous n'est pas tant d'obtenir des résultats, que de se battre--et de se battre, pour une fois, pour une cause méritoire, et pas juste pour faire des canulars en ligne. Les attaques de Daesh étaient des attaques contre les valeurs de la France et des Lumières, mais également contre les valeurs d'Anonymous. Ce genre d'initiative peut montrer aux terroristes qu'une société ouverte et libre ne se laisse pas faire, et dispose de nombreuses ressources pour combattre au terrorisme, en ligne ou dans la réalité. Et ce n'est pas rien.

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