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Après le 11 septembre, Londres, Madrid... les attentats du vendredi 13 novembre 2015 : à quelle onde de choc s'attendre pour le système politique français ?
©FRANCOIS GUILLOT / AFP

Vendredi noir

Le vendredi 13 novembre au soir, Paris est attaquée. Les multi-attentats, au Bataclan, dans le centre de la ville et au stade de France, font plusieurs dizaines de blessés et une centaine de morts. Outre le véritable drame humain que cela représente, ces attentats sont lourds de conséquences sur la vie politique Française... et internationale.

Vincent Tournier

Vincent Tournier

Vincent Tournier est maître de conférence de science politique à l’Institut d’études politiques de Grenoble.

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Jean Petaux

Jean Petaux

Jean Petaux, docteur habilité à diriger des recherches en science politique, a enseigné et a été pendant 31 ans membre de l’équipe de direction de Sciences Po Bordeaux, jusqu’au 1er janvier 2022, établissement dont il est lui-même diplômé (1978).

Auteur d’une quinzaine d’ouvrages, son dernier livre, en librairie le 9 septembre 2022, est intitulé : « L’Appel du 18 juin 1940. Usages politiques d’un mythe ». Il est publié aux éditions Le Bord de l’Eau dans la collection « Territoires du politique » qu’il dirige.

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Atlantico : Dans la nuit du 13 au 14 novembre, Paris a été la cible de multiples attentats, provoquant plusieurs morts. Quelles peuvent-êtres les conséquences politiques de tels événements ?

Jean Petaux : Dans la précipitation des événements qui se déroulent depuis vendredi soir aux environs de 21h15 au Stade de France et dans le centre de Paris, ce qui domine forcément c’est l’impression de panique généralisée. Les multiples attentats de Paris sont différents de ceux qui sont advenus entre les 7, 8 et 9 janvier. Le 7 janvier 2015 en frappant "Charlie Hebdo" les frères Kouachi se sont attaqués à un symbole en exécutant froidement toute une partie de la rédaction de ce journal. Coulibaly en attaquant le supermarché Hyper Cacher s’en est pris aux Juifs détestés et honnis. Dans les deux cas les cibles étaient clairement identifiées. Aussi terrible que cela puisse paraître on peut même dire qu’il s’agissait "d’objectifs prévisibles" dans la folle logique meurtrière des tueurs qui "biberonnent" à la haine de l’antisémitisme depuis des années. D’après ce que l’on sait des attentats de la nuit du 13 au 14 ce qui frappe en premier lieu ce sont les massacres de masse et aveugles, répartis sur 7 points d’attaque différents. L’intention est claire : faire que tout le monde ait peur désormais. Pour le coup les terroristes agissent de sorte que tout un chacun puisse imaginer que sa vie peut basculer dans l’horreur comme celles des victimes de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher l’a fait. Tout le monde est vraiment susceptible d’être un "Charlie tué". Voilà le premier résultat des attentats de la nuit.

Les conséquences politiques des événements sont, bien entendu, difficiles à mesurer. Ce que l’on peut constater c’est l’extraordinaire rapidité de la réaction du chef de l’Etat. Son intervention est unique dans les annales de la Vème République. De mémoire, seule l’intervention de Michel Debré, premier ministre, à 0h45  le dimanche 23 avril 1961, pour l’heure incroyable de cette prise de parole, est comparable. Il s’agissait alors d’appeler les Français à se rendre "à pieds ou en en voiture" sur tous les aéroports susceptibles d’être attaqués par les parachutistes putschistes, aux ordres des généraux félons qui venaient de faire une tentative de coup d’Etat à Alger. Juste avant lui, à 20h, le général de Gaulle, chef de l’Etat, avait déclaré l’entrée en vigueur de l’article 16 dans un discours télévisé passé depuis à la postérité.

A minuit, le 13 novembre au soir on a vu un François Hollande marqué par une exceptionnelle gravité prendre la parole et annoncer deux mesures spectaculaires : l’état d’urgence sur l’ensemble du territoire et la fermeture des frontières. Ajoutées à la très surprenante intervention de Barack Obama, elle aussi unique en son genre, quelques minutes avant la prise de parole du chef de l’Etat, les mesures présentées aux Français, très nombreux devant leurs téléviseurs, montrent la dimension exceptionnelle des événements.

Même si les mots n’ont pas été prononcés les Français ont tous entendu ce soir que la France est entrée en guerre et, à cet égard, la mobilisation des forces armées en région parisienne est éloquente…

Il est impossible, "à chaud", de dire ce que seront les conséquences politiques des événements de la nuit. Mais il est certain, qu’une fois de plus, il y aura un "avant" et un "après"…

Vincent Tournier : Ce qui est terrible, c’est que ces attaques ont été annoncées depuis plusieurs mois par les autorités françaises ou par des personnes bien informées. Je pense notamment aux déclarations du général Vincent Desportes, qui disait fin octobre que « un jour ou l’autre, il y aura un attentat de masse en France », ou encore au juge Marc Trévidic qui a averti dans Paris Match que « la France est l’ennemi numéro un de l’Etat islamique », lequel prépare des attaques d’envergure. Tous les deux ont même alerté sur la vulnérabilité de la France, sur la baisse des moyens, sur la difficulté de surveiller tous les djihadistes potentiels. Ont-elles été prises au sérieux ? S’il est impossible de tout prévoir, s’est-on vraiment placé dans l’hypothèse la plus pessimiste ? C’est là tout le paradoxe de la situation actuelle : tout le monde savait que la menace était très sérieuse mais tout le monde espérait que le pire ne se réaliserait pas. En somme, on a voulu croire qu’on pouvait échapper à un destin tragique. Toute proportion gardée, c’est un peu notre « drôle de guerre » à nous : comme en 1940, on sait qu’on est en guerre mais on pense pouvoir l’éviter. Aujourd’hui, les nuages s’amoncellent, les menaces se précisent, mais on veut encore croire que la « guerre de Troie n’aura pas lieu ». N’a-t-on pas d’ailleurs affaire au même aveuglement idéologique ? Dans les années 1930, ceux qui étaient traités d’idéologues étaient les plus pessimistes, ceux qui voulaient alerter sur les dangers à venir, bref ceux qui sont aujourd’hui reconnus comme ayant fait preuve d’une plus grande clairvoyance. Une révision du même type va sans doute avoir lieu. Ceux qui faisaient preuve jusque-là d’optimisme, les partisans du compromis, de l’arrangement ne vont-ils pas passer pour de dangereux idéologues, après avoir été encensés comme étant de vrais humanistes soucieux de pragmatisme et de tempérance ?

Cela pourrait-il être comparable à l'impact du 11 septembre sur la politique américaine des années 2000 ? En quoi est-ce différent ? 

Jean Petaux : Plus que la comparaison avec le 11 septembre 2001, ce qui s’est passé cette nuit ressemble plus aux attentats de Madrid du 11 mars 2004 ou à ceux de Londres du 7 juillet 2005 du fait de la simultanéité des attaques et de leur diversité. La coordination des opérations montre qu’il s’agit d’une agression lourde que l’on peut qualifier "d’hyper-terroriste". Si le bilan des victimes est celui qui est annoncé au début de la nuit c’est, encore une fois, une véritable offensive comparable à des actions de guérilla urbaine dont l’impact psychologique de masse est clairement revendiqué. Comme l’a dit le président Hollande dans son allocution : l’effroi et la peur sont recherchés directement ici ! L’attaque terroriste sur le Bataclan ressemble terriblement à l’attaque du commando tchétchène contre le théâtre Dubrovka de Moscou le 23 octobre 2002 qui avait donné lieu, aussi, à une prise d’otages avec des centaines de morts au final. On parle déjà d’environ 70 morts au Bataclan…. Les spécialistes du terrorisme imaginaient qu’une telle action, dans un lieu clos comme une salle de spectacle de masse pouvait advenir… C’est ce qui s’est passé.

Face à cela le président de la République décrète une sorte de mobilisation générale. Un conseil des ministres en pleine nuit cela ne s’est jamais déroulé. Et l’annulation de la présence du chef de l’Etat à une réunion internationale comme cela a été décidé par rapport à la conférence du G20 prévue en Turquie est tout à fait unique aussi. Il est clair que François Hollande va incarner, plus encore qu’il ne l’a fait en janvier 2015, non seulement l’unité de l’Etat mais surtout une "ligne dure" et intransigeante.

Vincent Tournier : Les situations sont très différentes, d’abord sur le plan émotionnel. Les attaques du 11-Septembre ont été à la fois massives et totalement nouvelles, alors que, en France, c’est triste à dire, mais il existe un terrorisme de basse intensité depuis plusieurs décennies. Du coup, la France dispose déjà d’un important arsenal anti-terroriste : il y a des services spécialisés, des magistrats spécialisés, des lois dérogatoires au droit commun, etc., et l’opinion publique n’est pas prise totalement au dépourvue. 

Ensuite, la différence est dans la situation géopolitique. Les attentats de 2001 ont provoqué une réorientation majeure de la politique américaine puisque les Etats-Unis ont été amenés à intervenir militairement dans la région du Moyen-Orient avec pour objectif de restructurer la région (c’était le fameux projet du « Grand Moyen-Orient » de George W. Bush,, dont le point de départ était l’Irak). La France n’est pas dans la même configuration puisqu’elle est d’ores et déjà très engagée sur plusieurs théâtres d’opération. Va-t-il y avoir un changement de stratégie ? Ce n’est pas sûr. 

Une autre différence est que le territoire français est beaucoup plus vulnérable que le territoire américain. D’une certaine façon, les terroristes vivent parmi nous. Comme l’a admis Manuel Valls, nous avons un « ennemi intérieur ». Cette situation risque d’avoir des effets très importants sur la vie quotidienne. Chacun va se dire : mon voisin est-il du bon côté ? Comment être sûr de sa loyauté ? Les musulmans vont être soumis à une injonction encore plus forte qu’après les 7-9 janvier, et ils vont devoir eux-mêmes clarifier sans ambages leur position sous peine de rendre la situation très tendue.  

Que nous enseignent les événements de janvier à cet égard ?  

Jean Petaux : Plusieurs choses. La première c’est que d’autres attentats peuvent avoir lieu demain ou après-demain. Ou d’autres prises d’otages spectaculaires. On  ne sait pas si tous les auteurs de cette nuit ont été neutralisés ou si certains sont en fuite comme l’ont été les frères Kouachi dans les jours qui ont suivi le 7 janvier. Ce que l’on sait de cette logique de terreur c’est qu’elle joue beaucoup avec le cycle médiatique et l’accumulation des faits. Donc, comme cela s’est déroulé en janvier 2015, cette hypothèse n’est pas du tout à écarter. Les événements de janvier 2015 nous enseignent aussi que la réaction du pays peut être très forte et très digne. Ce furent les immenses manifestations du 11 janvier. Il est bien trop tôt pour dire si la société française réagira de la même manière. Ce qui est certain c’est que les victimes de la nuit sont toutes et tous des anonymes, des "gens ordinaires", qu’elles risquent de se compter par dizaines et dizaines compte tenu de l’ampleur du massacre… L’impact psychologique de masse que ces morts vont générer est radicalement inconnu en France…

Vincent Tournier : Si on compare les attaques d’hier à celles de janvier, on peut faire deux observations, l’une sur la nature de l’événement, l’autre sur les conséquences.

Concernant la nature de l’événement, on est à la fois dans la continuité et dans la nouveauté. La continuité, c’est évidemment l’islamisme. Mais la nouveauté, c’est que les attaques de janvier dernier (comme d’ailleurs les précédentes attaques de Mohamed Merah ou de Medhi Nemmouche) avaient une dimension symbolique très forte. Dans ces attaques, les auteurs s’en sont pris à des cibles très caractéristiques : les caricaturistes de Charlie Hebdo, les juifs, éventuellement les policiers. Les attaques du 13 novembre sont très différentes : d’abord parce qu’on change d’échelle vu le nombre de victimes, ensuite parce que ce sont des Français ordinaires qui sont visés. C’était déjà le cas avec des attaques antérieures comme celle du Thalys l’été dernier, mais celles-ci avaient échoué, ce qui avait permis de relativiser l’ampleur de la menace. Désormais, cette forme d’échappatoire n’est plus de mise. Plus personne ne peut se sentir à l’abri. On peut d’ailleurs se demander comment les Français vont réagir : vont-ils encore sortir le soir ? Sera-t-il raisonnable d’organiser des spectacles, et à quelles conditions ? Les prochains marchés de Noël vont-ils se tenir dans la psychose, surtout si on se souvient que des quasi-attaques avaient déjà eu lieu l’an dernier ? 

Pour ce qui est des conséquences, les attentats de janvier ont produit des effets limités. Certes, la législation antiterroriste a été renforcée. Mais les questions sociétales ont été timidement abordées. Le discours officiel a consisté à refuser tout amalgame entre l’islam et les islamistes, ce qui n’a pas empêché le gouvernement d’engager une réforme de l’islam de France en partant du principe que le CFCM avait échoué dans son objectif de représenter et de canaliser l’ensemble des musulmans de France. Une nouvelle procédure a donc été lancée afin de créer une instance plus représentative, tandis que des négociations étaient engagées avec les pays du Maghreb sur la question de la formation des imams (tel était justement l’un des objectifs de la récente visite de François Hollande en Algérie). 

Mais tout ceci est resté très modeste. Après les attaques du 13 novembre, cette stratégie a minima semble moins tenable. Des réponses plus radicales vont devoir être mises sur la table. L’instauration de l’état d’urgence et la fermeture des frontières montrent déjà que le contexte n’est plus le même. De toute évidence, de nouvelles mesures de sécurité vont devoir être adoptées, par exemple pour les trains ou les salles de spectacle. Quant à l’islam, il sera cette fois beaucoup plus difficile d’esquiver les débats de fond.

Est-ce qu'un tel traumatisme pourrait favoriser la montée du Front National (et à tous ceux qui pensent que la menace est désormais intérieure), ou, inversement, plutôt une réaction allant vers une recherche de modération ? 

Jean Petaux : Le chef de l’Etat va jouer un rôle majeur dans les heures à venir. Il va prendre aussi tous les risques. Comme le montre son engagement immédiat par sa venue au Bataclan, en pleine nuit, théâtre de tant de victimes… Les petits jeux politiciens vont devoir être momentanément mis sous l’éteignoir. Si une personnalité politique s’avise d’essayer d’en tirer un misérable petit profit politique, cela pourrait tout autant se retourner contre elle… Marine Le Pen et le Front National tout autant que tous les autres…

Vincent Tournier : On va rapidement pouvoir le vérifier avec les élections régionales, à condition que celles-ci soient maintenues, ce qui n’est pas garanti à ce stade. Pour les opposants du Front national, la situation va évidemment être très difficile : comment expliquer que le parti qui incarne le mal absolu soit le seul à proposer des analyses qui collent si bien avec la réalité, que ce soit sur la crise des migrants ou sur la menace islamiste ? N’est-ce pas le logiciel des autres partis qui contient un bug ? 

Il est donc tout à fait possible que le choc du 13 novembre favorise le FN, que ce soit en mobilisant les électeurs abstentionnistes, ou en faisant basculer des électeurs qui refusaient jusqu’à présent de franchir l’interdit. 

Cela dit, les autres partis ne vont pas pouvoir continuer comme avant. La violence des attaques d’hier va les contraindre à clarifier leur discours, à cesser de louvoyer sur un certain nombre de sujets concernant l’immigration ou l’islam. Jusqu’à présent, les partis de gouvernement ont pu éviter les débats de fond et continuer leurs petits calculs électoralistes. On l’a encore vu jeudi dernier avec François Bayrou, dont le moins qu’on puisse dire est qu’il n’a pas été clair sur ses réponses à Natacha Polony qui l’interrogeait sur la problématique du « Je ne suis pas Charlie ». Le problème est le même pour le PS et LR, qui continuent de louvoyer dans un entre-deux de plus en plus difficile à tenir. Par exemple, les socialistes sont tiraillés entre ceux qui veulent abroger de facto la loi de 1905 sur la laïcité et ceux qui considèrent, comme l’a fait récemment Manuel Valls, qu’un « contre-modèle de société » s’est instaurée dans les banlieues. 

Des clarifications vont donc devoir être faites, et selon la ligne qui l’emportera, la situation du FN sera différente. Or, une sorte d’union nationale n’est pas exclue, auquel cas le FN serait privé de son succès annoncé.

En matière de politique internationale, quels changements ces événements pourraient-ils impulser ?

Jean Petaux : Le monde entier semble déjà cette nuit faire sienne cette devise : "Nous sommes tous des Français". Et plusieurs chefs d’Etat étrangers ont dit que ce qui s’est passé cette nuit sont autant de crimes contre l’humanité…

Les premières informations rapportent que certains auteurs des attentats auraient crié qu’ils agissaient en réponse à ce qui se passe en Syrie. Il est peu probable que la France change sa politique de frappes contre DAESH, en Irak ou en Syrie. Au plan international, la réaction des Etats amis de la France n’a pas tardé, celle du président des Etats-Unis est la plus spectaculaire et la plus inattendue par sa rapidité, par le fait que le président Obama a même cité la devise de la France en français… La France est bien engagée dans une guerre lourde, asymétrique et d’une ampleur inattendue. Face à cela l’incertitude est très grande. La seule certitude qui existe désormais c’est que tout cela peut se reproduire demain, après-demain et pendant plusieurs années…. Mais rien, pour l’heure, ne laisse envisager des changements en matière de politique internationale. Il faut même espérer qu’il n’y en ait pas car ce serait un formidable aveu de défaite et de renoncement…

Vincent Tournier : On ne peut pas écarter un scénario « à l’espagnole », autrement dit un retrait pur et simple de la France des différents théâtres d’opération comme l’avait fait l’Espagne après les attentats de Madrid en 2005. Cette option « à l’espagnole » va vraisemblablement être soutenue par une partie de l’opinion et par certains commentateurs, lesquels vont faire valoir que la cause du terrorisme réside d’abord dans les engagements de la France au Sahel et au Levant. Donc, il suffit de retirer nos troupes pour que la menace disparaisse et que tout rentre dans l’ordre. 

Un tel scénario a cependant peu de chance de se réaliser. D’abord parce que la France n’a pas les mêmes ambitions internationales que l’Espagne : elle ne peut pas se permettre de battre en retraite trop facilement, ne serait-ce que pour conserver une certaine crédibilité aux yeux de ses alliés ou des pays avec lesquels elle a signé des accords de défense.  

Ensuite parce qu’un retrait de la France aurait des conséquences difficilement calculables : non seulement cela faciliterait les dynamiques islamistes en Afrique et en Orient, dynamiques qui sont manifestement très profondes, mais cela permettrait également à d’autres puissances comme la Turquie ou la Russie d’engranger des points dans ces régions, ce qui n’est pas dans l’intérêt de la France, ni même dans l’intérêt de l’Europe.

La question de l’Europe va d’ailleurs être mise sérieusement sur la table. Comme on le sait, l’Union européenne est totalement évanescente sur les aspects militaires et diplomatiques. Jusqu’à présent, cet échec n’était pas trop visible, mais avec la double crise migratoire et islamique, il prend une nouvelle tournure. Les Européens peuvent-ils se contenter de voir l’histoire se dérouler sous leurs yeux sans réagir ? Peuvent-ils prendre le risque d’être déstabilisés par des menaces extérieures ? Peuvent-ils laisser la France quasiment toute seule en première ligne ? De ce point de vue, la menace islamiste pourrait bien être une sorte d’ultime test de l’intégration européenne, une dernière chance de réussite avant la liquidation définitive. Car on voit mal comment les Européens pourraient continuer à parler sérieusement de solidarité s’ils ne sont pas capables de faire face collectivement à une menace qui les concerne tous.

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