"Un temps de président" sur France 3 : la promesse de dévoiler les coulisses de l’Elysée sans affaiblir son locataire pouvait-elle être tenue ?<!-- --> | Atlantico.fr
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François Hollande à l'entrée de l'Elysée.
François Hollande à l'entrée de l'Elysée.
©Reuters

Face caméra

France 3 diffusait lundi 28 septembre un documentaire sur le chef de l’État, intitulé "Un temps de président", réalisé et filmé par Yves Jeuland. Le documentariste a passé plusieurs mois à l’Élysée, entre l'été 2014 et le début d'année 2015. Un film sur la façon dont François Hollande conçoit sa communication politique.

Jacques Charles-Gaffiot

Jacques Charles-Gaffiot

Jacques Charles-Gaffiot est l'auteur de Trônes en majesté, l’Autorité et son symbole (Édition du Cerf), et commissaire de l'exposition Trésors du Saint-Sépulcre. Présents des cours royales européennes qui fut présentée au château de Versailles jusqu’au 14 juillet 2013.

 

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« Les gens ne comprennent rien. L’acte d’autorité il faut le récupérer pour lui [François Hollande] », lance à ses proches conseillers Jean-Pierre Jouyet, secrétaire général de l’Élysée !

Ainsi, la trame du documentaire réalisé par Yves Jeuland  et diffusé hier soir sur France 3 semble, une fois de plus, être tissée à l’aune d’une préoccupation récurrente qui souvent n’ose jamais dire son nom, celui d’autorité, surtout lorsque son sujet concerne le chef d’État de la République française.

Qu’ils soient de gauche ou de droite, nos politiques confondent désormais, toujours avec autant d’opiniâtreté, les deux notions (pourtant distinguées déjà au temps d’Aristote) qui président à l’exercice de la souveraineté : Puissance et Autorité. Inexorablement, prenant l’une pour l’autre et inversement, ils intervertissement symboles et postures et finissent par annihiler le dynamisme des ressorts qui devrait pourtant les aider dans l’exercice quotidien de leur haute fonction.

La distinction est pourtant d’une simplicité enfantine : le premier de ces concepts, la Potestas des Latins que nous sommes demeure l’attribut du vainqueur qui a su s’imposer dans l’arène du combat politique. L’Auctoritas, par antithèse, évoque la suprématie accordée au titulaire de la souveraineté, venant en quelque sorte sanctionner sa légitime ascension à la charge qu’il exerce. En un mot, la Puissance est de nature à être conquise ; l’Autorité, à l’inverse, est toujours conférée à son titulaire. La justesse de ces principes se vérifie depuis la nuit des temps, sous tous les continents et dans toutes les civilisations. Aristote parlait alors d’universaux. Et « les gens » eux, comprenant instinctivement cette réalité ne s’y trompent guère !

Seulement voilà, sous l’influence de la pensée de mai 68, nous confondons Autorité et autoritarisme !

Les services de communication, qui ont fini par s’infiltrer dans tous les espaces de pouvoir, ont pensé arriver à balayer facilement ces vieilles lunes en leur substituant désormais des « coups médiatiques » répétés, dictés de plus en plus souvent sous l’effet de l’émotion. « Les gens ne comprenant rien », la démagogie est venue parachever l’édifice.

C’est ainsi que ce pauvre président Hollande se retrouve mouillé comme une soupe dans l’île de Sein, puisque Monsieur Tout le monde se veut placé sur un même pied que celui de ses électeurs. C’est ainsi également que certains mots sont devenus proscrits, comme celui de « noblesse » (« qui fait trop droite ») dans le discours de François Hollande, préparé par les services de l’Élysée à l’occasion de la remise de ses insignes de grand-croix de la Légion d’honneur à Jean d’Ormesson.

Pourtant le protocole du palais de l’Élysée, entoure d’une façon solennelle le chef de l’État. Les huissiers annoncent son arrivée ; les ministres se lèvent respectueusement à son entrée dans la salle du Conseil (même si Fabius, bien supérieur à tout cela, se croit autorisé à effectuer quelques petits signes de la main au même instant) ; la musique militaire de la Garde républicaine fait régulièrement entendre ses échos. François Hollande lui même en rajoute et, en plein cœur de l’affaire Trieweiller, parlant de lui estime qu’ « il ne s’agit pas de respecter une personne mais une fonction », qu’il en va d’ « un intérêt national ». Aussi, sans doute pour mieux parvenir à « asseoir » son autorité en demi-teinte, reprenant les options efficaces empruntées par ses prédécesseurs jusqu’à Giscard d’Estaing, prend-il place, l’an passé, derrière son grand bureau plat estampillé pour prononcer ses vœux. L’honneur présidentiel est sauf, même si, au grand dam du secrétaire général, le veston et la cravate du président godillent dans tous les sens !

Mais le naturel revient au galop. Monsieur Tout le monde ne supporte par la distance qui devrait régner entre le titulaire de la fonction qu’il exerce et ses administrés, fussent-ils de proches collaborateurs. Sous les ors de l’Élysée, on s’embrasse, on se tutoie (jusqu’aux membres du  secrétariat particulier), on blague entre soi, on s’aime quoi !

C’est vrai qu’en faisant peuple et grâce à la communication efficace de Gaspard Gantzer, le chef de l’État peut apparaître plus compatissant, rempli d’empathie et prendre quelques libertés de langage pour saluer Serge Lazarevic lors de sa libération. Les qualités de cœur de François Hollande ne sauraient cependant être mises en doute. Mais se promener en bras de chemise dans les salons de l’Élysée est un exemple de relâchement bientôt suivi par d’autres et par le personnel qui n’hésite pas à prendre ses aises sur le satin des fauteuils XVIIIe en bois doré. Ces beaux usages, si difficilement maintenus, volent en éclat au cours d’une réunion avec les députés socialistes. Assis d’une façon désinvolte le président se trouve tout de même face à eux. Il réunit encore ses proches conseillers autour d’une table ronde, abolissant toute référence protocolaire.

Se révèle parfois, comme dans un sursaut bien naturel,  un tantinet de vernis. Une réunion de crise organisée dans le bureau après les attentats de janvier montre le président assis derrière son bureau en face de son équipe de conseillers assis de l’autre côté.

Enfin, les diverses séquences du reportage révèlent que si président ne prend pas forcément la pluie, il prend l’eau … parfois. Ainsi perd-il ses nerfs devant les journalistes de France Inter pour s’exprimer comme l’aurait fait le premier secrétaire du parti socialiste qu’il fut autrefois. Mais détail le plus révélateur, perçu immédiatement par l’ensemble des commentateurs, est relatif à la séquence avec Fleur Pèlerin : il faut des idées à ce gouvernement rajeuni… qu’on aille aller les chercher ailleurs !

Peu importe finalement, car il revient au secrétaire général d’avoir également le mot de la fin : « le plus important [est que ce gouvernement] a toute la confiance du président », comme si les compétences des ministres n’étaient que qualités accessoires. On met des jeunes : gouvernement de rajeunissement non par leur qualité ou leur compétence.  Secrétaire gal de l’Elysée Le plus important il a toute la confiance du président…. Les qualités passent après. La mission : préparer l’avenir, confiance entre nous et les Français. Il n’a jamais de veine, la pluie même à l’inauguration du sapin de Noel. Un conseiller amicalement, enlève une poussière sur la veste de Hollande.

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