Les Israéliens parviendront-ils à faire échouer la ratification de l'accord sur l'Iran au niveau du congrès US ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Les grandes puissances sont parvenues à un accord sur le nucléaire iranien, le 14 juillet.
Les grandes puissances sont parvenues à un accord sur le nucléaire iranien, le 14 juillet.
©Reuters

Dernier combat

Les grandes puissances et l'Iran ont conclu, mardi 14 juillet à Vienne, un accord pour résoudre le dossier du nucléaire iranien. Prochaine étape aux Etats-Unis : le Congrès, où les Républicains, traditionnellement fervents défenseurs des intérêts d'Israël, détiennent la majorité.

André Kaspi

André Kaspi

André Kaspi, est agrégé d'histoire, spécialiste de l'histoire des États-Unis. Il a été professeur d'histoire de l'Amérique du Nord à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et directeur du Centre de recherches d'histoire nord-américaine (CRHNA). Il a présidé notamment le comité pour l'histoire du CNRS.

 

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Atlantico : Israël bénéficie de l'appui des américains sur bien des dossiers. Pourtant, Barack Obama appelle à la ratification de l'accord sur nucléaire Iranien par le Congrés Américain. Or, les partis politiques israéliens peu importe leur orientation y sont opposés. Israël peut-il espérer convaincre le Congrès ? Quelles chances a-t-il d'y parvenir ?

André Kaspi : Il faut rappeler que la majorité au Congrès appartient au parti Républicain. Pourtant, cela ne signifie pas que les Républicains, généralement très en faveur d'Israël, disposeraient des voies nécessaires pour contrecarrer la décision gouvernementale. Il n'est pas non plus acquis que tous les Républicains se rallient derrière ce mot d'ordre, comme il n'est pas certain que tous les Démocrates se rangent derrière Barack Obama. Quoi qu'il en soit, leur opposition, aussi forte puisse-t-elle être, ne serait pas à même de briser le véto présidentiel.

Cependant, ceci n'empêche pas les Républicains et les opposants à l'accord de tenter de convaincre le reste des américains que ce dernier est, en plus d'une mauvaise idée, hasardeux. Il est donc indéniable que la contestation se fera vive à l'approche du Congrès. Reste seulement à voir si l'Iran respecte son engagement. Dans le cas inverse, le Président Américain se trouverait dans une position de très grande faiblesse.

D'autre part, si le gouvernement israélien est opposé à l'accord sur le nucléaire iranien et se dit prêt à tout pour assurer la sécurité de l'état, la position du peuple est bien plus nuancée. Les israéliens sont totalement opposés à une possible guerre contre l'Iran et veulent à tout prix conserver l'allier américain. En ce qui concerne la classe politique israélienne, elle est divisée sur la question. Si la crainte face à un Iran menaçant est partagée par la majorité des partis politiques, tous ne sont pas en défaveur de cet accord. D'ailleurs, en y réfléchissant, bien que l'Iran reste un danger pour Israël, il n'est plus le même depuis le départ de Mahmoud Ahmadinejad en 2013.

Que le gouvernement de Barack Obama propose une compensation militaire à Israël -accord secret parut dans la presse israélienne- n'est-il pas, au contraire, symbolique d'un Congrès qui pourrait voter en défaveur d'Israël ?

Les Etats-Unis proposent des compensations sous forme de matériel militaire aussi bien à l'Arabie Saoudite qu'à Israël. Dans un premier temps, Benyamin Netanyahou affirme ne pas vouloir de ce "cadeau" américain, ce qui ne veut pas dire qu'il n'acceptera pas plus tard…

Si les nombreuses contestations que soulève ce rapport, rendent son avenir quelque peu incertain, la perspective de son approbation est bien plus plausible. Bien que ceci pourrait provoquer la protestation du gouvernement israélien, il n'est pas question que celui-ci fasse quoi que ce soit qui puisse compromettre sa relation d'allier historique avec les Etats-Unis.  Pour autant, cela ne veut pas dire qu'ils ne tenteront pas d'influencer la décision américaine avant le verdict final.

Cela étant dit, Barack Obama se montrant relativement plus ferme que ses prédécesseurs sur le dossier Israélien, il est fort peu vraisemblable que Benyamin Netanyahou parvienne à influer sur sa décision. D'un autre côté, les Républicains ne manqueront pas de venir au secours d'Israël à l'approche des présidentielles américaines de 2016.

Selon Barack Obama cet accord est dans l'intérêt sécuritaire des deux pays. Le président Américain avait amorcé en 2014, par exemple, un rapprochement avec Téhéran, en revanche il avait ouvertement critiqué la politique menée par Benjamin Netanyahu. Ainsi, où en est la position du gouvernement et de la population américaine vis à vis d’Israël ? 

Il faut distinguer deux éléments. Barack Obama a très peu de sympathie envers Benyamin Netanyahou d'autant plus que celui-ci s'en est référé directement au Congrès, dans l'espoir de pouvoir y plaider sa cause, sans passer par le Président américain.

En revanche, Barack Obama est réaliste, il respecte le fait que le Président Israélien a été élu démocratiquement par un grand nombre d'israéliens. Il en tient donc compte, encore d'avantage durant la période d'incertitude qui précède les élections présidentielles. Quant aux israéliens, ils attendent avec impatience le résultat des élections en espérant que le prochain président américain leur soit plus favorable. Dans les mois à venir, la relation qui unie ces deux nations sera tiède mais étroite dans la mesure où Israël est le meilleur allié des Etats-Unis aux Moyen-Orient.

Pour ce qui est de la population américaine, dans sa majorité elle ne se passionne pas pour la politique étrangère. Les rares milieux sociaux  qui s'y intéressent sont surpris par la rigueur de Benyamin Netanyahou et souhaiteraient plus de souplesse de la part d'Israël.  

Si la presse, le gouvernement et la population israélienne fustigent l'accord et demeurent convaincu de la menace iranienne, qu'en est-il de l'opinion des juifs américains ? Les lobbies juifs, parfois opposés à la politique menée par Benjamin Netanyahu, sont-ils alignés, sur ce point, sur la vision du Premier ministre israélien ?

Penser que les juifs américains sont tous alignés sur la position de Benyamin Netanyahou serait une erreur. Il faut d'ailleurs distinguer trois tranches de cette catégorie de la population :

  • Ceux qui soutiennent corps et âmes la politique israélienne, qui sont prêts à se battre contre les adversaires de Benyamin Netanyahou et qui, ainsi, s'alignent sur la position du Chef d'Etat israélien quoi qu'il arrive.
  • Ceux qui pensent que Benyamin Netanyahou en fait trop. Ces derniers soutiennent Barack Obama –dans le cas de l'accord sur le nucléaire iranien également- et sont convaincus de l'importance que l'appui américain représente pour Israël.
  • Ceux qui ne suivent absolument pas de prêt la politique israélienne, qui y sont indifférents.  

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