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Quand le chômage à 25 ans compromet la totalité d’une carrière : l’OCDE lance une alerte sur le piège qui se referme sur toute une génération européenne
©Reuters

L'autre tragédie

Dans son rapport de 2015 sur l'emploi, l'OCDE tire la sonnette d'alarme pour dénoncer les dangers pour l'avenir que représentent le taux de chômage élevé chez les jeunes.

Pierre-François Gouiffès

Pierre-François Gouiffès

Pierre-François Gouiffès est maître de conférences à Sciences Po (gestion publique & économie politique). Il a notamment publié Réformes: mission impossible ? (Documentation française, 2010), L’âge d’or des déficits, 40 ans de politique budgétaire française (Documentation française, 2013). et récemment Le Logement en France (Economica, 2017). Il tient un blog sur pfgouiffes.net.
 

Vous pouvez également suivre Pierre-François Gouiffès sur Twitter

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Atlantico : L'OCDE, dans son rapport de 2015 sur les perspectives de l'emploi publié très récemment, tire la sonnette d'alarme : la situation des jeunes sur le marché du travail est encore catastrophique et pourrait bien empirer si rien n'est fait. Quelle est la situation ?

Pierre-François Gouiffès : Toutes les publications de l’OCDE relatives aux politiques de l’emploi mettent en avant depuis la crise de 2008 le caractère très préoccupant du chômage des jeunes, qui reste supérieur à son niveau d’avant-crise. Le taux de chômage des jeunes (15-24 ans) est tout simplement le double de celui de l’ensemble de la population active dans l’OCDE : 14,1 % contre 6,9 % fin mai 2015.

L’OCDE mesure également les 15-29 ans qui ne sont ni en formation ni en emploi « Neither in Employment nor in Education or Training » : NEET), plus nombreux aujourd’hui qu’ils n’étaient en 2007.

Ce sombre constat est d’autant plus préoccupant que l’OCDE constate que les perspectives de carrière se construisent largement au cours des dix premières années de vie active, ce qui risque de fortement limiter les opportunités professionnelles pour la génération arrivée sur le marché du travail pendant la crise.

Qu'est ce qui est concrètement mis en cause par l'OCDE ? L'OCDE porte un jugement sévère sur les politiques menées par différents gouvernements de pays développés. Quels sont les gouvernements visés et quelles sont les méthodes qui sont critiquées ?

Il y a d’abord l’effet de la crise. L’augmentation des jeunes sortis de l’emploi et des NEET est ainsi particulièrement forte dans les pays les plus fortement touchés par la récession : Grèce, Irlande, Italie, Slovénie et Espagne.

Concernant les politiques publiques, l’OCDE considère qu’il faut augmenter les efforts et limiter les coupes des budgets permettant l’accompagnement des chômeurs de longue durée et des jeunes vers l’emploi. Selon elle, certains pays (Espagne, Irlande, Italie, Royaume-Uni, Australie) ont trop réduit les budgets des politiques de l’emploi.

Mais il y a surtout le sujet des jeunes sans qualification ou en échec scolaire dont l’employabilité à long terme est problématique. On sait en France que le chômage des jeunes est radicalement différent suivant le niveau de qualification.

Des disparités existent-t-elles au sein des pays membres pour ce qui concerne le taux de chômage des jeunes ? Quelle est la situation de la France ?

Il y a en effet de grandes différences autour de la moyenne OCDE. Le chômage des jeunes atteint des niveaux quasiment stratosphériques dans certains pays notamment ceux du Sud de l’Europe : 49,7 % en Grèce, 49,3 % en Espagne, 41,5 % en Italie, 33,3 % au Portugal. En face les chiffres de chômage des jeunes concernant l’Allemagne (7,1%), le Royaume-Uni (15,7 %) ou les Etats-Unis (12,2 %) peuvent laisser rêveur. L’OCDE constate par ailleurs quelques baisses du taux de chômage des jeunes dans certains territoires (Estonie, Hongrie, Irlande).

La France a pour sa part un taux de chômage des jeunes deux fois et demi supérieur à son taux de chômage moyen lui-même supérieur de plus de trois points à la moyenne OCDE : 23,7 % contre 10,3 %. Pour l’OCDE, « avec un taux de chômage élevé chez les jeunes, la France prend le risque de compromettre l'avenir de ses jeunes générations. ». L’OCDE constate en outre que le chômage des jeunes continue d’augmenter en France alors qu’il se stabilise ou il baisse dans l’OCDE ou l’Union Européenne.

Cette situation va-t-elle être amenée à empirer ? Si oui, avec quelles conséquences pour les pays ?

Une grande partie de taux de chômage tient toutefois à la faible croissance que connaissent certains pays dont la France.

A moyen terme, la situation du chômage des jeunes pose la question difficile et même un peu tabou de la solidarité intergénérationnelle que le sociologue Louis Chauvel a mise en lumière via son analyse du « destin des générations » : il constatait une dégradation progressive de la situation des jeunes en égard à trois critères d’analyse : accès à l’emploi, accès au logement, nature des carrières salariales, auxquels on pourrait rajouter la question de l’équité du lourd système français de protection sociale.

Quelles peuvent être les solutions mises en place pour endiguer ce phénomène ?

L’OCDE a développé depuis une quinzaine d’année une doctrine complète concernant les politiques de l’emploi, doctrine articulée autour du concept d’activation de la dépense pour l’emploi en substitution de la simple indemnisation des demandeurs d’emplois.

Pour la France, les enjeux concernent le secteur éducatif, la lutte contre la rupture scolaire et le redressement de l’apprentissage dont les volumes ont baissé en dépit des discours politiques rituels en la matière, le contrôle de la recherche d’emploi, enfin le sujet très sensible du niveau du salaire minimum dont l’OCDE constate qu’il est extrêmement proche du salaire médian en France (3ème écart le plus faible après la Turquie et le Chili).

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