Les trois raisons pour lesquelles le FMI va devoir faire profil bas<!-- --> | Atlantico.fr
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Que la Grèce dise "non" au référendum n’implique pas forcément une sortie de l’euro.
Que la Grèce dise "non" au référendum n’implique pas forcément une sortie de l’euro.
©Reuters

L'Edito de Jean-Marc Sylvestre

La Grèce n’a pas remboursé le FMI. Athènes vient donc de mettre un pied en dehors de la zone euro. Pourtant, tout le monde fait semblant de tenir en équilibre car tout est encore possible, y compris l’annulation de ce référendum suicidaire. Le FMI lui, a été prié de faire profil bas.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Au douzième coup de minuit, la Grèce n’a pas payé les 1,3 milliard d’euros qu’elle devait au FMI. Dernier pied de nez  à l’histoire,  les manifestants proches de Syriza ont célébré cet évènement comme une victoire du peuple sur l’Europe financière et le monde capitaliste. En attendant, les contraintes juridiques et techniques sont à l’œuvre et vont empêcher les Grecs d’espérer pouvoir vivre normalement. La situation s’est profondément dégradée et cela va forcément encore s’aggraver.

Depuis minuit, la Grèce est  théoriquement en état de cessation de paiement puisqu'elle n’a pas honoré son engagement à l’égard du FMI. Pourtant, l'organisation n’a encore fait aucun commentaire, aucune remarque. Et pour cause, le FMI fait profil bas pour trois raisons majeures.

Tout d'abord, tout le monde s’est aperçu que les méthodes du FMI cristallisaient  la colère des Grecs et du gouvernement grec. Le FMI appliquait le mandat qui est le sien sans état d’âme. Les Américains qui sont les actionnaires principaux du fond ont fait appliquer sans hésiter les règlementations. C’est la raison pour laquelle Christine Lagarde a donné l’impression de diriger les opérations. Effet boomerang, elle a pris tous les coups médiatiques et encaissé toutes les critiques. Depuis que la Grèce est arrivée en phase terminale, on a demandé au FMI de ne pas mettre de l’huile sur le feu pour essayer de calmer le jeu.

La deuxième raison de la discrétion du FMI c’est que, juridiquement, le directeur général aurait les moyens d’écraser complètement la Grèce. Ce qui conduirait à son exclusion des instances internationales, à perdre son droit de vote au FMI et à la banque mondiale. Le défaut de paiement est un acte très grave pour un pays. C’est d’ailleurs la première fois qu’un pays industriel se retrouve dans une telle situation. Cela veut dire aussi qu'aucune banque au monde n’accepterait de travailler avec une banque ou une entreprise grecque. Théoriquement, le FMI devrait cette semaine  bannir  la Grèce des relations économiques et financières internationales. Théoriquement, la Grèce aurait donc depuis hier soir, mis un pied en dehors de la zone euro.

En réalité, le FMI va tempérer jusqu‘au référendum. Le FMI devrait déclarer seulement "un incident de paiement" ce qui éviterait la mise en place des procédures d’exclusion.  Juridiquement, il peut parier sur un accord boiteux au dernier moment et même une annulation par Tsipras de son référendum catastrophe,  et  encore donner 30 jours à la Grèce,  pour trouver une solution.

La troisième raison, ce sont les circonstances dans lesquelles le FMI est arrivé en Europe dans le dossier grec. A priori, personne en Europe ne serait allé chercher le FMI pour régler une affaire intérieure à la zone Euro. Il existe à Bruxelles toutes les institutions pour intervenir avec tous les moyens possibles notamment ceux du FESF.

Les raisons pour lesquelles le FMI s’est retrouvé dans cette galère sont assez peu glorieuses. Il est vrai que les Etats européens ont vu dans l’arrivée du FMI, l’opportunité d’obtenir des fonds d’interventions supplémentaires avec des règles de gestion préétablies.

Le FMI est arrivé d’autant plus facilement que les chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro n’étaient pas d’un courage exemplaire.

L'homme qui a eu l’Idée de se faire inviter dans le dossier, c’est Dominique Strauss-Kahn. Pour lui, cette opération n’avait que des avantages. Il faisait plaisir aux Allemands, il pouvait passer en Europe pour un des sauveurs de la zone euro. Il répondait aussi à la demande pressante de ses amis de la banque Lazard qui étaient chargés de restructurer la dette. Enfin, il avait un moyen de se faire de la com' quasiment tous les jours dans les journaux français et européens.

Il revenait en Europe alors que le risque pour lui était de se faire oublier à Washington. A quelques années d’une présidentielle où il  partait favori, le jeu en Grèce en valait la chandelle. Le problème, c’est que l’affaire du Sofitel a brise cette stratégie et a laissé la Grèce face aux technocrates du FMI chargés d’appliquer la règle et l’austérité. DSK comme souvent, savait prendre quelques libertés  avec la règle et la morale.

Christine Lagarde a hérité de ce dossier avec des Européens absents et des actionnaires de plus en plus inquiets de la dérive grecque. Aujourd’hui, le conseil du FMI a sans doute mis une croix sur sa créance grecque. Le conseil présentera  plus tard l’addition. Mais ce n’est pas tout, le conseil a sans doute déjà décider de ne plus mettre les pieds en Europe. Ce continent à la fois trop riche et pas assez courageux pour se réformer et se donner une discipline commune.

Pour le FMI, la Grèce restera "un sinistre". Evidemment, le FMI a prêté 30 milliards à la Grèce depuis 8 ans. Mais le dossier est certaienement fermé. Pour la communauté internationale ça restera l’occasion de réfléchir à la gouvernance mondiale.   

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