Le bac, ça ne se prépare pas qu’en révisant : ce à quoi vous avez intérêt à occuper les 48 dernières heures <!-- --> | Atlantico.fr
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48 heures avant l'examen, il ne faut pas rester le nez collé sur ses fiches de révision.
48 heures avant l'examen, il ne faut pas rester le nez collé sur ses fiches de révision.
©Reuters

Manuel d'anti-bachotage

Solliciter à outrance le cerveau durant un court laps de temps n'est pas bénéfique. Mieux vaut prendre l'air ou faire du sport avant de se donner en salle d'examen.

Pierre Duriot

Pierre Duriot

Pierre Duriot est enseignant du primaire. Il s’est intéressé à la posture des enfants face au métier d’élève, a travaillé à la fois sur la prévention de la difficulté scolaire à l’école maternelle et sur les questions d’éducation, directement avec les familles. Pierre Duriot est Porte parole national du parti gaulliste : Rassemblement du Peuple Français.

Il est l'auteur de Ne portez pas son cartable (L'Harmattan, 2012) et de Comment l’éducation change la société (L’harmattan, 2013). Il a publié en septembre Haro sur un prof, du côté obscur de l'éducation (Godefroy de Bouillon, 2015).

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48 heures, on l'a connu comme titre de film et chaque année, il s'agit aussi des dernières heures avant le baccalauréat, quand des candidats aux cent coups cherchent à glaner le théorème de maths ou la citation philosophique de la dernière chance pour ne pas planter l'examen, marquer les quelques points décisifs pour la mention, ou à défaut, tout simplement, se rassurer. Dans la pratique, si on en est là, c'est que quelque chose n'est pas allé de soi au cours des années de lycée.

Alors que fait-on, lors des dernières 48 heures ?

On s'aère, on passe du temps avec les gens qu'on aime, on pratique une activité physique sans souci de compétition, on soigne son alimentation et la qualité de son sommeil, on évite les contrariétés et les trépidations urbaines... rien de très nouveau du côté de l'esprit sain dans le corps sain. De l'enfant jeune qui apprend avec son corps à l'adolescent dont le corps change à la période de l'examen, il faut aussi savoir gérer ce véhicule individuel et lui donner une place dans la révision et à fortiori dans la dernière ligne droite, sans perdre de vue les cours liés aux différentes épreuves.

Le bac ne se prépare pas en terminale, il est la résultante d'un cursus complet, depuis la primaire, une étape pour laquelle la construction de l'élève depuis la plus tendre enfance et l'assimilation comptent plus que l'empilement de recettes de dernière minute. Se présenter au bac, c'est aussi se présenter devant l'âge adulte, ce moment où on va entamer les études supérieures qui relèvent de l'entrée dans l'antichambre des futures carrières professionnelles. Pour beaucoup de jeunes de province, c'est également le signal de l'abandon du nid familial pour cause d'études dans la capitale régionale ou départementale. C'est le sens caché de cet examen, qui n'apparaît pas forcément dans toute son ampleur à l'élève qui s'y présente, mais c'est un sens prédominant, ce moment où l'on vous demande une forme d'autonomie définitive. Elle commence également devant la feuille blanche. Outre les contenus, l'élève expérimente son attitude face à la tâche, son organisation dans un devoir, sa gestion du trac et du stress, sa sélection des items lui apparaissant faciles ou difficiles, sa capacité à sérier les moments de travail, à répondre devant un examinateur adulte, à entrer dans la relation asymétrique, à faire preuve d'initiative, de ressources, afin de puiser dans des qualités personnelles aussi bien que dans les contenus détenus. Ces deux aspects, plus primordiaux qu'ils ne le sont perçus, ne se bachotent pas.

Les contenus, venons y, ne sont pas seulement un empilement de connaissances, ils doivent avoir patiemment été mis en sens, c'est à dire, articulés les uns aux autres. Il est facilement compréhensible que les matières sont jointives entre elles, que des compétences en linguistique aident à la compréhension d'un problème de maths, que l'histoire télescope la philosophie, que la géométrie et la géographie font bon ménage et ainsi de suite. Ces capacités à mettre en sens afin de faire appel, le jour de l'examen à un ensemble de savoir et savoir faire cohérents entre eux, ne se bachotent pas non plus. Cette assimilation des apprentissages et leur mise en sens a lieu lors du sommeil, des périodes de repos et d'expérimentation. Cela non plus ne relève donc pas des révisions de dernière minute. Solliciter à outrance le cerveau sur de courtes périodes n'aboutit rien moins qu'à de la fatigue intellectuelle et de la fatigue tout court.

Les contenus de l'examen, ne l'oublions pas, sont pensés pour que plus de 80 % des élèves obtiennent ce fameux examen. On n'est donc pas dans une volonté de faire échouer mais plutôt de faire réussir. Ce n'est pas un concours, c'est devenu un rite initiatique. Beaucoup de lycéens de haut niveau ont bien compris cela et ne se battent plus pour le bac en lui-même mais pour la mention "bien" ou "très bien", qui va permettre d'ouvrir les sésames les plus convoités du supérieur.

Mais alors, que faut-il faire ?

Il faut être attentif en cours, en premier lieu et cette simple concentration sur le cours, le traitement oral, auditif et intellectuel de ce qui se passe pendant le cours, est en lui-même une base solide. Elle est de nos jours, souvent altérée par la gestion des outils informatiques ou les bavardages incessants intervenant pendant le cours, distrayant ainsi les élèves et les éloignant de cette compréhension première qu'ils pourraient avoir des sujets. Il faut également écrire, ou ré-écrire. Prendre des notes, traiter ces notes par écrit. Ou ré-écrire, quand on pratique le copié/collé devenu omniprésent, à tel point que des profs se retrouvent à corriger les mêmes paragraphes tirés des mêmes sites traitant du sujet donné, visités par tous les élèves de la classe. Ré-écrire, comme écrire, permet de s'approprier, de transformer les informations en transit entre le net et la copie, en informations qui vont rester dans le cerveau de l'élève et entrer en résonance avec celles qui y sont déjà.

Egalement, il faut consacrer, quand on révise, son énergie à cette révision et ne pas la diluer dans cette forme de révision très actuelle, pratiquée entre SMS et réseaux sociaux. La capacité à "débrancher", à être seul, à se couper du reste du monde pour se consacrer à son travail est gage, à la fois, de travail en profondeur, de maturité face au travail et de solidité psychique.

En somme, une écoute préalable de qualité et un traitement à posteriori, non parasités par les affres de la vie moderne au cours de l'ensemble de la scolarité suffisent amplement à se présenter au bac avec les meilleures chances de réussite. Les meilleurs élèves savent parfaitement ce qu'il faut faire pour décrocher les mentions et au risque de passer pour politiquement incorrect, je dirais que le bachotage de dernière minute est un truc de cancre... ça peut peut-être permettre de passer la barre, mais sans garantie de la réception.

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